Amis Bibliophiles bonjour,
Il y a différentes façons de concevoir une vente aux enchères de livres: vous pouvez multiplier les manettes, proposer un catalogue long comme le bras, bien ou mal rédigé d'ailleurs, dans les deux cas, ça fonctionne, et puis vous pouvez aussi choisir d'être efficace, comme Christie's lors de la vente #2526 du 20 janvier, et ne proposer qu'un seul lot, mais quel lot! En effet, la célèbre maison de ventes a organisé une vacation pour proposer aux amateurs un nouvel exemplaire du Birds of America d'Audubon. L'estimation était comprise entre 7 et 10 millions de dollars - on notera au passage que les maisons respectables ne jouent pas au jeu du "attirons le chaland avec des estimations fantaisistes" -, et l'ouvrage a réalisé 7,922 millions de dollars. Qui a dit que nous n'étions pas en crise?
Audubon, Birds of America |
Je m'interroge sur le recours potentiel que pourrait avoir l'acheteur si le livre ne correspondait pas tout à fait à la description. C'est la mésaventure qui est en effet arrivé à notre ami Erick lors d'un achat effectué auprès d'une maison de vente italienne. Que faire dans ce cas? Avez-vous déjà rencontré cette situation? Cela m'est arrivé une fois, lors d'une vente organisée par le cabinet Poulain: la description présentait une jolie EO du 18ème en reliure signée, il était précisé "bel exemplaire". A réception, il s'est avéré que le bel exemplaire avec les mors fendus et une coiffe arrachée, ce qui n'est pas vraiment ma conception de la beauté. J'ai immédiatement contacté l'étude et l'expert et après un rapide échange d'emails, on m'a proposé un remboursement intégral en me précisant "ce n'est pas nous qui avons fait cette fiche", ce qui m'avait laissé perplexe. Bref tout s'était bien terminé. Je n'ai heureusement jamais rencontré de problème similaire. Et vous? Quelle est dans ce cas la marche à suivre? Erick, as-tu résolu ton problème?
Le Salon International du Livre Ancien au Grand Palais à Paris se tiendra les 27,28 et 29 Avril 2012. J'y serai, vous y serez, et je vous propose de nous y retrouver pour un déjeuner de bibliophiles, comme d'habitude.
Salon du Livre Ancien du Grand Palais: 27 - 29 avril 2012 |
La crise? "C'est la crise, la crise est là, nous sommes en crise"... je n'entends plus que cela dès que je discute avec un libraire: les livres se vendraient mal, ou peu, ou les deux. J'avoue que je n'ai rien observé de tel, on sent bien une sorte de tension chez certains, mais je n'ai pas l'impression que les prix soient réellement en baisse. En tout cas, pas sur les livres qui m'intéressent, qui continuent régulièrement à me passer sous le nez parce qu'ils montent trop haut... Et quand je regarde les catalogues de libraires récemment reçus, il me semble que les prix se tiennent....
Enfin, je vous remercie pour votre fidélité au blog, qui atteint depuis quelques semaines des niveaux de fréquentation très élevés, et ce alors que je culpabilise de ne pas avoir assez de temps pour poster des messages étant moi-même par monts et par vaux, à parcourir la planète. J'adore voyager, il n'y a rien de mieux pour porter un regard neuf sur sa vie, mais j'aime aussi beaucoup quand ça s'arrête.
Et je crois que c'était le message que Sainte Wiborade cherchait à m'envoyer puisque voici "l'oeuvre" qui ornait la tête de mon lit dans un hôtel de l'autre côté du monde. Limpide non? Le bibliophile cherche d'un doigt habile à stopper la course du temps et du globe pour retourner à ses chères études". Naturellement, la ressemblance, notamment capillaire, est approximative. Face au talent du peintre je suis resté muet, je suis remonté dans un avion et me voici :).
H
Merci à Hugues de lancer ce débat sur ce genre de mésaventure car personne n'est à l'abris.
RépondreSupprimerJe résume : en fin d'année dernière, un lot retient mon attention chez Gonnelli à Florence. Je place un ordre d'achat, mais à priori trop bas pour être pris en compte. Le lot ne se vend pas et est proposé après vente, comme souvent cela se fait. Je redemande quelques photos et renseignements. Le livre est présenté comme ayant quelques rousseurs et taches sur les plats. La restauration au niveau de la reliure me semble faisable, aussi nous nous mettons d'accord sur un prix avec la maison Gonnelli.
Je règle la note, et je récupère le livre après quelques temps (il y a quelques formalités administratives pour les oeuvres d'art en provenance d'Italie).
Je reçois le colis quelques semaines après, et découvre l'ouvrage : de prime abord les 3 volumes semblent être conformes à la description, lorsqu'en les feuilletant, je m'aperçois que dans 2 volumes, une certain nombre de feuillets sont quasiment détachés du corps de la reliure.
Je relis la description : rien n'est mentionné à ce propos.
Trouvant que du coup, la restauration devient un peu lourde par rapport à ce que j'escomptais, j'envoie le jour même un mail à Gonnelli leur expliquant la chose, et demande à être remboursé. Réponse de leur part : pas possible, car "les livres n'avaient pas de tout cette condition au moment du départ de notre maison de vente".
Je regarde mieux la photo de l'ouvrage sur leur site : la tranchefile apparait complètement déboitée, signe que la reliure a bougé.
Je leur renvoie un mail. Pas de réponse.
Comme ce sont les congés de fin d'année, j'attends un peu, mais en vain.
Pendant les vacances, je tombe par hasard dans une librairie sur le catalogue Wilmerding de 1951 dont le livre est issu. On y lit en toute lettres "some leaves in vol II partially loose from binding" pour le lot en question.
Je renvoie du coup la photo de la partie du catalogue (je l'ai acheté au passage, car il s'agit vraiment d'une très belle collection), en leur expliquant que la condition défectueuse du livre étaient bien antérieure à l'envoi, et donc de bien vouloir reconsidérer leur position.
Depuis, aucune réponse!
Je suis vraiment très déçu de l'attitude de cette maison à priori sérieuse. Je comprends très bien qu'un collationnement peut être incomplet, mais il faut savoir reconnaitre son erreur!
Et surtout pas un mail en réponse, après avoir démontré par A + B que le défaut existait depuis longtemps!
Quelqu'un a t'il eu la même mésaventure avec la maison Gonnelli ou avec une autre SVV?
Comment faire quand on est dans son bon droit?
Merci de vos réactions et conseils!
Cordialement
Wolfi (Erick)
Pour l'instant pas de mauvaises surprises mais au passage je me demandais si la formule rituelle (et un peu anachronique depuis l'arrivée d'internet) : "vous avez pu vous rendre compte de l'état des objets lors de l'exposition en conséquence aucune réclamation ne sera acceptée" avait quelque valeur juridique? Ce genre d'annonce alors qu'une vente a bénéficié d'un expert (rémunéré) me semble pour le moins exagérée. D'ailleurs ça prend combien un expert (4-5%??? ou c'est fixe)?
RépondreSupprimerJ'ai tendance mais c'est purement basé sur l'expérience (limitée) que l'expertise fait foi car les livres "à problème(s)" me semblent souvent relégués hors-catalogue.
J'ai vu il y a peu un libraire vertement échanger avec l'expert d'une vente à propos d'un livre acheté hors-catalogue et qui présentait une déchirure avec manque de texte et l'expert de protester que c'était "hors-catalogue" même s'il avait omis de le préciser de vive voix.
Bonne soirée,
Olivier
En France, il est possible :
RépondreSupprimer- de faire une réclamation auprès du Conseil des Ventes,
- si cela ne suffit pas, de demander l'annulation de la vente au Tribunal d'Instance ou de Proximité en invoquant une erreur sur une qualité substantielle du lot en vertu de l'article 1109 du Code Civil :
'Il n'y a point de consentement valable si le consentement n'a été
donné que par erreur ou s'il a été extorqué par violence ou surpris par dol.'
A noter que cette action doit être dirigée contre le vendeur et non contre le commissaire-priseur, qui n'est qu'un intermédiaire, à moins que ce dernier refuse de divulguer les coordonnées du vendeur.
Jurisprudence de la Cour de Cassation (Cass. 1ère Civ. 16
fevr. 1983) : "Ayant constaté que le commissaire-priseur n'avait pas indiqué en temps utile à l'adjudicataire le nom de son vendeur et ne lui avait pas donné tous renseignements pour la défense de ces droits, la cour d'appel en a justement déduit qu'il devait, à l'égard de l'acquéreur, être traité
comme prête-nom, sans avoir à rechercher si les conditions du contrat de prête-nom étaient réunies".
Et pour un exemple (à l'envers) :
RépondreSupprimerhttp://www.latribunedelart.com/apres-les-affaires-poussin-voici-l-affaire-friedrich-article002472.html
et
http://www.latribunedelart.com/a-propos-du-i-hibou-i-de-friedrich-une-interview-de-bertrand-talabardon-et-bertrand-gautier-article003427.html
Olivier
Je vais vous taquiner , mais en achetant en SVV vous voulez avoir les même prix d'achat que les libraires, et vous vous voudriez avoir en plus la même sécurité qu'en achetant chez les libraires ! Il faut choisir, cela fait partie du jeux des enchères et comme me dit un ami qui enchérit depuis plus de 50 ans quand je me plains d'avoir levé la main une fois de trop ,ou de la mauvaise qualité du livre,
RépondreSupprimer"une main lave l'autre",
pour une mauvaise enchère, combien de bonnes affaires avez vous fait ?...Vous avez sans doute tous des anecdotes d'éditions originales non signalées, de raretés oubliées dans des manettes...de hors catalogue plus intéressants que les ouvrages catalogués...Quand j'ai un problème je laisse courir, sauf une fois ou le plat du livre c'est détaché alors que l'on me le remettait en main, j'étais dans la salle, j'ai fait annuler l'enchère, le livre avait du tomber pendant l'expo.
Daniel B.
Le 5 février 2012 à Périgueux, dans une vente volontaire cataloguée (mais sans expert) seront dispersés des ouvrages reliés en "marocain" (n° 95, 106); le reste est à l'avenant.
RépondreSupprimerPour qui ira sur place, je prédis que des "chopins" sont envisageables…
Pour le reste, je pense qu'il est difficile de faire de bonnes affaires sans être sur place.
Le lien de la vente périgourdine:
http://www.interencheres.com/ventes_aux_encheres/description_vente_aux_encheres_1clic.php?clef_etude=33005&clef_vente=201202050005
Les prix atteints en SVV sont loin d'être systématiquement inférieurs aux prix pratiqués par les libraires.
RépondreSupprimerLa majorité du stock des libraires sérieux ne provient pas d'achats en SVV mais d'achats directs aux particuliers et aux institutions. La probabilité de faire une 'bonne affaire' est plus grande en achetant à un de ces libraires, qui est seul à déterminer le prix du livre, et qui a par conséquent plus de chance de se tromper que les dizaines d'enchérisseurs qui font le prix du livre dans les ventes cataloguées des SVV.
Bien d'accord avec vous cher anonyme, sur le fait que certains livres sont plus chers en SVV que chez les libraires, c'est pour cela qu'il faut acheter chez les libraires! ;-)
RépondreSupprimerDaniel B.
On en déduit donc que les livres sont moins chers chez les veuves. :) :) :)
RépondreSupprimerBlague à part (mais j'étais sérieux), dire que les livres sont moins chers en salle que chez les libraires est un NON SENS ABSOLU, et notamment pour deux raisons:
1. Il n'y a qu'à voir le nombre de libraires qui achètent en salle (masochisme? envie de payer plus cher? ou refus d'acheter chez un collègue qui serait moins cher?)
2. Si c'était le cas, gageons que les libraires vendraient leurs livres dans les salles des ventes. Je veux dire tout le temps, et non de façon occasionnelle pour des raisons plus ou moins transparentes.
-> Il arrive bien sûr que des livres soient plus chers en salle que chez des libraires, mais ce n'est pas une règle, la moyenne des prix est bien sûr inférieure en salle des ventes.
benoît
@ Guillaumus : concernant la mention "marocain", je l'ai rencontrée dans un cat. rédigé par un expert près les tribunaux ; cette personne a répondu à ma question ; il apparaît que les orthographes seraient parfaitement exactes toutes les deux... A l'origine, les biquettes étaient bien du Maroc...
RépondreSupprimerBenoît P (à ne pas confondre avec benoît du commentaire précédent !)
"collation" veut dire "repas léger" et "comparaison entre deux exemplaires"
RépondreSupprimerpréférer "collationnement" pour le deuxième sens de "collation".
De même, préférer "maroquin" pour le "cuir" et "marocain" pour les Arabes, le mot venant de l'espagnol "marroqun" qui signifie "cuir", la technique ayant été apportée effectivement par les Arabes en Espagne.
Merci Jean-Paul... Je préfère largement écrire "maroquin", quand on parle d'une reliure, il n'en reste pas moins que ce libraire continue à utiliser "marocain", envers et contre tout... Je vais consulter le TLF de ce pas...
RépondreSupprimerOn peut effectivement se poser la question de savoir si c'est moins cher en SVV ou en librairie, mais il n'en demeure pas moins que l'un et l'autre se doivent de décrire correctement leur "marchandise" en tant que vendeur.
RépondreSupprimerEt si une erreur (compréhensible avec certaines ventes de plusieurs centaines de numéros) apparait, il me parait normal et commercial, de reprendre le lot, si l'acheteur est de bonne foi!
Dans tous les cas, dire que le livre n'était pas dans cet état lors de l'envoi, me parait plus que limite!
Et là en l'occurrence, la chance me souriant, j'apporte la preuve que l'ouvrage était comme cela depuis près de 60 ans!
Je serais très déçu par cette SVV de réputation sérieuse qu'est Gonnelli, s'ils ne me reprenaient pas le lot!
Bonne soirée
Wolfi
Bonjour à tous,
RépondreSupprimerbonne nouvelle : la maison Gonnelli souhaite régler la chose à l'amiable, puisqu'elle accepte que je lui renvoie l'ouvrage et de me rembourser.
Un problème de mail avec un correspondant qui ne travaille plus pour eux...
Bref, je confirme ce que je pensais de prime abord : Gonnelli est bien une maison sérieuse!
Il est important de dire les choses aussi quand le dénouement est positif!
Merci à tous pour votre soutien!
Wolfi
Alors tout est bien qui finit bien entre personnes de bonne compagnie, ouf ! Heureux pour vous, Wolfi, en tout cas !
RépondreSupprimerBenoît P.