Amis Bibliophiles bonjour,
Promesse tenue, Philippe vous présente aujourd'hui un des livres de sa bibliothèque auxquels il tient le plus. Merci beaucoup Philippe!
Page de titre de la première édition des dix premiers livres de l’Iliade, 1545
Bien que principalement attiré par les reliures françaises du XVIe s., l’ouvrage que j’ai choisi pour vous dans ma petite bibliothèque est couvert d’un modeste veau marbré de la fin du XVIIIe s.
Son attrait est ailleurs, mais des liens le relient néanmoins à l’art de la reliure sous François Ier.
Il s’agit d’un volume in-folio dont la page de titre présente l’intitulé suivant :
Les dix premiers//livres de l’Iliade d’Homere,//prince des poetes : //Traduictz en vers francois, // par M. Hugues Salel, de//la chambre du Roy, //& Abbé de S. //Cheron.
Avec privilege //du Roy. // On les vent au Palais en la Gallerie, pres la //Chancellerie, en la boutique de Vincent Sertenas. //1545.
La première traduction en français de l’Iliade, réputée très infidèle, est due à Jean Samxon, « licencié en loys, lieutenant du bailly de Touraine » et a été donnée à Paris par Jean Petit en 1530. A la demande de François Ier, le poète Hugues Salel entreprend une nouvelle traduction de l’Iliade, à laquelle il doit sa renommée, plus qu’à sa propre œuvre poétique.
Salel, valet de chambre du Roy et grand maître d’hôtel de François Ier aurait également été conseiller et aumonier de la reine ; il est par ailleurs l’auteur d’un dizain ouvrant Pantagruel dans son édition de 1534 chez F. Juste à Lyon.
Dizain d’Hugues Salel en tête de Pantagruel (ici dans une édition de 1556)
Les deux premiers livres de cette Iliade « en vers françois » sont publiés sans le consentement de leur auteur chez Pierre de Tours à Lyon en 1542. Cette édition pirate incite Hugues Salel à publier les livres déjà traduits (les dix premiers) sans attendre l’achèvement de son travail.
Illustration en tête du premier livre de l’Iliade, 1545
Cet ouvrage imprimé par Jean Loys et publié par Vincent Sertenas à Paris en 1545 est loué pour la beauté de sa typographie et la pureté de ses onze illustrations par H.-J. Martin (La naissance du livre moderne, p.243) : « Cette esthétique très dynamique de la ligne claire atteint l’un de ses sommets dans la traduction de l’Iliade due à Hugues Salel, publiée en 1545 par Vincent Sertenas : (…) la gravure y est pur dessin, d’une souplesse et d’une vigueur qui ont peu d’égales » ou R. Brun (Le livre français illustré de la Renaissance) : «Un des plus beaux livres du XVIe siècle du point de vue de la typographie».
Les anglais ne sont pas en reste : Fairfax Murray (French 250) :"one of the handsomest books printed at Paris" ou encore Harvard/Mortimer 293 : "The italianate style introduced into the French book by Tory, and continued in volumes from the press of Denys Janot, reaches its height in these illustrations".
Les illustrations en tête des livres (2, 3, 5, 7, 8 et 9) de l’Iliade, 1545
La référence à l’édition lyonnaise pirate des deux premiers livres est présente dans les lettres patentes de François Ier en début d’ouvrage et dans des vers « aux lecteurs » qui terminent le volume.
Les lettres patentes du roi en tête de l’édition de 1545
Vers de Salel en fin de volume dénonçant l’édition donnée par P. de Tours en 1542
Les manuscrits de dédicace des différents livres de l’Iliade offerts à François Ier sont luxueusement reliés à Paris par un atelier anonyme désigné par l’éponyme, « atelier du relieur de Salel », lié au relieur royal, Etienne Roffet. Certains sont conservés en France (BNF et Chantilly), le livre X est à Leyde, tandis que les livres III et IV, sont peut-être perdus.
Le manuscrit de dédicace des livres VII et VIII de l’Iliade relié par l’atelier
du « relieur de Salel » (BNF).
Un bon aperçu du travail de cet atelier est visible sur les liens suivants :
Hugues Salel meurt en 1553 sans avoir achevé la commande royale dont il avait interrompu la rédaction à la mort de François Ier en 1547. Sa traduction des onzième et douzième livres, ainsi que des premiers vers du treizième livre sera publiée par son secrétaire, Olivier de Magny en 1554 chez le même Vincent Sertenas et la traduction de l’Iliade en vers français sera achevée par Amadis Jamyn deux décennies plus tard.
Page de titre des derniers livres traduits par Hugues Salel et imprimés en 1554
Ces derniers livres sont suivis de « quelques autres vers mis sur son tombeau par divers poëtes de ce tems ».
Vers de P. de Ronsard à la fin de l’édition des derniers livres de l’Iliade en 1554.
Les dix premiers livres dans l’édition de 1545 et les trois suivants dans celle de 1554 sont consultables sur Gallica :
et
Philippe M.
très bel exemplaire ! même si on ne voit pas la reliure :) merci Philippe
RépondreSupprimerMerci, votre livre semble peu pressé, et vos photos sont remarquables sur le papier, dont on sent les belles vergeures, voilà une très agréable manière de nous priver de désert.
RépondreSupprimerDaniel B.