« Après le plaisir de posséder des livres, il n'en est guère de plus doux que celui d'en parler. » Charles Nodier

"On devient bibliophile sur le champ de bataille, au feu des achats, au contact journalier des bibliophiles, des libraires et des livres."
Henri Beraldi, 1897.

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vendredi 3 octobre 2014

Comment décrire un livre? Conseils aux néophytes

Amis Bibliophiles bonsoir,

Bibliophiles comme amis libraires nous nous trouvons tous un jour dans la situation de vendre un livre et donc de le décrire. Vos interrogations (étranges) sur marocain/maroquin témoignent d'ailleurs de doutes, pour le moins...
 
Pour vous aider face cette situation délicate, qui est loin d'être évidente, je vous propose de suivre les conseils suivants. Ils sont inspirés de ma longue pratique en tant que lecteur de notices proposées par de nombreux vendeurs, "professionnels emphatiques" ou amateurs, et de la lecture de "A Course in Correct Cataloguing, or Notes to the Neophyte; and A Second Course in Correct Cataloguing, Compiled and arranged by David Magee (1905-77)", que m'a indiqué l'ami Martin, et que j'ai augmenté et adapté.

A prendre bien sûr avec humour et ironie, même si c'est très souvent justifié et vérifiable!

Attribuable à : si votre maroquin n’est pas signé, pas de panique cela ne peut qu’être lié à l’oubli d’un apprenti dans un atelier renommé. A ne pas oublier, si la reliure est ancienne, ne pas hésiter à l’attribuer à Boyet ou à Le Gascon, si elle est 19ème, elle est forcément de Capé, Duru ou Trautz.

Bibliographies : utiles et toujours impressionnantes dans une description, elles sont souvent très profitables. Si elles ne vous profitent pas, ne pas hésiter à dénigrer les bibliographes, qui se trompent souvent ! Si votre édition est inconnue des bibliographies, c’est le jackpot.

Absent des bibliographies : « pas dans Dorbon, Brunet ou Caillet » est une affirmation qui rend votre livre rare et qui sous-entend qui vous avez de vastes références bibliographiques. Ou google à la maison.

Cachets de Bibliothèque: toujours discrets, surtout si vous avez essayé de les effacer.

Coloriés à la main : les illustrations coloriées à la main sont toujours "exquises" et "délicates".

Craquant : adjectif charmant qui s’utilise en général pour les feuilles de laitue.

Défauts : ils sont toujours « minimes » ou « d‘usage » voire « habituels ». Ils sont bien sûr liés aux outrages du temps, mais jamais aux rats, souris, enfants indélicats ou abrutis patentés.

Dorure : elle est toujours "exquise" et très "fine".

Dos : pour un livre 18ème il est toujours "richement orné".

Dubuisson : cf « attribuable à », toute reliure à plaque du 18ème est de Dubuisson… ou presque.

Dürer : toutes les gravures non signées du 16ème siècle peuvent lui être attribuées. Il peut être pertinent de vérifier que votre ouvrage est paru à peu près pendant sa vie.

Premier tirage : si votre copie possède un élément qui tend à montrer qu’elle est de premier tirage, soulignez-le avec force. Et n’oubliez pas de doubler le prix.

Edition Originale : à utiliser sans modération, ne jamais oublier qu’une édition revue, augmentée et/ou corrigée peut aisément être qualifiée d’originale. Ou presque. Et n’oubliez pas de doubler le prix.

Edition (troisième et suivante) : plus difficiles à vendre. Mais vous pouvez sans doute découvrir une préface inédite de trois lignes ou quelques corrections qui vous permettront un efficace « troisième (et meilleure) édition ».

Epave : on préférera « exemplaire de travail ».

Exemplaire/Seul exemplaire connu : n’oubliez pas d’ajouter « excessivement rare », les gens sont tellement stupides.

Exemplaire de travail : tout livre qui est déchiré, sans reliure, roussi, brûlé, dévoré par les vers ou les rats, etc.

Faux-titres : très important si votre exemplaire en possède.

Frotté : doit toujours être accompagné de « légèrement ». Vous pouvez même ajouter « signes de l’amour que lui porta son ancien propriétaire ».

Illustrations : toujours "superbes", "célèbres" ou au moins "curieuses".

Jamais ouvert/à l’état de neuf : indique en général un livre que personne n’a jamais eu envie d’ouvrir. N’oubliez pas de doubler le prix.

Noms manuscrits sur les faux-titres ou la page de titre : ce petit défaut peut être aisément changé en qualité en consultant google ou un dictionnaire biographique. Ainsi un « Bougremont » maladroitement calligraphié vous conduira à : de Bougremont, Jean (1649 – 1720) : écuyer du Connétable de Bourgogne et seigneur de Bougremont, célèbre pour sa collection de hiboux empaillés. A vous de rédiger votre notice : « charmant ouvrage ayant sans doute appartenu à Jean de Bougremont, célèbre aristocrate du 17ème siècle, ornithologue et grand cavalier. Rare provenance ».

Octavo : un format pratique quand vous n’êtes pas très sûr de vous.

Provenance : un élément clef. Il est toujours plaisant (et souvent profitable) de cataloguer un exemplaire La Bédoyère – Hoe – Adams, mais si votre ouvrage contient l’ex-libris d’un illustre inconnu comme le marquis de Bougremont, alors vous devez simplement écrire « exemplaire Bougremont ». Certaines personnes trouveront cela étrange mais vous serez surpris de voir combien cela fonctionne.

Rare : s’applique pour tout livre que vous croisez de temps en temps. Et n’oubliez pas de doubler le prix.

Recherché : s’applique pour tout livre rare. Et n’oubliez pas de tripler le prix.

Restauration : toujours « habile » et « ancienne »

Rousseurs : toujours "légères", voire "minimes".

Tranches peintes : elles sont toujours "superbes" et "exquises", même si c’est votre arrière grande tante Simone qui les a peintes un dimanche pluvieux.

Trou de ver : toujours "minuscules". Toujours dans les marges. Il est communément admis que les vers n’aiment ni l a lecture, ni l’encre.

Unique : un mot dangereux, mais qui sonne bien.

A vous de jouer!

H

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