jeudi 29 mai 2008

Ebayana et autres

Amis Bibliophiles Bonsoir,

C'est l'heure des chopins! Et pour ça trois solutions : hanter les salles des ventes et se jouer des coups bas des habitués, vous joindre à la douzaine de lecteurs du blog qui se promèneront dans les allées du marché Georges Brassens ce samedi, et partager vos trouvailles avec les autres lors du déjeuner qui suivra, ou bien encore chiner sur ebay. Voici d'ailleurs quelques opportunités intéressantes relevées par notre rédaction (qui ne comporte qu'une personne, vous le savez!).

Côté Livres Anciens :

Les Nuits Attiques chez Gryphe, 1555, dans une reliure intéressante

Ce rarissime ouvrage : le voyage d'un négrier, 1730... Cher!

Introduction à l'Ecriture Sainte, in4, bien illustré

L'Histoire des Diables de Loudun, un grand classique, 1716

Du Tillot La fête des Foux, 1751, dont j'ai déjà parlé sur le blog

Une sympathique édition du Roman Comique de Scarron, 1795

Le Berceau de la France, 2 volumes en maroquin vert, 1780

Côté Bibliophilie :

A ne pas manquer pour ceux qui ne l'ont pas encore :

Le Livre des Livres d'un certain Jean-Paul Fontaine, en achat immédiat!

Un imposant ensemble de catalogues (66) de la Librairie Coulet, pour les amateurs ...

Uzanne, Nos amis les Livres... tentant, non? Bertrand va-t-il emporter l'enchère?

L'Art du Livre à la Bibliothèque Nationale

Bibliophilie et connaissance du livre : Marius Audin, Le Livre

Les Ouvriers du Livre

Pour les bibliopégimanes et autres amateurs de relieure :

Un maroquin bleu, à la Gruel

Une étonnante reliure estampée du 17ème

N'hésitez pas à ajouter vos suggestions, les livres que vous avez repéré mais que vous ne convoitez qu'à moitié!

H

mardi 27 mai 2008

Miscellannées de Monsieur H.

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Je vois qu'il y a peu d'avis sur les reliures de nos amis. Je ne suis pas spécialiste mais concernant le dauphin de Bertrand, il ne me semble pas évident que cette dorure ait un lien avec le Dauphin, notamment parce que d'autres ont utilisé le dauphin comme emblème, et que comme nous l'avions déjà vu par ailleurs, une reliure portantdes fers "au soleil" n'a pas forcément été produite pour le Roi Soleil. Mais je me trompe sûrement. De manière générale, je suis toujours circonspect quant aux attributions de reliures, en tant que propriétaire, on a naturellement tendance à vouloir trouver à nos reliures des qualités qu'elles n'ont pas. J'espère me tromper sur ce cas précis.

Je vous propose ce soir quelques liens très attachants que vous connaissez peut-être. Trois blog essentiellement :

http://pierrepainblanc.blogspot.com/ : un autre blog sur la bibliophilie (ésotérisme). Les livres anciens (antérieurs au XIXe) ne sont pas majoritaires mais le scan des couvertures est souvent à l'échelle 1/1. On peut regretter que les textes se limitent souvent à une courte notice sur chaque ouvrage.

http://philobiblos.blogspot.com/ : pour ceux d'entre vous qui maitrisent la langue de Wayne Rooney. Un excellent blog, qui est un peu le cousin américain du blog du bibliophile.

http://bibliodyssey.blogspot.com/ : excellent blog, en anglais toujours, mais qui vaut le détour, ne serait-ce que pour la qualité et le nmbre impressionnant d'images.

Enfin, un site, celui de la Librairie le Feu Follet (http://www.edition-originale.com), très bien fait, et qui propose également un blog (http://www.edition-originale.com/actualites-librairie.php). Le blog vient de démarrer et proposera régulièrement les "miscellanées bibliophiliques d'un autre siècle recueilli par un amateur de contre temps". Le premier message est consacré à l'aimable Don Vicente, dont je vou avais déjà parlé sur le blog.

Juste avant de m'évanouir , j'ai rencontré ces très sympathiques libraires au Salon du Grand Palais, et je vous proposerai prochainement leur portrait.

H

lundi 26 mai 2008

Identification et reliures

Amis bibliophiles Bonsoir,

Raphael et Bertrand aimeraient profiter de vos lumières sur de très belles reliures, pouvons-nous les aider?

Raphael aimerait savoir si vous avez déjà rencontré et attribué ce monogramme ? Il figure sur des reliures signées Gruel en queue du dos, sur les ravissantes éditions bien connues d'Horace (1855) et de Virgile (1858) d'Ambroise Firmin-Didot, voir ci-dessous. Bertrand de son côté, vous soumet le problème suivant :

L’ouvrage est un ouvrage de diplomatique publié en 1731 à Paris chez Etienne Ganeau. C’est un beau in-12 relié en plein maroquin vieux rouge, les plats sont ornés d’une dentelle dorée aux petits fers dorés alternant fleurettes de deux sortes au dessus de petits cœurs encerclés. La curiosité de cette reliure réside dans le fait qu’on trouve aux quatre coins des plats des dauphins inscrits dans un ovale doré. Le dos de la reliure est orné aux petits fers dorés, plein et pointillé, on n’y retrouve pas de dauphin, ni aucun autre signe distinctif dans la décoration, qui ressemble aux autres décors des fines reliures de la même époque (années 1730-1740).
Ce décor revêt sans aucun doute une signification, mais laquelle ? Le Dauphin de France de cette époque est Louis de France, né en 1729 (et mort en 1765) père du futur Louis XVI.
Ce peut-il que ce livre ait été relié pour lui ? A quelle date ? A qui attribuer cette belle reliure à la dorure fort bien posée et au maroquin de très belle qualité ?
Je vous laisse juger de tout ceci et nous faire partager vos découvertes et interrogations. Par avance, merci.

H

vendredi 23 mai 2008

Marat, Physicien contrarié et ses livres

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Je vous propose ce soir de découvrir Jean-Paul Marat, à travers ce portrait pour bibliophiles écrit spécialement pour le blog par l'ami Bernard

Jean-Paul Marat (1743-1793), journaliste révolutionnaire, député Montagnard à la Convention, dirigeant du club des Jacobins de Paris est bien connu. On sait moins qu’il a effectué de nombreux travaux scientifiques, et que le rejet de l’Académie des Sciences a amplifié sa haine des institutions. Marat serait-il devenu ce qu’il a été si les portes de l’Académie des Sciences lui avaient été ouvertes en 1780 ?

Marat entreprend, en autodidacte, des études médicales à Paris entre 1762 et 1765. Il part alors exercer la médecine à Londres. En 1775, il est reçu docteur en médecine à l’université de Saint-Andrew, en Écosse et rentre à Paris en 1776. On compte au nombre de ses « malades d'un rang distingué, abandonnés des médecins », la marquise de l'Aubespine, nièce du duc de Choiseul, ministre de Louis XV. Il a bientôt une nombreuse et riche clientèle, grâce à la marquise chez laquelle il loge. En 1777, il obtient le brevet de médecin des gardes du corps du comte d'Artois, frère de Louis XVI.

En 1778 il débute des recherches sur le feu, l’électricité et la lumière. Quelques académiciens assistent à certaines expériences. Benjamin Franklin participe même à une séance.
En décembre 1778, Jean Paul Marat soumet à l’approbation de l’Académie, son premier mémoire, les Découvertes sur le feu, l’électricité et la lumière. Cette approbation attendue lui est refusée le 10 mai 1780. Marat décide de passer outre et publie en 1780 ses Recherches physiques sur le feu et ses Découvertes sur la lumière.
Ceci constitue une déclaration de guerre à l’Académie des Sciences, en particulier à Condorcet et Lavoisier qu’il n’évoque même pas dans ses recherches sur le feu. Marat se targue d’avoir réussi à rendre visible l’élément du feu, construit une théorie du « fluide igné » et tente une explication mécanique du phénomène de la chaleur. Une annonce erronée, peut-être inspirée par Marat, parait dans le Journal de Paris faisant état d’une approbation de l’ouvrage par l’Académie des Sciences. Lavoisier fait une mise au point assez dédaigneuse en juin 1780. Ce démenti blesse l’orgueil de Marat et renforce sa haine et son mépris pour les institutions académiques.

En 1782, Marat publie ses Recherches physiques sur l'électricité.
Marat s’intéressait particulièrement à l’électrothérapie. Comme dans ses autres ouvrages, il attaque ici les théories alors admises et décrit 214 expériences à l’appui des siennes. Il attribue tous les phénomènes électriques à un fluide en mouvement, formé de globules en attraction mutuelle. Pour lui les fluides électrique et magnétique n’ont rien en commun. Il attaque vigoureusement Newton, Franklin et autres théoriciens reconnus.

En 1784 il publie un Mémoire sur l'électricité médicale qui est couronné le 6 août 1783 par l'Académie Royale des Sciences, de Rouen.

Après 1784, les ennuis s’accumulent, ses démêlés avec l’académie lui ferment les portes des savants. Charles III d’Espagne désirant créer à Madrid une Académie des Sciences, Marat envisage le poste de secrétaire perpétuel. Dans une lettre du 20 novembre 1783 qu’il adresse à Roume de Saint-Laurent, il étale ses mérites : « Jusqu’à moi tout ce qui avait paru sur l’électricité se réduisait à un ramas d’expériences isolées, compliquées, rentrant les unes dans les autres et éparses dans cinq cents volumes. Il s’agissait de tirer la science de cet affreux chaos. Je me renferme dans ma chambre obscure, j’ai recours à ma méthode d’observer, je rend visible le fluide électrique, je le compare au fluide du feu et au fluide de la lumière avec lesquels on l’a confondu … tout devient intuitif, la science se forme. Et voilà mis à jour le seul ouvrage méthodique, la seule théorie connue sur l’électricité. » Malgré tous ses « mérites », Marat n’est pas retenu. Il perd également sa charge de médecin des gardes du corps du comte d’Artois et finit par vivre d’expédients.

En 1787, il publie Optique de Newton, traduction nouvelle, faite par M.... sur la dernière édition originale...
L’ouvrage est dédié au roi par l’éditeur Beauzée, « l'un des quarante de l'Académie française ». On a nié que cette traduction fût de Marat ; la note insérée par celui-ci en janvier 1793 au bas d'un des numéros de son Journal ne permet plus le moindre doute. « Je fus obligé de prendre un prête-nom pour signer mes ouvrages ; c'est ce que j'ai fait en 1785 à l'égard d'une traduction de l'optique de Newton. » (Journal de la République, N° 98.)

En 1788, il publie des Mémoires Académiques ou nouvelles découvertes sur la lumière, relatives aux points les plus importants de l'optique.
Marat a toujours une très grande estime de ses travaux : « Les découvertes que je présente au public, … ne tendent pas moins qu’à faire changer de face à l’optique ». Marat pense démonter les erreurs de Newton sur la lumière : par exemple pour lui les couleurs élémentaires ne sont pas au nombre de sept, mais de trois, le rouge, le bleu et le jaune.

Malade au point de rédiger son testament, Marat « ressuscite » le 1er mai 1789, à la convocation des Etats Généraux. Il écrit en 1793 : « … cette nouvelle fit sur moi une vive sensation, j'éprouvai une crise salutaire, mon courage se ranima, et le premier usage que j'en fis fut de donner à mes concitoyens un témoignage de mon dévouement ; je composai l'Offrande à la Patrie ». Dès lors Marat se jette corps et âme dans la Révolution et entame la lutte contre le pouvoir et les académiciens : « vers l’époque de la révolution, excédé des persécutions que j’éprouvais depuis si longtemps de la part de l’académie des sciences, j’embrassai avec ardeur l’occasion qui se présentait de repousser mes oppresseurs et de me mettre à ma place ». Dans l’ami du peuple du 27 janvier 1791, Marat écrit : « je vous dénonce le coryphée des charlatans, le sieur Lavoisier, fils d’un grippe-sou, apprenti chimiste… ». Condorcet est appelé le faquin littéraire, Cadet le torche-cul des douairières …

Epilogue : Marat est assassiné par Charlotte Corday le 13 juillet 1793. Le 8 août 1793 la convention vote la suppression des Académies. Lavoisier est guillotiné le 8 mai 1794 …

Merci Bernard

H

mercredi 21 mai 2008

Portrait de Bibliophile : Il était une fois un bibliophile qui...

Amis Bibliophiles bonsoir,

Je vous propose ce soir de découvrir le portrait d'un bibliophile, fidèle du blog, fidèle entre les fidèles, même.
Bonjour, Pourriez-vous nous parler un peu de vous et de votre bibliothèque?

J’ai 37 ans, je suis père de famille de deux (bientôt trois) petites filles, provincial d’origine, j’habite en région parisienne depuis la fin de mes études. Je suis cadre supérieur dans un grand groupe français, dans lequel j’occupe un poste à dominante marketing.
Une de mes bibliothèques de biblipégimane accompli.

Ma bibliothèque n’est malheureusement pas regroupée dans une seule pièce mais elle couvre quelques longs mètres de murs dans mon appartement, sans compter les livres qui sont posés un peu partout, sur les tables, les bureaux, dans les commodes, bref à leur place, mais pas seulement… Mon épouse est heureusement compréhensive et tolère avec humour cet envahissement progressif. La cadette de mes filles n’a que 4 ans et est passionnée par les livres, qu’ils soient modernes ou anciens. Après avoir dépecé une édition courante des Fables de La Fontaine du 19ème à l’âge de 3 ans (il faut bien apprendre), elle est aujourd’hui beaucoup plus respectueuse des livres et le croiriez-vous, elle est tout à fait capable de distinguer le veau du maroquin; à condition que celui-ci soit rouge, il est vrai, mais je ne crois pas avoir connu la nuance avant l’âge de 22 ans en ce qui me concerne. Il est amusant de constater que lorsque je lui demande ce qu’elle voudra faire plus tard (et oui, tous les parents sont les mêmes), en espérant qu’elle me réponde astronaute ou artiste, elle me répond invariablement « vendre des livres anciens », ou « changer la litière des chats »… Il ne me reste plus qu’à espérer qu’elle penchera du bon côté.

Pour revenir à ma bibliothèque, elle est à mon image : protéiforme et changeante, éclectique et exigeante. Vous y trouverez des ouvrages de voyages, de la littérature, des curiosités, un peu de militaria et une bonne pincée d’occultisme, mais ceci n’est pas restrictif et je fonctionne au coup de cœur. Au moment où je vois un livre et où je le prends en main, je sais en général immédiatement si j’en ai envie, la question suivante étant « est-ce raisonnable ou pas (oui, j’ai une famille à nourrir !) ? ». J’ai malgré tout quelques domaines spécifiques : les textes curieux (je lis en général les ouvrages que j’achète, ou je les feuillette, souvent par manque de temps, en attendant d’en avoir plus), les ouvrages joliment illustrés et les reliures de Lortic sur des ouvrages anciens. Pourquoi Lortic ? Je ne sais pas, mais je caresse souvent l’espoir insensé de rassembler une bibliothèque entière avec ses reliures.

Quelques reliures de Lortic


Il est vrai que je suis bibliopégimane, j’aime la reliure, pardonnez-moi mon père. En passant je trouve d'ailleurs regrettable le léger mépris qu’ont souvent les bibliophiles pour les bibliopégimanes, après tout, on peut être les deux. Comme le dirait un délicieux personnage que j’ai croisé cette semaine : « la reliure est au service du livre, et le livre au service du texte ».

A bien y réfléchir, le seul critère évident de ma bibliothèque est la période qui m’intéresse : en général, je n’acquiers aucun livre postérieur au 18ème siècle. Pour autant, je n’ai pas d’incunable, parce que les seuls qui pourraient m’intéresser sont inabordables financièrement. Je ne suis pas dans une logique où je veux posséder un incunable uniquement pour en avoir un.

Autre chose importante, à seulement 37 ans, j’ai l’impression d’avoir déjà eu plusieurs bibliothèques. En effet, d’une part, j’ai changé d’orientation il y a quelques années, et d’autre part, et surtout, je suis un fervent partisan des entrées et sorties au service de l’amélioration. Ainsi, si certains ouvrages qui sont aujourd’hui dans ma bibliothèque sont là « pour toujours », d’autres entrent et sortent au gré des améliorations possibles et des besoins financiers pour acquérir d’autres ouvrages. Je déteste avoir plusieurs exemplaires d’un même ouvrage, même si cela arrive, j’ai trop d’amour à donner ! Au final, en y songeant, c'est l'émotion que je recherche, chaque livre m'envoie des ondes particulières, je connais chacun d'entre eux. Ce sont des choses que seuls d'autres bibliophiles peuvent comprendre.

Depuis quand la passion de la bibliophilie s'est-elle emparée de vous?

J’ai toujours été passionné par les livres. Lecteur insatiable, je lis aussi bien des ouvrages modernes que des ouvrages anciens, et en général deux ou trois à la fois. C’est par la lecture que je suis venu à la bibliophilie. En effet, alors que mes études m’ont laissé peu de temps pour m’intéresser aux livres, pour le plaisir en tout cas, mon service militaire dans la Royale m’a offert cette occasion. Officier sur un bateau gris, j’avais pris l’habitude de me rendre chez un libraire brestois avant chaque embarquement, pour acquérir un grand texte dans une belle édition 19ème, qui me servirait de compagnon en mer. Ce type de navigation est en effet très propice à la lecture. C’est ainsi que petit à petit je me suis constitué une bibliothèque dont je me suis ensuite séparé pour m’orienter vers des ouvrages plus anciens.

Depuis, cette passion dévorante, omniprésente, ne m’a jamais quitté. Je vis en pensant aux livres, et je rêve même souvent d’en vivre. Rapidement, chercher, acheter, lire et chérir les livres ne m’a plus suffit et j’ai essayé d’aller plus loin : cours du Gippe à la Maison de la Bibliophilie, heures passées dans le froid à discuter avec un libraire du marché Georges Brassens, interminables week-ends de chine, etc... jusqu’à ce que je sente seul et que je me décide à essayer de créer un lien entre les bibliophiles.

Quels sont vos domaines de prédilection, ou votre approche est-elle éclectique et vous fonctionnez au coup de coeur?

Comme je l’ai dit plus haut, je suis éclectique et tout en ayant quelques obsessions, je fonctionne au coup de cœur. Je vis la bibliophilie comme une passion, sans volonté sourgetiste de valoriser ma bibliothèque, c’est sans doute aussi pour cela que je n’ai pas comme objectif de créer un ensemble cohérent.

Ce qui est capital pour moi c’est surtout la qualité des ouvrages : que le texte soit bon, c’est une affaire de goût, mais je rejette systématiquement les livres incomplets, les dépareillés, et les reliures abîmées. Si je ne devais donner qu’un seul conseil à un jeune bibliophile, en toute modestie, ce serait celui-là : évitez cet écueil sur lequel la plupart d’entre nous ont déjà naufragé, achetez peu, mais achetez mieux, écartez tous les livres à défauts, ces livres « à problèmes » deviennent rapidement des poids morts que l’on traîne comme des boulets et que l'on finira par remplacer ou doubler.

Où achetez vous vos livres.? Internet, salons, libraires?

Vous me verrez partout ou presque où l’on trouve des livres : sur les salons, dans les salles des ventes, dans les brocantes et autres vide-greniers au petit matin (l’espoir fait vivre), au marché Brassens (plus pour l’ambiance que pour les livres désormais), sur ebay, sur les sites généralistes de type abebooks, même dans des dîners de bibliophiles, mais c’est vrai, de moins en moins chez les libraires… sauf en province, parce qu’ils sont plus sympas !

Quel est le ou les livres qui vous font rêver? Et les livres que vous possédez déjà et qui vous sont particulièrement chers?

De manière générale, je rêve devant des éditions anciennes, en français, bien reliées, même si la reliure n’est pas d’époque, tant qu’elle est parfaitement exécutée. Il n’est pas de livre qui me fasse spécifiquement rêver, ou alors il y en a trop!

Le Songe de Poliphile

En ce qui concerne les livres que je possède déjà et qui me sont chers : et bien tous, mais la réponse est trop aisée, il vous en faut plus, alors allons y : avant tout j’ai une faiblesse pour le premier livre ancien que j’ai acheté (30 francs), une édition 18ème de Racine en format Cazin, viennent ensuite un Songe de Poliphile, une folie que je me suis un jour offerte, une Histoire des Larrons en maroquin rouge, un Licetus et les Contes et Nouvelles en vers de La Fontaine, tout deux reliés par Vermorel, l’un en vélin doublé de maroquin, l’autre en maroquin bleu, et puis il y a aussi…. Il y en a trop, je ne saurais choisir.

Vous savez que les lecteurs du blog aiment les histoires, auriez-vous une anecdote à nous raconter, sur une trouvaille, un livre, autre chose qui touche à la bibliophilie?

J’en aurais beaucoup, histoires de chopins, histoires de dépareillés réconciliés, histoires de négociations déraisonnables de ma part, histoires de salles des ventes, etc. Je me contenterai d’une seule : il était une fois un bibliophile qui aimait tellement les livres qu’il ne pouvait se résoudre à vivre cette passion seul. Il lui fallait la partager. Après avoir cherché sans succès dans son entourage il finît par se résoudre à aller courir le monde pour aller à la rencontre de ses pairs. Il aurait pu délaisser ses livres et mettre un sac sur son dos, il a choisi de rester auprès d’eux, et il a ouvert un blog. Mais quel nom lui donner ? Tout simplement « Le Blog du Bibliophile ». Et puis voilà…

Enfin, vous êtes un visiteur fidèle du blog... qu'en attendez-vous?

Il fait partie de moi aujourd’hui, même s’il est parfois difficile de poster un message par jour. Je voudrais en fait qu’il continue de vivre, tout simplement, parfois sans moi, et je remercie profondément ceux d’entre vous qui m’offrent des respirations en m’envoyant leurs messages à publier.

Enfin, finalement, il est devenu un point de rencontre virtuel incontournable entre bibliophiles, j’aimerais maintenant que ces rencontres se prolongent dans le monde réel, comme cela a déjà été le cas plusieurs fois. Ces instants passés avec certains d’entre vous lors de dîners et de déjeuners ont été pour moi un aboutissement, la raison pour laquelle j’ai un jour créé ce blog. Rien ne me fait plus plaisir que lorsque l’un d’entre vous décide de sauter le pas et de nous rejoindre. J’ai d’autres projets autour du livre, d’autres idées pour renforcer cette petite communautés, je vous en parlerai un jour prochain !
Au fait, aujourd’hui, vous venez de lire le 500ème message publié sur le blog…

H

mardi 20 mai 2008

Liens et autres

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Inexplicable afflux de bibliophiles hier soir, avec 250 visiteurs différents en une seule journée... et je ne parviens pas à l'expliquer. Auriez-vous une idée?

En attendant, je reçois régulièrement des demandes d'échanges de bannières, dont hier une de la part d'abebooks, qui a la particularité de me proposer un échange unilatéral : je mets une bannière abebooks sur le blog, et en échange, ils me disent merci. Pas très intéressant.

En revanche, pour les liens, c'est toujours la même logique :
1. Si vous avez un site et que vous participez au blog, je serais heureux d'en parler.
2. Si vous voulez me signaler un site qui présente un intérêt bibliophilique, je serais également heureux d'en parler.

En passant, j'en profite pour signaler le site officiel de l'Affaire Corneille-Molière, pour laquelle on semble encore "s'entretuer" en France (sourire), mais qui est très intéressant : http://www.corneille-moliere.org/index.html

Je vous résumerais bien l'affaire, mais rien que d'y songer, je suis épuisé. Ce qu'il nous faudrait c'est un résumé de Jean-Paul Fontaine. Mais l'affaire est sérieuse, n'en doutons pas!

Je me permets aussi de vous signaler quelques petits lots, découverts aujourd'hui :

Mémoires de Bussy-Rabutin, 3 volumes, 1712

La Nef des Fous

Un Cazin, et mon Dieu, j'ai bien l'impression que c'est un vrai! Rare en plus!

Un bel Alciat... Emblemata.

Bonne soirée, (ce blog me tuera)

H

lundi 19 mai 2008

Assurer ses Livres Anciens?

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Emmanuel, un fidèle lecteur du blog m'a envoyé un email pour me faire part d'une bien triste nouvelle, celle d'un bibliophile qui a vu sa bibliothèque partir en fumée.

Évidemment, il est impossible de trouver un quelconque aspect positif à cette catastrophe, mais on peut néanmoins en tirer une leçon : il faut assurer et assurer convenablement ses livres, à partir d'un certain montant global.

En effet, il serait une erreur de croire que votre bibliothèque est assurée dans le cadre de l'assurance de votre habitation. En effet, sans disposition particulière, en cas de sinistre, votre bibliothèque sera évaluée en fonction d'un pourcentage du capital mobilier. Exemple : il y a un capital mobilier de X dont Y d'objets de valeur ( médailles, alliances..) Mais, attention, cette part Y est souvent calculée sur la base d'un pourcentage de X. Ce qui au final donne 100 000€ dont 5000€ d'objets de valeur par exemple, ces 5000 euros étant supposés compenser la perte de votre bibliothèque. On le voit, la prime est sans commune mesure avec la valeur.

En fait, au même titre que pour l'ISF, les livres rares et anciens, sont considérés comme des "œuvres d'art" du point de vue de l'assurance. Il faut donc faire mentionner les bibliothèques dans les polices spécifiques, et pour cela procéder auparavant à une estimation et un "catalogage" des livres que vous possédez...

A vous de voir, j'avoue que je ne l'ai pas fait, dès que je croise un assureur, j'ai l'impression qu'il va me voler mon portefeuille, mais peut-être devrais-je y songer, et vous?

H

dimanche 18 mai 2008

L'Album extraordinaire, Honoré Daumier et ses "amis"...

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Puisque nous parlons chine et heureuses découvertes, c'est le moment idéal de laisser la parole à Bertrand, qui va vous présenter un album extraordinaire illustré par Daumier et d'autres...

Oh ! . un faisan ! Lithographie d'Honoré Daumier, coloriée et gommée à l'époque d'après les coloris d'Edouard Bouvenne.

Le hasard est sans aucun doute l'un des plus volages alliés du bibliophile. La persévérance lui tenant toujours la main de très près. Le bibliophile est donc le plus souvent amené à composer avec ce que beaucoup appelleront le destin, d'autres, la providence.

Un paiement de dividende. Epreuve lithographique avant le titre et la légende par Honoré Daumier, état très rare (Cf. Daumier Register), pierre numérotée 750.

Au fond d'un carton, un volume plus grand que les autres. relié. Je sors ce volume de grande taille du carton, il avait pour seul titre doré au dos « ALBUM » en lettres grasses. La reliure en demi-chagrin rouge, avec faux-nerfs plats réhaussés de dorures, filets, palettes dorées en tête et en queue, faisaient inévitablement penser à une reliure des années 1840 et gardait encore fière allure. La reliure frottée se tient encore bien. Les plats sont en papier moiré rouge.

Mention manuscrite « Bon à tirer » signée Gavarni dans le coin supérieur gauche d'une lithographie. (elle est signée trois fois ainsi).

Restait à regarder à l'intérieur.

L'ouvrage s'ouvre sur une belle lithographie signée Bouchot, puis une autre signée Ch. Vernier, puis encore une autre signée cette fois des initiales H.D. (Honoré Daumier)., puis Gavarni, puis Edouard de Beaumont, Lorentz, Grandville, Cham. Le tout étant dès le premier coup d'oil fort charmant. Lithographie de Cham avec de nombreuses annotations manuscrites, notamment un « Pour le Charivari si la censure le laisse passer »

Plusieurs dizaines de lithographies, en noir, mais aussi en couleurs. Intéressant. Il s'agit en fait d'un recueil de lithographies originales la plupart annotées à la plume et légendées à la main sur étiquettes volantes collées au bas des épreuves. On y retrouve de nombreux artistes qui ont à la fois collaborés au Charivari et à La Caricature (les deux principaux journaux satiriques de l'époque - 1840).

Victor Hugo au balcon de l'opéra et sa grosse tête. Annotations manuscrites à gauche. Lithographie de Moynet.

Cet album contient en outre plusieurs « bon à tirer » signés des artistes (Gavarni, Lorentz, .). On y trouve également des épreuves dont il est précisé qu'elles doivent « passer la censure » (voir photos). Les états avant la légende, avant le titre ou même avant toutes lettres tirées sur blanc, sont nombreux. Certaines lithographies, bien qu'elles aient été reliées au format déplié in-folio, ont été visiblement envoyées par la Poste pliées en 8. Après quelques recherches au verso des lithographies, j'ai pu retrouver le destinataire d'une lithographie, clairement identifié : Monsieur Boiste 40 rue Laffitte, puis un autre : Monsieur Goulet au Charivari.

Lithographie d'Honoré Daumier, coloriée et gommée à l'époque d'après les coloris d'Edouard Bouvenne.

Au début, je n'avais guère conscience de l'importance de cet ensemble. Il s'agissait là d'un album vraiment extraordinaire, au sens le plus littéral du terme. Un tel ensemble d'épreuves lithographiques corrigées est forcément rare. J'en ai été définitivement convaincu lorsque j'ai pu lire le catalogue de l'exposition consacrée à Honoré Daumier en ce début d'année 2008 (BNF, Paris). De telles épreuves sont de véritables pièces de musée qui, uniques, permettent le plus souvent de retracer avec précision l'itinéraire « imprimé » de ces lithographies, des variantes de dessin aux affres de la censure de l'époque.

Lithographie que je n'ai pas encore réussi à attribuer à un artiste. Peut-être Daumier ? Si la damoiselle de droite vous dit quelque chose ne vous inquiétez pas, c'est normal !

Voici un aperçu de quelques légendes, toujours inscrites à la plume, de la main de l'artiste même ou d'un collaborateur du Charivari, le plus souvent signées.

- La planche 43 de la série « Les débardeurs » par Gavarni est signée deux fois dans la planche « Bon à tirer. Gavarni », avec en plus quelques corrections dans l'adresse en bas de la lithographie.
- Pour une planche intitulée « L'ambassade chinoise » signée Cham, on peut lire en marge de sa main : « Pour le Charivari si la censure le laisse passer », les légendes (2 versions différentes), sont également manuscrites.


- Sur une planche intitulée (en manuscrit) « Les petits bonheurs de l'équitation » signée Al. Lorentz, on lit de la main d'un collaborateur du Charivari vraisemblablement : « On ira vous demander cette lettre demain matin ainsi que des pierres si vous en avez de faites. Pressez les choses. Votre dévoué (illisible). Cette lithographie a été envoyée pliée en 4 à l'artiste Alphonse Lorentz, avec son adresse au dos.

- Sur la très connue caricature représentant Victor Hugo, avec une grosse tête, au balcon de l'opéra (signée Moynet), on lit, écrit à la plume sur le côté : « Veuillez faire prendre demain à midi la pierre chez M. Gaut. 2. Envoyez-en une ou deux (épreuves ??) chez M. Moynet ; 3. Envoyez-en une ou deux (épreuves ??) chez M. de Beaumont, 35 rue des martyrs. Signé illisible et plus loin « Charivari ».

- Sur une autre on lit, écrit à la plume : « à tirer de suite avant dépôt » ( ?? - je ne sais pas comment il faut entendre cette remarque ??).

- Encore sur une planche signée Lorentz on lit : « Tirer de suite ces pierres en 1/4 . attendre des ordres pour le Charivari. » et à côté : « Je n'ai reçu ce soir ni les bons à tirer de l'Histoire ancienne, ni les essais de la caricature (épreuves collées) veuillez m'envoyer tout cela demain matin chez moi avant 10h ; je vous retournerai les bons à tirer par le porteur. (illisible) Gavarni (ce petit mot final non identifié est adressé à Gavarni).

Lithographie d'Edouard de Beaumont, légendée et titrée à la plume. Traces de pliures en quatre.
Cette lithographie a voyagé par la poste ainsi.

Les artistes présents dans cet album sont Frédéric Bouchot, Charles Vernier, Clément Pruche, Honoré Daumier, Edouard de Beaumont, Paul Gavarni, Jean-Pierre Moynet, Cham, Alcide Joseph Lorentz, et Grandville.

Je vous laisse découvrir maintenant quelques images de cet album. Cet album rejoindra dans quelque temps une collection publique, je ne sais pas encore laquelle (j'hésite entre le Musée de la lithographie ou le Musée Daumier ??).

Première leçon de chasse. Lithographie par Edouard de Beaumont légendée à la plume.

Soyons reconnaissant à ce collaborateur du Charivari d'avoir eu la présence d'esprit de rassembler sous une reliure solide qui a su traverser les ans afin de nous transmettre ces précieux documents iconographiques.

Lithographie de Al. Lorentz légendée à la main avec de nombreuses annotations et quelques lignes d'un collaborateur du Charivari (voir ci-dessous).

Références :

- A propos de Daumier, la référence sur le net est The Daumier Register : http://www.daumier-register.org/login.php qui a servi à l'établissement de l'exposition Daumier de la BNF (actuellement présentée à la BNF site Richelieu et visible en ligne à l'adresse http://expositions.bnf.fr/daumier/infos/01.htm). Attention ! Visible jusqu'au 8 juin seulement !

Adresse de M. Lorentz, lithographe. Au dos d'une lithographie pliée en huit.

Lithographie d'Honoré Daumier, coloriée et gommée à l'époque d'après les coloris d'Edouard Bouvenne.

Lithographie d'Honoré Daumier, coloriée et gommée à l'époque d'après les coloris d'Edouard Bouvenne.

Modifications de la lithographie originale à la plume.

Lithographie d'Honoré Daumier, coloriée et gommée à l'époque d'après les coloris d'Edouard Bouvenne. Mention manuscrite : « A tirer de suite avant dépôt ».

Merci beaucoup Bertrand,

H

samedi 17 mai 2008

Ebayana et autres ventes....

Amis Bibliophiles Bonsoir,

C'est la saison des brocantes, si tant est que le bibliophile puisse vraiment y trouver son bonheur, mais il y a aussi de belles ventes à venir, et le fourre-tout permanent qu'est ebay permet également de faire quelques emplettes si vous vous sentez "en manque"...

Parmi les nombreuses ventes à venir, on notera la vente Alde à Paris, le 3 juin, qui proposera de nombreux livres illustrés du début du 20ème siècle reliés par Henri Creuzevault. Pour voir le catalogue : http://www.alde.fr/FR/vente_livres_autographes/v11563_alde/index.html

A noter également une belle vente d'ancien à Lyon, le 4 juin, dont vous pouvez voir le catalogue en cliquant ici : http://www.bibliorare.com/cat-vent_lyon4-06-08-cat.pdf

Côté ebay:

La Maison Rustique, un grand classique

Le Roman Comique de Paul Scarron, 1781

Un symathique manuscrit

Les états barbaresques, que je convoite, mais ça va être difficile...

Côté Reliure :

Boileau, le Traité du Sublime, 17ème, maroquin rouge

Une reliure à la Du Seuil

Une reliure aux armes peintes

Un joli petit almanach, qui possède encore son crayon

Aphrodite de Pierre Louÿs, dans un maroquin de Creuzevault

L'île des rêves, dans un maroquin vert de Simier

Les connaissances nécessaires à un bibliophile, de Rouveyre

Sur les livres et la bibliophilie :

Code de la Bibliophilie Moderne, de Robert

L'amour des Livres de Janin, en achat immédiat à seulement 12 euros

La revue Le Bibliophile, malheureusement pas Rémois...

Bonne chine,

H

Molière, vélin, édition?

Amis Bibliophiles Bonjour,

Vous l'avez remarqué, avec mes nouvelles obligations professionnelles, il ne m'est pas toujours facile de poster un message tous les soirs. Mais je m'accroche! Je posterai un message ce soir, mais en voici déjà un à mi-journée pour me faire pardonner de mon incurie d'hier soir!
Je partage avec vous cet achat effectué il y a peu sur ebay (100€, je suis transparent) : quelques pièces de Molière reliées ensemble dans un petit volume in-12 en plein vélin. Je ne connais pas bien les éditions de Molière et je voulais avoir votre avis à deux niveaux :
1. Bon achat, bonne édition? A priori je penche pour une contrefaçon hollandaise. Qu'en pensez-vous? 2. Sauriez-vous comment on peut nettoyer un vélin de ce type un peu souillé? Voilà! Merci à vous.

Au fait, connaissez-vous ce dernier texte?

H

jeudi 15 mai 2008

Marché de la Bibliophilie à Saint-Sulpice

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Le Salon du Grand Palais est à peine derrière nous que déjà une nouvelle très belle manifestation se profile avec le 14ème Marché de la Bibliophilie qui se tiendra du 25 au 30 juin 2008, place Saint-Sulpice, à Paris. Ce marché n'est pas organisé par le SLAM, mais par le GIPPE. On y passe toujours un très bon moment.

Je connais bien ce marché, il est intéressant parce que les prix sont moins soutenus qu'au Grand Palais et parce que cette fois-ci, on y trouve vraiment des livres à tous les prix. Ce qui est également sympathique, c'est que de nombreux libraires de province viennent y proposer leurs ouvrages.

Je vous en reparlerai, mais je prends les devants pour vous inviter à un nouveau déjeuner des bibliophiles, le samedi 28 juin 2008. Comme d'habitude, pour être invité, il suffit de s'inviter. Comme d'habitude, détente, simplicité et bonne humeur sont de rigueur.

Si vous êtes intéressés, vous pouvez me contactez à : blog.bibliophile@gmail.com

H

mercredi 14 mai 2008

Miscellannées de Monsieur H.

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Quelques remarques en tous genres :

- Magazine du Bibliophile : je viens de recevoir le n°73, mai 2008. A part la couverture, qui ne donne vraiment pas envie, ce numéro est un peu bibliophile que d'habitude. Les habitués du blog retrouveront avec plaisir deux excellents articles de Jean-Paul et de Nicolas, respectivement sur la mythique vente de Roxburgh, et sur les ouvrages sur l'Afrique au 18ème. Deux bons articles. On notera également un assez long article sur l'étude d'investissement de la librairie Sourget. Pas de surprise : l'auteur y déconseille l'achat en salles, au profit de l'achat en librairie. Je me contenterais de reprendre la conclusion de Monsieur Sourget: "Les performances exceptionnelles et durables attachées aux beaux livres analysées dans cette étude, couplées à une stratégie gagnante, vous feront regretter de ne pas avoir acquis davantage de livres rares et précieux et les résultats dépasseront vos attentes." C'est beau comme du Marc Lévy... ou du Michael Milken, au choix. Il n'en est pas moins que ce numéro du Magazine est meilleur.
- Un jeune libraire bourguignon aimerait vous mettre à contribution sur le sujet suivant : il cherche à en savoir plus sur l'ancien possesseur d'un ouvrage relié en maroquin rouge du milieu du XIXè s. (reliure fine dans le style de Duru, mais non signée), il s'agit d'un volume grand in-12 avec un ex libris gravé de l'époque de la reliure (voir la photographie ci-dessus). Il n'a rien trouvé sur ce K. Marr-Johnson ?? Probablement britannique, le volume, imprimé en français vient d'outre-manche. Cet amateur aimait-il la gauloiserie ? le coq de son ex libris et le titre de l'ouvrage en question le laissent à penser. Auriez-vous une idée?

- Un jeune bibliophile, de son côté, cherche le tome 2 du Menagiana, paru en 1695, à un prix acceptable. Si vous pouvez faire son bonheur, contactez-moi, je relaierais votre offre.

H

mardi 13 mai 2008

Voltaire : la Physique à Cirey

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Les amateurs de livres scientifiques vont se régaler puisque ce soir, je laisse les commandes à l'excellent Bernard, qui va vous parler de Voltaire dans un très beau message.

On connaît bien Voltaire philosophe, poète et historien. On sait moins qu’il a consacré quelques années de sa vie à l’étude de la physique. Il a été, avec Maupertuis, l’un des premiers diffuseur des idées de Newton en France au XVIIIème siècle.
Médaillon représentant Voltaire et son « ennemi intime » Rousseau, morts tous deux en 1778.

François Marie Arouet, dit Voltaire (1694-1778), séjourne en Angleterre de 1726 à 1728. En 1733, il fait paraître ses Letters concerning the English Nation dont la traduction française augmentée paraît en 1734 sous le titre de Lettres philosophiques.
Lettres philosophiques
Lettre sur Descartes et Newton

Admiratif de Newton, Voltaire y écrit : « Un Français qui arrive à Londres trouve les choses bien changées en philosophie comme dans tout le reste. Il a laissé le monde plein, il le trouve vide. A Paris, on voit l’univers composé de tourbillons de matière subtile ; à Londres, on ne voit rien de cela. Chez nous c’est la pression de la lune qui cause le flux de la mer ; chez les Anglais, c’est la mer qui gravite vers la lune ».


C’est dans cet ouvrage que Voltaire rapporte l’anecdote de la pomme. Il écrit dans la lettre XV: « Reconnaître une identité de nature entre la force qui fait tomber les corps et la force qui maintient la Lune en orbite, c'est, nul n'en doutera, faire avancer la solution du problème. Mais ce n'est pas une explication. Pourquoi les corps et la Lune tombent-ils sur la Terre? D'où provient cette attraction qu'exerce à distance la Terre ? » ; A cela, Newton n'apportait pas de réponse : « Je ne me sers du mot d'attraction que pour exprimer un effet que j'ai découvert dans la nature, effet certain et indiscutable d'un principe inconnu, qualité inhérente dans la matière dont de plus habiles que moi trouveront, s'ils le peuvent, la cause »

Cet ouvrage est immédiatement interdit à cause des attaques qu' il contient contre le clergé et le pouvoir. L'auteur prend la fuite et se réfugie en Champagne, au château de Cirey, chez sa maîtresse, Gabrielle Émilie le Tonnelier de Breteuil, marquise du Châtelet (1706-1749). Dans cette retraite, où il reste de 1735 à 1740, il étudie la physique, en compagnie de son amie et y installe un laboratoire,

Un ami de Voltaire, le comte Francesco Algarotti (1712-1764), qui s’intéresse aux travaux de Newton, est invité au château de Cirey à la fin de 1735. Il y reste six semaines et travaille à un ouvrage, le Neutonianismo per le dame qui paraît en italien en 1737. La traduction française paraît l’année suivante.

Newtonianisme pour les Dames

Algarotti imite les Entretiens sur la pluralité des mondes de Fontenelle qui initient une marquise aux beautés de la physique. Le discours est très souvent futile ; par exemple, pour illustrer la loi de Newton : « J’ai quelque tentation de croire que dans l’amour on suit cette loi des carrés à l’égard des lieux ou plutôt à l’égard des temps : ainsi après huit jours d’absence, la tendresse devient soixante-quatre fois moindre qu’elle ne l’était le premier jour.»
On connaît deux tirages de la traduction française. Dans le premier, Castera donne des objections personnelles au système newtonien ; ces objections sont supprimées dans le second ce qui fait que la page XV est également chiffrée XXXIV.
Tirage avec les commentaires de Castera
Tirage sans les commentaires.

Cet ouvrage provoque la brouille entre Algarotti et ses hôtes. En décembre 1738, la marquise du Châtelet écrit à Maupertuis : « Le Newtonianisme pour les dames est traduit. Je ne sais si vous aurez la patience de le lire dans l’impertinente traduction de Castera. Je ne sais comment M. Algarotti s’en trouve. Il méritait bien, après avoir dédié son livre à l’ennemi de Newton, d’être traduit par un homme qui se déclare l’ennemi de Newton et le sien. » Voltaire reproche également à Algarotti la préface élogieuse consacrée à Fontenelle, anti-Newtonien notoire. Il n’apprécie pas non plus la parution de la traduction française la même année que celle de ses Elémens de la philosophie de Newton.

Première édition parue à Amsterdam chez Ledet ou Desbordes

Cet ouvrage parait à Leyde en 1738 sous le titre Elémens de la philosophie de Newton, mis à la portée de tout le monde. Il est dédié à Madame Du Châtelet, « Minerve de la France, immortelle Emilie ». Rejetant le dialogue badin, employé par Fontenelle et Algarotti, Voltaire introduit calculs et figures géométriques. L’ouvrage parait avant que Voltaire n’eut envoyé les derniers chapitres. L’éditeur hollandais, impatient, le fait achever par un mathématicien anonyme et ajoute au titre, sans l’avis de Voltaire: Mis à la portée de tout le monde, ce qui permet à ses détracteurs la plaisanterie de Mis à la porte de tout le monde… Dans une lettre du 14 mai 1738, Voltaire écrit : « Ce n’était pas même ainsi qu’était ce titre… , il y avait simplement : Elémens de la philosophie de Newton. Il faut être un vendeur d’orviétan pour y ajouter : mis à la portée de tout le monde, et un imbécile, pour penser que la philosophie de Newton puisse être à la portée de tout le monde. »
Dans les Mémoires de Trévoux d’août et septembre 1738 les pères jésuites notent: « À peine les nouveaux Elémens ont paru, qu’on les a vus dans les mains de tout Paris, et dans toutes sortes de mains. Le prix n’arrête personne. On les enlève. On se les arrache. Chacun veut au moins en lire un chapitre, en parcourir les titres, dévorer le livre des yeux » .

En 1738, mécontent de l’édition hollandaise, Voltaire publie en France une nouvelle édition à l’adresse de Londres. Il y met en tête des Eclaircissements, et ajoute un chapitre sur le flux et le reflux de l’océan.
Edition de 1738 corrigée par Voltaire.

Dans une lettre à Frédéric, Prince Royal de Prusse, Voltaire écrit : « L'édition de France, sous le nom de Londres, est un peu plus correcte. Les cartésiens crient comme des fous à qui on veut ôter les trésors imaginaires dont ils se repaissaient; ils se croient appauvris si la nature a des vides. Il semble qu'on les vole; il y en a qui se fâchent sérieusement. Pour moi, je me garderai bien de me fâcher de rien, tant que divus Federicus et diva Aemilia m'honoreront de leurs bontés. »
Par exemple on peut citer l’ouvrage de Banières paru dès 1739 : Examen et réfutation des Elémens de la philosophie de M .de Voltaire
Examen et réfutation des Elémens de la philosophie de M .de Voltaire

Une édition définitive des Elémens paraît en 1741. à l’adresse de Londres.
Edition de 1741.

En 1737, l’Académie des Sciences propose « La nature du feu, et sa propagation » pour sujet du prix de 1738. Ayant entendu parler du sujet du prix, Voltaire se met au travail. La Marquise du Châtelet voulant aussi concourir, travaille la nuit en cachette. Dans leurs mémoires la marquise du Châtelet et Voltaire, soutiennent l'existence corporelle et substantielle de la chaleur. Quoique n’ayant pas eu le prix, les deux essais, par « une jeune dame d’un haut rang » et « un de nos premiers poètes », furent publiées sur la recommandation de Réaumur. C’est le grand Euler qui est couronné.
Essai de Du Châtelet

Essai de Voltaire.

En 1740, la Marquise fait paraître un ouvrage destiné à son fils et intitulé Institutions de Physique : « Vous êtes, mon cher fils, dans cet age heureux où l’esprit commence à penser, et dans lequel le cœur n’a pas encore des passions assez vives pour le troubler. C’est peut-être le seul temps de votre vie que vous pourriez donner à l’étude de la nature ; bientôt les passions et les plaisirs de votre age emporteront tous vos moments et lorsque cette fougue de la jeunesse sera passée, et que vous aurez payé à l’ivresse du monde le tribut de votre age et de votre état, l’ambition s’emparera de votre âme ; et quand même dans cet age avancé et qui souvent n’en est pas plus mur, vous voudriez vous appliquer à l’étude des véritables sciences, votre esprit n’ayant plus alors cette flexibilité qui est le partage des beaux ans, il vous faudrait acheter par une étude pénible ce que vous pouvez apprendre aujourd’hui avec une extrême facilite. »
Institutions de physique.

Ces institutions ont donné lieu a de vives controverses dans les milieux scientifiques. La Marquise prend le parti de Leibniz, contre celui de l’Académie des Sciences, dans la grande dispute du moment sur l’expression de la « force » : mv ou mv2 . En 1744, dans sa Courte réponse aux longs discours d’un docteur allemand, Voltaire écrit : « Quant à la dispute sur la mesure de la force des corps en mouvement, il me paraît que ce n’est qu’une dispute de mots; et je suis fâché qu’il y en ait de telles en mathématiques. Que l’on exprime comme l’on voudra la force, par mv, ou par mv2, rien ne changera dans la mécanique: il faudra toujours la même quantité de chevaux pour tirer les fardeaux, la même charge de poudre pour les canons; et cette querelle est le scandale de la géométrie. »

La Marquise meurt en couches en 1749, avant la publication de son dernier ouvrage, Principes mathématiques de la philosophie naturelle, première traduction française des Philosophiae naturalis principia mathematica de Newton paru en 1687.
Cette traduction n’est publiée par Alexis Claude Clairaut qu’en 1759. Elle est suivie de commentaires tirés des œuvres de Clairaut et Bernoulli, et précédée d’une préface historique de Voltaire.
Principes mathématiques de la philosophie naturelle.

Pour la petite histoire, je possède deux exemplaires de cet ouvrage qui diffèrent en quelques points. Par exemple, dans l’avertissement, dans un exemplaire est écrit : page ii « Toutes ces recherches sont tirées pour la plupart ou des ouvrages de M. Clairaut, ou des cahiers qu’il donnait en forme de leçons à M. le Comte du Châtelet Lomont, fils de l’illustre Marquise ». page iii « M. le Monnier a suffisamment rempli cet objet dans ses élémens d’Astronomie, et ceux qui ne trouveraient pas une clarté suffisante dans le texte même du troisième livre des Principes de M.Newton, peuvent recourir à ses élémens comme à un excellent commentaire ».

Dans l’autre exemplaire : page ii « Toutes ces recherches sont tirées pour la plupart ou des ouvrages de M. Clairaut, ou des cahiers qu’il avait anciennement donnés en forme de leçons à Madame la Marquise du Chastellet ». page iii « M. l’Abbé de la Caille a parfaitement rempli cet objet dans ses Elémens d’Astronomie, où il a beaucoup simplifié les opérations par lesquelles M. Newton avait enseigné à déterminer les orbites des comètes ».

Epilogue : Voltaire, déçu de ne pas entrer à l’Académie des Sciences, écrit à M. d’Argental à la fin de 1741 : « La supériorité qu’une physique sèche et abstraite a usurpée sur les belles lettres commence à m’indigner. Nous avions, il y a cinquante ans de bien plus grands hommes en physique et en géométrie qu’aujourd’hui, et à peine parlait-on d’eux. Les choses ont bien changé. J’ai aimé la physique tant qu’elle n’a point voulu dominer sur la poésie ; à présent qu’elle écrase tous les arts, je ne veux plus la regarder que comme un tyran de mauvaise compagnie…On ne saurait parler physique un quart d’heure et s’entendre. On peut parler poésie, musique, histoire, littérature, tout au long du jour. » A partir de 1742 Voltaire abandonne complètement la physique pour des études historiques.
Quelques ouvrages cités.


Merci beaucoup Bernard! Très bel article!

H