« Après le plaisir de posséder des livres, il n'en est guère de plus doux que celui d'en parler. » Charles Nodier

"On devient bibliophile sur le champ de bataille, au feu des achats, au contact journalier des bibliophiles, des libraires et des livres."
Henri Beraldi, 1897.

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vendredi 13 mai 2011

Les différentes types de reliure: la reliure en parchemin de réemploi

Amis Bibliophiles bonjour,

Pierre, voici quelque temps, s’inquiétait d’une tendance du blog, croyait-il, à présenter des ouvrages toujours plus rares et coûteux.


Le type de reliure que je vous présente aujourd’hui n’a rien de précieux, du moins à l’origine. Les reliures en parchemin de réemploi sont d’un usage aussi ancien que le livre. Dans leur logique économique elle rejoignent les palimpsestes, textes écrits sur des parchemins de récupération dont l’écriture première a été effacée. Il s’agit là de protéger un livre d’usage courant le plus souvent (livres liturgiques, manuels de droit) à moindres frais. Ces couvertures de fortune bénéficient parfois d’un parchemin enluminé daté du XIIIe au XVIe siècle, bribe d’un livre liturgique qu’on regarderait aujourd’hui comme précieux, bien que le reste de ses pages ait souvent servi de claies de reliures.

Je vous propose quelques exemples. Le premier sur un minuscule coutumier du Berry de 1629, recouvert, comme il se doit, d’un fragment d’un acte notarié concernant un bien immobilier. La couvrure est faite sur un carton rigide. 


Le second recouvre une Bible des Noëls imprimée à Blois en 1723. Deux pages d’un livre liturgique, rubriquées, ont été utilisées repliées, cousues sur les bord et cousues ensemble pour s’adapter au format. 




La couture au corps de l’ouvrage est des plus sommaires. Il n’y a pas de contre plat. Le manuscrit est musical, il utilise une portée de quatre lignes avec des notes carrées noires à lire en clef d’ut deuxième. La composition du texte est en gothique bâtarde. L’ensemble est assez difficile à dater à cause de la longue survivance de cette notation dans la liturgie. Je penche pour une première moitié du XVIe siècle. Mes derniers exemples regroupent plusieurs livres en vente chez Kapandji Morhange le 25 mai prochain (parchemin souple, parchemin rigide, demi vélin et parchemin de réemploi) et un autre vendu jeudi 12 mai à Lyon (feuillets de parchemin sur cartonnage souple du XIXe siècle).


En effet, au XIXe et au début du XXe cet usage de réemploi des enluminures liturgiques surtout a perduré chez les bibliophiles sans préoccupation de coût mais avec le soucis d’une reliure chatoyante et d’un cachet “rétro”. Cachet “rétro” qui égaille aujourd’hui efficacement une bibliothèque de livres en peau de vélin d’époque!

Lauverjat

4 commentaires:

Pierre a dit…

J'adore ces petits ouvrages recouverts de parchemins de récupération. N'étant pas paléographe ni tronçonneur, j'admire ces couvertures qui racontent une histoire. Ces protections "de fortune" ont néanmoins un défaut fréquent. Elles baillent, laissant souvent l'ouvrage mi-ouvert. Cela provient du carton trop peu épais et du travail de modelage du parchemin qui a dû nécessiter un peu de ramollissement humide. Résultat : couverture étriquée. Un remède ? Pierre

Olivier a dit…

Bah je suis assez d'accord avec Pierre, rétrospectivement et alors que plus personne n'oserait le faire aujourd'hui(bon ça se croise des actes notariés repris au 20ème), ils auraient pu faire mieux.
J'en ai un joli (14-15ème? on en a parlé ici) mais c'est tout de guingois, pas présentable...
C'est ballot... C’aurait pu être formidable... puisqu'on y était.

Bonne soirée,
Olivier

Daniel a dit…

Ces reliures quand elles sont du temps sont tout à fait caractéristique de la perte d'intérêt du manuscrit pour le contemporain du XVe ou XVIe pour qui, la nouveauté de l'imprimerie était un miracle et rejetait le manuscrit au rang de vieillerie inutile. Il est donc logique que ces reliures soient modestes, ce ne sont souvent que des reliures d'attentes, où le vélin a été utilisé comme on utiliserait du journal de nos jours. J'ai un ouvrage début XVIe ou les macules de relieur (protection posée entre le plat et l'ouvrage lors de la reliure et normalement retirée et jetées) avaient été réalisées avec un superbe manuscrit ancien sur velin. Fort heureusement une n'a pas été coupée et est restée dans l'ouvrage, c'est ma plus vieille garde! Très souvent les dos des reliures XVIe sont renforcés avec de vieux manuscrits, mais ils sont invisibles. Au contraire, les reliures faites au XIXe ou moderne avec des velins calligraphiés anciens sont le reflet du regain d'intérêt pour l'esthétique de ces manuscrits.

L'emploi du même matériau, pour la même fonction, à deux époques différentes reflète donc des sentiments opposés. Étonnant non ?

Daniel B.

Anonyme a dit…

Pour assouplir le parchemin racorni, on le traiter avec la solution suivante :
eau 20 cc - glycérine 20 cc - éthanol 60 cc.
La glycérine, non volatile, assure la stabilité hygroscopique.
J'ai déjà utilisé ce traitement, recommandé par les spécialistes officiels, sur des parchemins démontés de reliure ancienne, le résultat est excellent et durable.
Je n'ai jamais essayé sur des couvertures non démontées mais on peut le tenter en appliquant la solution progressivement avec un tampon de coton. Toutefois il est prudent de vérifier d'abord la réaction sur les écritures présentes.
L'éthanol étant volatil, il est recommandé de travailler dans un local bien ventilé si on veut éviter la mésaventure du patriarche Noé.

René

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