mercredi 28 janvier 2015

La bibliophilie, un investissement de père de famille. Episode III - Un musée privé? Allons donc...

Amis Bibliophiles bonsoir,
 
Après une petite interruption, nous retrouvons notre couple de "bibliophiles" boursicoteurs.
 
 
Nos heureux gagnants de la loterie nationale ont étudié diverses piste d'investissement et considèrent l'ouverture d'un musée privé du livre, un musée ayant pignon sur rue avec des bibliothécaires, des experts et un pool de conseillers financiers....
 
 
- Mon aimée, J’ai une question à vous poser.
- C’est tout de même formidable, je ne t’ai jamais autant vu que depuis que nous sommes riches.
- Une question très importante…
- N’as-tu donc rien à faire, comme aérer la bibliothèque ?
- Je voudrais savoir…
- J’en ai plus qu’assez de te répéter d’ouvrir les fenêtres.
- Avec mes douze-pour-cent, je suis propriétaire de quelle partie du Marquis de Sade ?
- Du croupion.
- Mais non, du manuscrit.
- C’est-à-dire ?
- Est-ce que je peux choisir ? Je prendrais bien la préface.
- De quelle préface parles-tu ?
- De l’introduction aux 120 journées de Sodome. Je voudrais qu’on y place mes douze-pour-cent.
- Ni préface, ni introduction.
- Un avant-propos, un texte liminaire, un avertissement ?
- Non plus.
- Une mise en garde au lecteur ?
- Encore moins
- Une postface, alors.
- Rien de ce que tu me chantes ; ni avant, ni après.
- Mais enfin, on n’écrit pas des choses pareilles sans prévenir d’abord et s’excuser ensuite. Votre marquis…
- Ton marquis.
- reconnaît bien quelque part tremper sa plume dans de la fiente de rats mélangée à sa propre bave.
- Pas que je sache.
- Et planquer le rouleau dans son fondement quand il n’écrit pas.
- Ce n’est pas dans l’édition de la Pléiade.
- Au pire, je me contenterai de la table des matières.
- Il n’y en a pas.
- Alors je n’y vais pas.
- Tu parles de ce soir ? C’est une obligation.
- On ne doit pas être bien riches si on a des obligations.
- Tous les propriétaires du rouleau seront là.
- Mais je n’ai rien à leur dire à ces gens.
- Alors ne dis rien, je me charge du reste.
- Comprenez, si je dois me vanter en société….
- Tu ne vas pas recommencer ?
- d’être l’heureux propriétaire d’un rouleau de…
- Plus un mot !
- Mais enfin, qu’avez-vous besoin de moi ?
- Et avant de te changer, tu iras chercher ta fille à l’école.
- Depuis quand faut-il aller la chercher ? Je vais me faire huer.
- Pourquoi cela ?
- Vous savez bien que nos enfants m’ont interdit d’en approcher et de jamais, au grand jamais, m’aventurer à aller les chercher.
- Ils ne m’ont rien dit à moi.
- Parce que votre présence enchante la planète, mon éblouissante. Allez-y donc et admettez qu’il vaut mieux que je m’abstienne de vous accompagner ce soir ; je n’ai pas une once de votre rayonnement.
- C’est vrai que je ne te communique pas grand-chose de ce coté là
- Absolument ; à l’inverse de vases. Imaginez la vacuité du mien côtoyant la plénitude du votre et ce, sans espoir de remplissage aucun. Je risquerais de vous gâcher la soirée.
- Des vases…
- Des vases pas communicants, si vous voyez ce que je veux dire.
- Je n’y avais pas pensé.
- Et à quoi donc, ma subliminale ?
- Il est question de vases d’aisance au chapitre deux. C’est une idée.
- De quoi parlez-vous ?
- De produits dérivés.
- De produits dérivés ?
- Les accessoires du quotidien. Pense au nombre de mugs que la reine d’Angleterre écoule.
- Notre fortune assise sur des pots-de-chambre ?
- Tu sais bien que l’argent n’a pas d’odeur.
- Justement, je ne me sens pas d’être un riche de cette sorte là.
- Mais être riche, mon ami, ça ne se choisit pas.
- Cependant…
- D’ailleurs tout est prêt.
- Qu’est-ce qui est prêt ?
- A peu prés tout sauf les vases. Ce sera pour la collection d’hiver.
- Vous êtes bouillante, vous devriez vous aliter.
- M’aliter ? Alors que je viens de signer avec l’une des plus grandes stylistes parisiennes ?
- Une styliste ?
- Qui a trouvé l’idée particulièrement excitante… Les jouets du divin Marquis. Je vais nous faire prêter le rouleau pour le lancement. Il y aura un happening dans sa cave.
- Sa cave ?
- C’est son lieu de travail.
- Elle travaille dans une cave ? Mais comment avez-vous eu son adresse ?
- Par notre fille.
- C’est un complot… Et d’où la tenait-elle ?
- Des recherches pour son exposé.
- Quel exposé ? C’est moi qui lui fais ses exposés.
- Celui sur la génération des plantes.
- Et Linné l’aurait entrainé dans une cave ?
- Tu ne l’as pas trouvée particulièrement attentive quand tu parlais d’étamines et de pistil ?
- Maintenant que vous le dites
- Du coup, elle est allée chez Sephora
- Ne lui avez-vous pas dit qu’elle était trop jeune pour se maquiller ?
- Ou elle a acheté un petit canard jaune qui m’a conduit à la styliste.
- Un petit canard jaune ?!?
- Celui qui a servi à illustrer son exposé.
- Il n’y a aucun canard jaune dans Linné… chez Piton de Tournefort non plus.
- Il y a bien des grenouilles dans Mathiole.
- C’est plutôt la fin qui est intéressante, la partie sur la distillation.
- Il n’y a que toi que ça intéresse ici.
- Mais enfin, ce sont les abeilles… pas les canards, ni les grenouilles.
- Le canard était plus explicite.
- Les canards n’ont pas de poches à pollen.
- Ça reste à démontrer.
- En tout cas pas sous les palmes.
- Oui mais ils ont un bec.
- Bien sur qu’ils ont bec, quand ils ont une trompe ça s’appelle un fourmilier, voyez Dioscoride.
- Un bec qui fait coin-coin… Sais-tu que ces petits canards jaunes flottent ? C’est pratique dans une baignoire. D’ailleurs il faudra le récupérer
- Dans la baignoire ?
- Non, en même temps que ta fille : Les objets confisqués… il s’agit du canard.
- Et pourquoi moi ?

- …seront récupérés par le chef de famille. Le chef de famille, c’est toi.
- C’est bien la première fois que j’entends ça.
- C’est le règlement, dixit la conseillère d’éducation.
- Elle va me parler du canard ?
- Tu lui diras que c’est une abeille....
 
 

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