« Après le plaisir de posséder des livres, il n'en est guère de plus doux que celui d'en parler. » Charles Nodier

"On devient bibliophile sur le champ de bataille, au feu des achats, au contact journalier des bibliophiles, des libraires et des livres."
Henri Beraldi, 1897.

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dimanche 20 janvier 2013

Les ventes aux enchères de livres anciens: « C’est pour rien », « 300 au fond, 400 sur ma droite », « vous en voulez ? 420 ? Non ? Adjugé ! »

Amis Bibliophiles bonjour,


Tout au long des siècles, les ventes aux enchères de livres ont joué un rôle fondamental dans la pratique bibliophilique. Si les ventes aux enchères existaient déjà à Babylone vers 500 av. J.-C., avec le marché du mariage, et si l’on suppose que des ventes se sont tenues dès le xve siècle en Flandre, la première vente de livres connue en Europe s’est déroulée en 1599 aux Pays-Bas (vente de la bibliothèque de Philippe de Marnix, orchestrée par Louis Elzevier). 

En France, les premières ventes identifiées datent du xviie siècle. Néanmoins, avant 1699, il semble que les livres pouvaient être achetés aussi bien aux enchères qu’à l’amiable, en bloc ou livre par livre, ainsi Jacques Amelot de Beaulieu acquît-il en bloc la bibliothèque de Gilles de Souvré (28 novembre 1632). 


Le doute est entretenu par le catalogue de la vente du fonds du libraire Thomas Blaise (Catalogue des livres de la boutique de Thomas Blaise libraire, lesquels se vendront en destail, au plus offrant & dernier encherisseur, aux jours, lieu & heures assignez par les affiches, qui pour cet effet, seront mises és lieux & endroits accoustumez. Le present catalogue se distribuera en la maison où ledit Blaise est demeurant à present, en la ruë Sainct Jacques à l’enseigne Sainct Thomas) en 1641, qui stipule que les livres seront vendus « en détail, au plus offrant et dernier enchérisseur », alors que le prix de chaque ouvrage est imprimé.

Les ventes sur catalogue sont déjà nombreuses à l’époque, mais c’est la vente Claude Boucot qui est aujourd’hui reconnue comme la première vente aux enchères de livres en France (16 novembre 1699 – Catalogue de la bibliothèque de défunt M. Boucot, garde-rolle des offices de France, composée de plus de dix-huit mille volumes de livres imprimez très bien conditionnez, plusieurs des in-folio étant de grand papier et reliez en maroquin, de plus de soixante et dix mille estampes entre lesquelles il y a dix-sept mille portraits ; d’un très grand nombre de livres d’arts, d’éloges de descriptions, de médailles, d’emblêmes, de plantes et autres remplis de figures ; et de plusieurs manuscrits en velin ornez de très belles mignatures. La vente s'en fera en détail au plus offrant et dernier enchérisseur, le 16 novembre 1699 et jours suivants.). La vente de la bibliothèque nécessita plusieurs vacations puisque, bien qu’elle ait débuté le 16 novembre 1699, le Bréviaire de René II de Lorraine, n° 601, ne fût adjugé que le 6 janvier 1700 (Henry Martin. Le Cabinet d’estampes de Claude Boucot. In Mélanges offerts à M. Henry Lemonnier. Paris, Édouard Champion, 1913).

Au xviiie siècle, Paris s’affirme comme la capitale mondiale des ventes aux enchères de livres, place qu’elle ne quittera plus et qu’elle conserve encore aujourd’hui. C’est aussi l’âge d’or des catalogues rédigés par Gabriel Martin ou De Bure qui constitueront ensuite des ressources bibliographiques de premier plan.

Depuis le xviiie, les grandes collections sont en général dispersées dans des ventes importantes, qui sont autant de moments privilégiés de la pratique bibliophilique. L’amateur peut alors découvrir la bibliothèque rassemblée par un pair, et saisir l’opportunité d’enrichir sa propre bibliothèque.

Parmi les grandes ventes de livres, on retiendra notamment les ventes Hoym, Descamps-Scrive, Rahir, Berès, mais on peut en général considérer que les bibliothèques des plus grands bibliophiles finissent le plus souvent par subit le feu des enchères. De la vente du comte d’Hoym, on peut par exemple retenir qu’elle nécessita 59 vacations, du 12 mai au 2 août 1738, et coûta finalement plus d’argent qu’elle n’en rapporta, malgré la qualité évidente des ouvrages proposés. C’est Gabriel Martin, « savant libraire, le premier en France après Prosper Marchand à se livrer avec succès à la rédaction de catalogues de livres à vendre, et qui sut la porter à un degré de perfection difficile à surpasser » (Brunet, t. III, col.1497), qui fût chargé de la rédaction du catalogue d’une bibliothèque qu’il avait d’ailleurs contribué à enrichir : Catalogus librorum bibliothecae illustrissimi viri Caroli Henrici comitis de Hoym [...]. Digestus & descriptus à Gabriele Martin, bibliopola parisiensi. Cum indice auctorum alphabetico. Parisiis, apud Gabrielem & Claudium Martin [...]. MDCCXXXVIII.

Tout bibliophile en vient un jour à vouloir goûter le parfum des enchères, qu’il souhaite assister à l’une de ces nombreuses « ventes du siècle », durant lesquelles les bibliothèques d’autres amateurs sont dispersées, ou, plus simplement, qu’il se sente prêt à enchérir pour acquérir un lot depuis longtemps convoité.

Il reste cependant rare de croiser des nouveaux venus en bibliophilie dans les salles des ventes, tant cet exercice requiert de connaissances à la fois propres au livre, mais également bien spécifiques au jeu particulier des enchères.

S’aventurer dans une salle des ventes sans ces connaissances et se risquer à enchérir nécessite en effet d’être bien préparé. Mais, pour qui en maîtrise les arcanes, les ventes aux enchères de livres sont une magnifique occasion d’enrichir sa bibliothèque, parfois à moindre coût par rapport à un achat en librairie – et c’est là d’ailleurs l’une des raisons pour lesquelles les connaissances du bibliophile sont cruciales dans une vente, puisqu’il ne bénéficie pas du conseil du libraire, que ne remplace pas l’expert –, et de façon, il est vrai, plus ludique.

L’enchère elle-même est l’aboutissement ultime de l’un des plus doux plaisirs du bibliophile: la lecture d’un catalogue. C’est une source inépuisable d’informations et de découvertes, et l’occasion de découvrir, voire d’acquérir, des ouvrages encore inconnus avant la vacation.

Participer au jeu des enchères nécessite une préparation particulière : pour les ventes courantes qui ne bénéficient pas d’un catalogue, voire de la présence d’un expert (et où les chances de dénicher un ouvrage rare, en bonne condition, sont rares, il faut bien l’avouer), il est impératif de visiter l’exposition – obligatoire depuis 1861 – afin de pouvoir manipuler, voire collationner rapidement, les ouvrages, afin d’éviter toute mauvaise surprise.

Pour les ventes cataloguées, la lecture attentive et approfondie du catalogue est une nécessité, de même qu’une visite de l’exposition, pour évaluer « de visu » la qualité d’un ouvrage, est utile, si l’amateur en a la possibilité. Toute description, même effectuée par un expert, reste en effet subjective, et un « bon exemplaire » peut parfois réserver des surprises à l’amateur exigeant qui n’aurait pas eu l’ouvrage entre les mains. Du reste, la précision « complet » ayant quasiment disparu des descriptions pour limiter les risques de réclamation, il est également fort recommandé de vérifier les collations des ouvrages convoités. Le catalogue lu et relu, les descriptions vérifiées dans les bibliographies adaptées les plus récentes, les ouvrages évalués « de visu », voire manipulés à chaque fois que cela est possible, les estimations comparées aux prix disponibles – si tant est que deux exemplaires puissent être comparés –, le moment d’enchérir se rapproche.


Plusieurs solutions s’offrent alors à l’amateur : enchérir en personne, soit dans la salle, soit à distance (le plus souvent par téléphone), ou faire appel à un tiers pour lui confier un ordre d’achat. Ce tiers peut être l’une des personnes organisant ou assistant la vente, telle que le commissaire-priseur, l’expert, voire le crieur ou un commissionnaire. Les diverses options peuvent se combiner, et il n’est pas rare d’observer un libraire présent dans la salle, dont le commis enchérit par téléphone, par mesure de discrétion. Pour la même raison, l’amateur peut également confier un ordre, tout en étant présent dans la salle.

Pour qui ne peut se rendre à l’hôtel des ventes le jour de la vacation, les deux solutions les plus communes sont de participer aux enchères par téléphone, ce qui reste le moyen le plus sûr de remporter un lot, ou de laisser un ordre d’achat au commissaire-priseur qui enchérira alors en votre nom. L’ordre est un exercice délicat : il permet certes d’éviter la folle enchère, mais pose la question de confier ses intérêts à un intermédiaire qui est à la fois juge et partie, et dont l’intérêt reste de soutenir les prix lors de la vente.

Il n’est hélas pas rare de voir un commissaire-priseur démarrer les enchères au niveau maximum des ordres qui lui sont confiés, au lieu d’enchérir progressivement comme cela devrait être le cas. Et ce, d’autant plus que les études qui organisent les ventes ont une tendance naturelle a favoriser les enchérisseurs présents dans la salle, ce qui simplifie la gestion et les questions logistiques.

La présence dans la salle des ventes ou les enchères téléphoniques sont donc les formules à privilégier. A l’hôtel Drouot, à Paris, la coutume permet également de confier ses enchères aux bons soins d’un commissionnaire, qui défendra alors vos intérêts lors de la vente. L’usage veut alors qu’en cas de victoire, l’amateur remette un pourboire au commissionnaire, qui peut inclure une partie variable, généralement inversement proportionnelle au prix de l’adjudication.

Le déroulement de la vente est d’une grande simplicité : le commissaire-priseur égrène les lots dans l’ordre du catalogue, avec l’aide d’un expert qui peut ajouter des détails nécessaires et agrémenter la description présente au catalogue d’un commentaire plus personnel. En France, on vend en général environ 80 lots à l’heure, selon l’importance des lots, la durée des enchères, voire la dynamique insufflée par le commissaire-priseur ou l’expert.

Le bibliophile ou le libraire qui assiste à une vente connaît la tension croissante à l’approche du lot convoité, et la satisfaction ou la déception qui accompagnent l’adjudication. Pour enchérir, chacun agit selon son tempérament, du bras levé au discret hochement de tête, voire au clignement d’œil qui n’est guère perceptible que par le commissaire-priseur. Chacun également choisira sa place dans la salle de façon stratégique : au premier rang pour bien [re]voir les lots présentés et leur jeter un dernier coup d’œil avant la mise en vente, ou au contraire au fond de la salle, position souvent privilégiée par les professionnels qui peuvent ainsi « contrôler » la salle et les enchères, et surveiller d’éventuels concurrents, car la psychologie joue naturellement un rôle essentiel dans cette pièce de théâtre aux nombreux acteurs.

Les ventes aux enchères sont ainsi le théâtre d’une véritable « comedia dell arte » jouée par ses acteurs et l’occasion d’assister à des scènes savoureuses : amateurs qui soupçonnent – le plus souvent à tort, mais parfois à raison – des ententes entre les professionnels et redoutent la « révise » qui les priverait d’un lot convoité, libraires qui soutiennent les prix pour éviter qu’un amateur ne vienne faire de trop bonnes affaires dans leur « pré carré », manettes, objets de luttes acharnées, concurrence féroce entre libraires « ennemis », amateurs et professionnels se laissant emporter au delà du raisonnable par le jeu des enchères. Il s’y joue d’ailleurs un acte particulier de la relation libraire/amateur, puisque ces vacations constituent l’un des moyens d’approvisionnement des professionnels et que le bibliophile peut donc souvent y acquérir des ouvrages à des prix très sensiblement inférieurs à ceux pratiqués en librairie.

Les ventes aux enchères ont donc, sans conteste, un intérêt majeur pour les bibliophiles : leur préparation nécessite une lecture forcément très enrichissante et formatrice des catalogues, elles permettent d’être en contact avec un nombre très important de livres, ce qui est également très didactique, elles sont une opportunité évidente d’acquérir des ouvrages de qualité, à des prix souvent inférieurs à ceux pratiqués en librairie, elles permettent de vivre les grands moments de la grande histoire de la bibliophilie, dont les catalogues resteront comme des témoignages et des outils aussi précieux que certaines bibliographies, mais elles permettent également, et enfin, de vivre de merveilleux moments d’humanité et de comédie humaine, que l’on en soit un simple spectateur ou l’un des acteurs.

On se souvient de ce grand libraire, aidé par deux assistants, achetant les deux-tiers des lots mis en vente lors d’une vacation, au grand désarroi des autres enchérisseurs présents dans la salle, qui finirent par abandonner la partie. 

On connaît ces ventes d’outre-Rhin où le commissaire-priseur ne décrit pas les lots et se contente de donner leur numéro, écoulant ainsi près de 150 lots à l’heure, mais donnant au spectateur l’impression d’assister à une gigantesque partie de loto. 

On reconnaît également cet amateur, habitué de Drouot, ayant pratiquement perdu la vue et qui se fait relire à voix basse chaque description par une assistante, avant de caresser d’une manière si particulière chaque ouvrage acquis. 

On pense encore des années plus tard à ce libraire spécialisé en bibliographie qui racheta une partie de ses propres ouvrages lors de la vente de sa propre bibliothèque, ne pouvant s’empêcher de lever le bras. 


On soupçonne l’identité de cet acheteur téléphonique si souvent victorieux lors des ventes Berès, dont peu connaissaient le nom véritable et qui passa des jours entiers à enchérir à distance. 

On observe avec amusement ces libraires tentant sans succès de « réviser » un ouvrage dans un café, à côté de Drouot, se livrer au jeu des prix écrits sur des petits morceaux de papier, avant de solliciter l’arbitrage final, et forcément éclairé, du cafetier. 

On s’amuse de voir la même troupe de libraires s’assurer mutuellement de leur présence à Drouot le lendemain, et se retrouver tous, ou presque, dans une vente à 400 kilomètres de là, incognito.

Enfin, l’amateur habitué des salles se souvient des nombreuses fois où il a regretté de ne pas avoir levé la main une fois de plus avant que le marteau d’ivoire ne s’abatte, et se souvient, dans le même élan, des nombreuses fois où il a regretté d’avoir levé la main une fois de trop.

Lexique:

Adjugé : terme prononcé par le commissaire-priseur et accompagné d’un coup de marteau, pour signifier qu’un objet mis en vente devient la propriété de celui qui a porté la plus forte enchère. Seul le mot « adjugé » formalise l’adjudication et transfère la propriété du lot au meilleur enchérisseur. Généralement, il est précisé si le bien est adjugé à une personne au téléphone, à une personne ayant laissé un ordre d’achat à la S.V.V., ou Société de ventes volontaires, à l’expert ou au commissionnaire.

Bordereau d’adjudication : le bordereau d’adjudication est la liste des objets remportés par un acheteur. Il précise le prix d’adjudication et les frais pour chacun des lots. Il tient lieu de preuve d’achat.

Bourrage : technique qui consiste, pour le commissaire-priseur, à gonfler artificiellement les enchères, afin d’atteindre un prix raisonnable pour le vendeur, obtenir un montant d’adjudication au moins égal au prix de réserve. Cette pratique a donc pour objectif de protéger le vendeur. Ces enchères fictives, si elles sont parfois contestées, pour porter atteinte au droit des acquéreurs, permettent également de contrer la pratique illégale de la révision. La jurisprudence a d’ailleurs autorisé la pratique du bourrage. À l’occasion d’un procès concernant la vente d’une œuvre de Max Ernst, le jugement a retenu que le commissaire-priseur « qui a implicitement reconnu avoir recours à des tiers connus pour animer les enchères, était, vis-à-vis des acquéreurs, libre d’adopter l’attitude la plus conforme aux intérêts de son client, et de déterminer conformément à son mandat si les enchères étaient suffisantes ». Comme pour la révision, on le voit, la loi et la jurisprudence considèrent le bourrage, comme un usage ancien, avec une certaine clémence, sans oublier toutefois d’en limiter les abus.

Catalogue : ouvrage imprimé contenant la description, le numéro d’ordre de la vacation et parfois la photographie de chacun des meubles et objets constituant la vente. L’estimation des lots peut aussi y être mentionnée, mais elle est facultative. Le catalogue doit décrire les objets vendus de telle façon que l’acheteur ne puisse concevoir aucun doute sur l’identité et les qualités réelles de ces objets ; il engage ainsi la responsabilité de leurs auteurs (S.V.V. et experts). Les termes employés pour la description doivent donc respecter les définitions établies par le décret n° 81-255 du 3 mars 1981.

Commissaire-priseur : le commissaire-priseur dirige la vente publique aux enchères de biens meubles, la prisée étant l’estimation d’une chose destinée à la vente. La vente aux enchères publiques permet l’établissement du juste prix par la confrontation transparente entre l’offre et la demande. Le terme de commissaire-priseur apparait pour la première fois en 1713 et son statut ne sera pas modifié jusqu’à la Révolution. Les commissaires-priseurs commencent aussi, au cours du xviiie siècle, à s’entourer d’experts, notamment en tableaux et estampes. La Révolution mettra fin à la fonction en 1790 et 1793, laissant la profession sans aucune règlementation. Face au vide juridique créé par les révolutionnaires dans ce domaine, le 27 ventôse de l’an IX, le Premier consul Bonaparte autorise l’exercice de 80 commissaires-priseurs à Paris. Le statut de commissaire-priseur restera une spécificité française et un gage de sécurité, jusqu’à la réforme du 10 juillet 2000 qui en réduira l’impact, en posant une distinction entre les commissaires-priseurs judiciaires et les commissaires-priseurs habilités. Cette réforme ayant pour but d’harmoniser les statuts de la profession en Europe et d’ouvrir le marché français à la concurrence internationale.

Crieur : c’est, comme son nom l’indique, celui qui annonce les enchères. C’est aussi le lien entre le commissaire-priseur et la salle : il remet les bulletins et prend les preuves de paiement et l’identité des acheteurs. Il est aussi habilité à prendre des ordres d’achat pour autrui.

Droit de préemption : la loi du 21 décembre 1921 accorde à l’État, par l’intermédiaire de ses musées nationaux, le droit de se substituer au dernier enchérisseur, pour acquérir un objet en vente publique. Intervenant une fois l’adjudication prononcée, le droit de préemption est exercé sur proposition du ministère de la Culture, pour le compte des musées nationaux.

Enchère : offre supérieure à la mise à prix ou aux offres précédentes pendant l’adjudication.

Estimation : évaluation du prix d’une œuvre faite par une personne agréée dans une Société de vente ou étude ; il peut s’agir d’un commissaire-priseur, d’un clerc ou d’un expert. Cette estimation est généralement une fourchette de prix comprise entre l’estimation basse et l’estimation haute. L’estimation basse est supérieure ou égale à la réserve fixée par le vendeur. (NDLR: avec le temps, les estimations sont venues ajouter une touche d'humour à la lecture des catalogues).

Étude : office d’un commissaire-priseur judiciaire, officier ministériel, seul habilité à diriger une vente judiciaire.

Expert : personne travaillant pour le compte d’une Société de vente et assistant le commissaire-priseur dans l’identification et l’estimation des biens. Les experts sont des spécialistes reconnus dans leur domaine, qui effectuent les recherches nécessaires à la juste qualification de l’objet. L’expert est soumis à une prescription décanale pour l’identification des biens.

Exposition : présentation des lots proposés à la vente, elle fait généralement l’objet d’une mise en place particulière et soignée. Elle a lieu la veille de la vacation (ou durant les quelques jours précédents) et le matin de la vente.

Ordre d’achat : un acheteur ne pouvant se rendre à une vente peut mandater un tiers agréé pour porter les enchères en son nom. Le mandataire peut être le commissaire-priseur (ou l’un de ses représentants), l’expert, le crieur ou un commissionnaire. Cet ordre d’achat est effectué gracieusement.

Prix de réserve : minimum fixé par le vendeur en dessous duquel le commissaire-priseur ne peut adjuger le bien. Il est inférieur ou égal à l’estimation basse et reste confidentiel.

Révise ou révision : tradition des fonds de salle, la révision consiste, pour un groupe d’acheteurs intéressés par les mêmes objets, à ne pas surenchérir sur un membre du groupe. Un seul réalise l’acquisition du bien au prix de la dernière enchère. Une fois le lot adjugé, le groupe se réunit, plus ou moins confidentiellement, et les « enchères » reprennent. L’acheteur ayant finalement prononcé le prix maximum lors de cette « révise », s’acquitte du prix d’adjudication auprès du commissaire-priseur et remet la différence au groupe, qui se partage la somme à parts égales. Cette technique revient donc à atténuer le prix de vente au détriment du vendeur, lequel ne perçoit pas l’intégralité du prix qu’il pouvait légitimement escompter. C’est pourquoi le droit pénal français a prévu de lourdes sanctions à l’encontre des « réviseurs ». En effet, l’article 313-6 du Code pénal prévoit : «Le fait, dans une adjudication publique, par dons, promesses, ententes ou tout autre moyen frauduleux, d’écarter un enchérisseur ou de limiter les enchères ou les soumissions, est puni de six mois d’emprisonnement et de 22 500 € d’amende. Est puni des mêmes peines le fait d’accepter de tels dons ou promesses [...]. Le fait de procéder ou de participer, après une adjudication publique, à une remise aux enchères sans le concours de l’officier ministériel compétent ou d’une société de ventes volontaires de meubles aux enchères publiques agréée.»

En France, les principales maisons de ventes aux enchères de livres sont: Alde, Piasa, Pierre Bergé et Sotheby’s.

H

NRLA numéro IV - HO

10 commentaires:

Textor a dit…

Les enchères sont un beau moment de frustration (Comme vous dites, l’amateur se souvient des nombreuses fois où il a regretté de ne pas avoir levé la main une fois de plus avant que le marteau d’ivoire ne s’abatte, et se souvient, dans le même élan, des nombreuses fois où il a regretté d’avoir levé la main une fois de trop. ). Rien ne vaut le plaisir de passer en librairie, discuter livres et acheter parfois dans le calme, l’ouvrage convoité.
Textor

Pierre a dit…

Tout est dit et bien dit par un connaisseur. Bravo, Hugues !

L'achat en salle de vente volontaire n'est néanmoins qu'une étape dans le chemin initiatique qui fait du bibliophile un bon acheteur.

Il doit être passé par les vide-greniers, les Emmaüs, les bouquinistes, les SVV, Internet, les catalogues des libraires... A chaque fois il croira trouver la meilleure méthode pour faire de bonnes affaires (c'est le jeu : acheter sans adrénaline est triste...) et à chaque fois, il trouvera que sa dernière solution est meilleure que la précédente.

L'idéal est de s’arrêter avant le vol ;-)) Pierre

calamar a dit…

ah, il fallait s'arrêter avant le vol ? oups...

Olivier a dit…

Un billet fort utile/salutaire pour commencer.
Mon premier souvenir de salle des ventes c'est d'être assis comme un c.. à voir passer les livres pendant une heure avant d'oser lever la main.
Les discussions que j'aime le plus entendre ce sont celles de libraires en train de racheter leurs exemplaires au bibliophile décédé... Cela rend philosophe.

Olivier

Hugues a dit…

J'ai l'habitude de dire que je n'achète pas un endroit, mais un livre. Je sévis donc un peu partout, là où mes recherches me portent.

J'avoue néanmoins que l'adrénaline, le jeu des enchères, ajoutent encore au plaisir de la "chasse", et conviennent bien à mon tempérament (sans parler du plaisir d'arracher un livre aux mains d'un libraire... ils ne peuvent pas tout avoir! Sourire).

Et puis sur le long terme, il faut bien le dire, la bibliophilie bat au rythme des grandes ventes.

Hugues

Benoit a dit…

"(NDLR: avec le temps, les estimations sont venues ajouter une touche d'humour à la lecture des catalogues)"
Excellent!

Anonyme a dit…

Quand un bon 90% de la population humaine a songé une fois dans sa vie à l'héritage d'un parent -et sans y voir à mal-, comment pourrait-on en vouloir à des libraires d'avoir de pragmatiques pensées au sujet de la mort prochaine de certains collectionneurs auprès desquels ils n'ont aucune filiation !

La transmission, sous toutes ses formes, est une constante bienvenue de la nature humaine.

La mort aussi :).

Lauverjat a dit…

On se souvient de l'amateur loin de chez lui qui pendant l'exposition rencontre l'ami bibliophile auquel, au grand jamais, il n'avait pas signalé la vente et les livres convoités. Tant pis, on mange ensemble, on a tant de passion à partager...

Lauverjat

Anonyme a dit…

On relit avec plaisir cet article et on regrette d'autant plus l'arrêt de la NRLA.
On aurait aimé un petit "plus" : les noms de ceux dont vous citez les anecdotes. Par exemple qui soupçonnez vous d'être l'acheteur si souvent victorieux lors des ventes Berès ? Ce ne serait pas de la diffamation que de le citer.
On ne peut malheureusement pas avoir chaque fois le plaisir de la bourde de Binoche et Giquello lors de la vente Marcilhac !
Patrick C.

Hugues a dit…

Cher Patrick,
Bérès: c'est le numéro 18!
Hugues

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