« Après le plaisir de posséder des livres, il n'en est guère de plus doux que celui d'en parler. » Charles Nodier

"On devient bibliophile sur le champ de bataille, au feu des achats, au contact journalier des bibliophiles, des libraires et des livres."
Henri Beraldi, 1897.

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mercredi 9 avril 2008

Débat : Le relieur d'art, artiste ou artisan?

Amis Bibliophiles Bonjour,

Certains d'entre vous sont relieurs professionnels, d'autres sont relieurs amateurs. Certains d'entre nous font appel à des relieurs pour offrir une protection matérielle à un de leurs livres, d'autres leur demandent de sublimer le contenu par un contenant, une reliure, donc, ayant une dimension artistique.

Le relieur est-il un artisan, auquel on confie une tâche, ou un artiste auquel on demande d'exercer son art? Il est à noter que la nuance entre les deux termes date plus ou moins de la Révolution Industrielle.

Selon le Littré : l'Artisan est celui qui exerce un art mécanique, un métier. Il peut être habile, adroit, etc.

Pour le même dictionnaire, l'Artiste est celui qui exerce un des beaux-arts, mais aussi une personne qui a le génie, le sentiment, le goût des arts.

De mon côté je dirais que si ce sont tous les deux des créateurs, l'artisan reste soumis à certaines contraintes (le marché, l'utilité, l'ergonomie) d'une part et d'autre part, il peut reproduire des oeuvres identiques. L'artiste de son côté peut échapper aux réalités et à toute contrainte et crée une oeuvre unique.

Dans le cas des relieurs, la nuance est difficile à faire : doit-on considérer par exemple que Dubuisson, relieur du 18ème, est un artisan, reproduisant "à l'infini" des plaques qu'il a créé, mais que Bonet est un artiste, faisant de chaque reliure une oeuvre unique?

Doit-on simplement se baser sur cette distinction historique, issue de la Révolution Industrielle : sommairement, les relieurs d'avant 1850 sont artistes et artisan, puis après la Révolution Industrielle, on commence à distinguer les deux?

Qu'en pensez-vous? Je parle bien sûr de la reliure "d'art" et non pas de la reliure plein veau du 18ème, etc.
Et vous, qui êtes relieurs, comment vous considérez vous? (à moins que la réponse ne soit simplement "certains jours artisan seulement, d'autres artisan et artiste, selon l'humeur, le client, l'inspiration...").

H

5 commentaires:

Anonyme a dit…

A mon humble avis, le relieur est le plus souvent un artiste, et cela devient d'ailleurs un vrai problème quand on voit certaines reliures actuelles, dont on se demande dans quel sens exactement on doit les tenir... Je plains parfois les pauvres livres qui n'ont rien demandé et qui vont devoir ensuite traîner pour des siècles de ridicules tenues en forme de pneu de formule 1 ou de mauvaise lampe à chevet façon Ikea.

Je demande sans doute l'impossible, mais le mieux, en matière de livres serait d'avoir un dimension artistique mesurée... ou en tout cas qui laisse chaque livre rester un livre...

Tristan.

Anonyme a dit…

Le relieur est comme un peintre ou un lissier: d'abord et avant tout un artisan.

A titre ce comparaison, la peinture flamande ou la tapisserie flamande: on pouvait choisir, dès le XVIème siècle, les motifs qu'on voulait dans un catalogue, et créer son tableau ou sa tapisserie: c'est de l'artisanat. L'artisan relieur aura son catalogue de reliure et copie.

L'artiste est celui qui crée, essaye, corrige. Ce n'est pas celui qui copie uniquement.

Je connais quatre relieurs: deux artistes et deux artisans.

Ensuite, tout dépend de ce qu'on cherche.

Wall (qui ne participe plus beaucoup, mais continue de survoler le blog)

Anonyme a dit…

Puis-je vous rappeler que la grande majorité des reliures d'art du XXe siècle n'ont pas été exécutées par ceux qui les ont signées : créateurs qui sont à la reliure ce que sont les grands couturiers au vêtement. Par exemple : Pierre Legrain et Paul Bonet, qui ont fait appel à des artisans relieurs (René Kieffer pour Legrain)pour exécuter leurs maquettes.

Anonyme a dit…

Je demande en tant que bibliophile à un relieur d'éxécuter vite, bien, et avec un minimum d'art ce que je lui demande.

Le relieur d'art ou le très bon relieur courant (je fais une distinction avec les relieurs qui n'en sont pas comme les maquettistes tels Bonet, Legrain, en partie Monique Mathieu, etc) doit donc être avant tout un bon ouvrier, précis, talentueux, respectueux de mes moindres souhaits (le bibliophile n'est-il pas par nature le plus pointilleux des pointilleux ??).

Au final je ne lui demande que peu d'esprit d'initiative, je dirais même que je ne lui en demande pas. Si créativité il doit y avoir pour une reliure que je lui demande, c'est alors ma créativité que j'exprime à travers sa technicité et son savoir-faire.

La reliure est donc pour moi avant tout un métier, métier d'art sans aucun doute puisqu'on y fait appel à des connaissances assez pointues d'histoire de l'art, des styles, des époques, des cuirs, de la dorure, etc.

Le relieur est donc un artisan, sans aucun doute.

Le fait que ce soit un très bon, voire un excellent artisan, n'en font pas cependant un artiste à part entière.

L'artiste relieur ne relie pas la plupart du temps, et je me demande si les Legrain, les Bonet, etc, n'auraient pas pu excercer leur Art sur quelque autre support : meubles, bâtiments, objets décoratifs, etc.

Le relieur est avant tout maître de la parfaite exécution du corps d'ouvrage, sa parfaite et indispensable maîtrise du geste en font un allié indispensable du bibliophile.

L'artiste décorateur et maquettiste n'est au bibliophile que "l'illustrateur de reliure", le "décorateur" des bibliophiles "iconobibliopégistes".

Est-ce là la seule façon de voir les choses ?? Bien évidemment que non, à vous de donner votre avis.

Bonsoir,

Albert

Anonyme a dit…

Albert, vous avez tout compris. Legrain, entre autres, exerçait son Art sur d'autres objets, jusqu'à des poudriers...

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