Amis Bibliophiles bonsoir,
La parole à Bernard, qui veut continuer à éveiller vos consciences...
Dans les années 1640-1650, une dispute envenima les relations entre Descartes et son premier disciple Regius. Elle correspond à la parution pratiquement simultanée des Principia Philosophia et de Fondamenta physice.
Descartes : Portrait gravé. (245x190) de Jacques Lubin (1637-1695), d’après un portrait original perdu de Frans Hals (1581-1666) daté de 1649.
René Descartes (1596-1650) entre à l’age de huit ans au Collège royal de la Flèche, où enseignent les Jésuites. Il y reste jusqu’à l’âge de 18 ans et y étudie la physique, la philosophie scolastique et les mathématiques. Il dira plus tard dans son Discours de la méthode combien ces études lui paraissaient incohérentes et peu propres à la bonne conduite de la raison. En 1616, il obtient son baccalauréat et sa licence de droit à l’université de Poitiers puis part vivre à Paris. Il s’engage en 1618 en Hollande à l’école de guerre de Maurice de Nassau, prince d’Orange.
Descartes consacre ses heures de loisir à l’étude et aux mathématiques. En 1619, il quitte la Hollande pour le Danemark, puis l’Allemagne, où la guerre de Trente ans éclate. Il s’engage alors dans l’armée du duc Maximilien de Bavière. Puis il renonce à la vie militaire et, de 1620 à 1622, il voyage en Allemagne et en Hollande, puis revient en France où il rencontre le père Marin Mersenne. Il s’installe définitivement en Hollande au printemps 1629. Il étudie l’optique, découvre les lois de la réfraction, et achève la rédaction de sa Dioptrique. Il étudie également les êtres vivants et fait de nombreuses dissections à Amsterdam pendant l’hiver 1631-1632. Il en tirera le Traité de l’Homme. Suite au procès de Galilée, Descartes renonce à publier son Traité du Monde et décide de donner une autre présentation à son œuvre : ce sera le Discours de la méthode et les Essais qui le suivent. En 1643, il rencontre Élisabeth de Bohême, fille de l’électeur Palatin détrôné en exil en Hollande, et commence une abondante correspondance, qui aboutira au Traité des Passions (1649). Il fait trois séjours en France (1644, 1647 et 1648). C’est au cours du second qu’il rencontrera Pascal à qui il inspirera les expériences du Puy de Dôme sur la pression atmosphérique. En 1650, il accepte l’invitation de la reine Christine à Stockholm et meurt d’une pneumonie le 11 février 1650.
Je ne parlerai que d’un seul ouvrage de Descartes: Les principes de la philosophie.
L'édition originale de Principia Philosophia fut publiée en latin par Louis Elzevier en 1644. Au milieu du 17éme siècle, le latin s'impose encore comme langue de la philosophie dans les écoles où Descartes souhaitait voir son livre admis et étudié. Le texte d'origine des Principia était celui du Traité du Monde que Descartes avait écrit en français, mais les importantes modifications rendirent nécessaire une nouvelle traduction en français. Celle ci fut effectuée par l'abbé Claude Picot, ami de Descartes. La première édition française parut en 1647. La présente édition en est une réimpression.
Il s’agit du premier traité de physique rationnelle. On y trouve les énoncés du principe de l’inertie, de la conservation de la quantité de mouvement et de la composition des mouvements. La nature des corps réside dans l’étendue ; ils sont créés à partir de trois éléments. L’univers est formé de tourbillons. Le magnétisme est du au mouvement de particules cannelées qui préfigurent les lignes de champs, etc.
Descartes critiqua immédiatement cet ouvrage, s’opposant même à sa publication car Régius le plagiait et parce que l’éditeur Elzevier réutilisa les mêmes bois que ceux des éditions de Descartes.
En 1647, dans la préface des Principes de la philosophie, Descartes écrit :
« Je sçay bien qu’il y a des esprits qui se hastent tant, et qui usent de si peu de circonspection en ce qu’il font, que mesme ayant des fondemens bien solides, ils ne sçauroient rien bastir d’assuré : Et pour ce que sont d’ordinaire ceux-là qui sont les plus prompts à faire des livres, ils pourroient en peu de temps gaster tout ce que j’ay fait, et introduire l’incertitude et le doute en ma façon de philosopher, d’où j’ay soigneusement tasché de les bannir, si on recevoit leurs écrits comme miens, ou comme remplis de mes opinions. J’en ay eu depuis peu l’expérience en l’un de ceux qu’on a le plus crû me vouloir suivre, et mesme duquel j’avois écrit en quelque endroit que je m’assurois tant sur son esprit, que je ne croyois pas qu’il eust aucune opinion, que je voulusse bien avoüer pour miène : Car il publia l’année passée un Livre intitulé, Fundamenta Physicae, où encore qu’il semble n’avoir rien mis touchant la physique et la médecine, qu’il n’ait tiré de mes écrits, tant de ceux que j’ay publiez, que d’un autre encore imparfait, touchant la Nature des Animaux, qui luy est tombé entre les mains, toutefois à cause qu’il a mal transcrit, et changé l’ordre, et nié quelques véritez de Métaphysique, sur qui toute la physique doit estre appuyée, je suis obligé de le désadvoüer entièrement, et de prier icy les Lecteurs, qu’ils ne m’attribuent jamais aucune opinion, s’ils ne la trouvent expressément en mes écrits, et qu’ils n’en reçoivent aucune pour vraye, ny dans mes écrits ny ailleurs, s’ils ne la voyent très clairement estre déduites des vrays Principes. »
Philosophia naturalis ne fut traduit en français qu’en 1686 : Philosophie Naturelle. Utrecht, R. Van Zyll. 1686. 1 volume in-4 ; (2), (5) pp, portrait, (48), 464 pp, pp 467 à 546, pp 541 à 548, pp 555 à 565.
Pour finir, quelques figures sur les aimants :
Travaillant très tard ce soir, j'en profite pour jeter un oeil de temps en temps au livre d'heures signalé dans l'Ebayana de jeudi. Il est 00h17, il reste 43 mn, il en est à 14.600 US Dollars (soit 11.400€). Les grosses transactions se multiplient sur "le site d'enchères"... Symptomatique...
RépondreSupprimerMerci à Bernard pour ses articles toujours parfaitement documentés, ils évoquent de manière fort claire le foisonnement des idées scientifiques au 17ème siècle.
RépondreSupprimerJe ne connaissais pas ce Henri Le Roy plagieur de Descartes.
Merci aussi à Hugues d'être notre Père Mersenne, même si nous ne sommes pas des Descartes ou des Pascal.
René de BlC
Bernard nous habitue à l'excellence et ; est-ce le fait de mieux connaitre ses lecteurs ? ; ses articles sont de plus en plus limpides alors que le propos est scientifique. Merci. Désormais, je ne laisserai plus passer un Henricus Regius... En verrai-je un jour ? Pierre
RépondreSupprimerUne pépite.
RépondreSupprimerMontag
Physicien et bibliophile, c'est un plaisir pour moi de parcourir ces lignes. Je les ai déjà lues mais j'y reviens à l'occasion.
RépondreSupprimerAujourd'hui, l'occasion est simple, je viens de me faire un plaisir comme je suis sûr que nombre d'entre nous les goûte: au hasard d'une vente aux enchères courantes, j'ai acheté un carton d'une vingtaine de livres du XVIIIéme, de ceux qui n'enflamment pas le coeur des enchérisseurs car religieux et souvent en piteux état. Mais je l'avais vu elle, cette reliure sobre et modeste, quoiqu'en bon état, sans pièce de titre, et surtout qui cachait "le monde de Mr Descartes ou le traité de la lumière" 1664 chez bobin et legras.
C'est idiot, mais je dois dire que j'en suis encore tout émoustillé! (Même si le terme n'est pas des plus adéquat!)
P.S.: Encore merci Bernard pour vos articles.
P.S.2: Il faut vraiment que je pense à m'inscrire.
Un physicien bibliophile! Je me sens moins seul. Quel plaisir de trouver un ouvrage important dans un lot disparate. S'agit-il de l'édition de 1664 (Paris, Jacques Le Gras) ?
RépondreSupprimerA bientôt pour de nouveaux billets.
Bernard
L'édition est bien datée de 1664, mais indiquée chez Bobin et Le Gras. Le sieur Bobin étant apparemment le beau-frère de Le gras. En savez-vous plus?
RépondreSupprimerC'est un plaisir à lire, bien qu'assez abscons parfois même pour quelqu'un du domaine. Il est intéressant de voir la justesse de certaines conclusions basées sur bien peu de chose mais aussi les égarements complets parfois! même un génie peut se tromper!
Nicolas.