dimanche 22 janvier 2012

Les grands livres de la bibliophilie: la bible polyglotte de Plantin

Amis Bibliophiles bonsoir,

C'est un relieur qui donnera naissance à l'un des livres les plus célèbres de l'histoire, un relieur français, Christophe Plantin. 

Christophe Plantin est né vers 1520 à Saint-Avertin, près de Tours. C'est à Paris et à Caen qu'il apprend et exerce le métier de relieur - il travaillera notamment pour Gabriel de Zayas, secrétaire de Philippe II -, puis découvre l'art typographique. 
Christophe Plantin, par Rubens
Il s'installe à Anvers en 1549 où il devient imprimeur en 1555. La situation politique et religieuse dans ce qui était alors les Pays-Bas espagnols fait de l'édition un métier périlleux. Les imprimeurs peuvent être emprisonnés ou condamnés à mort et Plantin fera toute sa vie preuve d'un grand pragmatisme religieux: il est un moment associé à des calvinistes, son atelier est fouillé par les catholiques à la recherche d'hérétiques protestants en 1561, il est ensuite protégé par un roi catholique (Philippe II d'Espagne), avant de se tourner vers le protestantisme quand les troupes de Guillaume le Taciturne reprirent Anvers.

Il imprima ainsi pour les catholiques, pour et avec les protestants, publiant des ouvrages sur la Réforme et sur la Contre-Réforme tout en continuant de produire également des écrits à caractère humaniste.

Le Compas d'or, la marque la plus célèbre de Plantin
Christophe avait une approche quasi industrielle de son métier, qu'illustre son emblème, le fameux compas d'or. En 6 ans, il tripla le nombre de ses presses, passant de 5 à 16 et en 1575 il était à la tête de l'un des plus importants ateliers de l'époque, si ce n'est le plus important, où s'affairaient 70 employés, qu'il rassembla dans une forme de syndicat, la "chapelle". Ce syndicat produisait un livre de revendications très utile pour comprendre le travail de l'époque.

En avance sur son temps sur le plan social, Christophe Plantin l'était également à titre privé et il accueillait chez lui les grands penseurs de l'époque tel Juste Lipse, Ortelius ou Vésale, dont il imprima les oeuvres. Sa production couvrait ainsi des domaines très vastes allant de l'anatomie (le fameux De Humani Corporis Fabrica) à la géographie (le Theatrum Orbis Terrarum) en passant par les mathématiques, les oeuvres de Cicéron en petit format ou les fables d'Esope.

La page de titre de la Bible polyglotte de Plantin.
Les animaux symbolisait probablement l'unité de la Chrétienté

Mais la grande oeuvre de sa vie se jouera sur un autre front, la religion, avec sa fameuse bible polyglotte produite pour Philippe II, imprimée entre juillet 1568 et le 31 mai 1572, et proposée en 8 volumes in-folio. Le projet, qui sera examiné  par l'Inquisition consiste à imprimer le texte en 5 langues, le latin, l'hébreu, le syriaque, le grec et l'araméen, ce qui nécessite notamment des caractères d'imprimerie dans chacune de ces langues, les poinçons nécessaire aux matrices lui seront fournis par l'imprimeur français Garamond.

Le travail pris plusieurs années et occupa jusqu'à 13 presse et 60 ouvriers. La relecture fût confiée à plusieurs linguistes, sous la supervision d'Arias Montanus, et l'histoire veut que la fille adolescente de Plantin elle-même relisait les textes, sans toutefois en comprendre un seul mot. Compte-tenu du format, on ne pouvait imprimer que deux pages à la fois, mais finalement le résultat fût superbe et Plantin se vît récompenser par le titre de proto-typographe, charge lucrative, puisqu'elle était assortie d'un monopole de l'édition d'ouvrages liturgiques. 


La bible elle même fût tirée à près de 1000 exemplaires qui devinrent vite rares et recherchéss... et ce d'autant plus qu'un grand nombre d'entre eux furent perdus en mer lors d'un voyage en Espagne.

Christophe Plantin a utilisé trois marques distinctes. La troisième et la plus célèbre, qu'il utilise à partir de 1564, fait référence au nom de son imprimerie Au Compas d'Or. 

 

Il utilise cette marque avec des encadrements différents pour différencier ces différentes collections. Cette marque est toujours accompagnée de sa devise : Labore et Constantia (« Par le travail et par la Persévérance »).


Plantin, à l’instar de Robert Estienne, exposait devant sa porte ses épreuves en promettant une récompense à ceux qui y découvriraient quelque fautes.

H

10 commentaires:

  1. Il me semblait que c'était d'archi-typographe dont il obtint le titre?
    Bonne soirée,
    Olivier

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  2. Tout le monde en parle,mais personne ne l'a lue : la "Bible polyglotte" de Plantin fut imprimée en 4 langues et non 5 : hébreu, chaldéen, latin et grec.Elle fut tirée à 1200 exemplaires pour le commerce et 12 exemplaires sur vélin pour le roi d'Espagne. A l'issue de cette realisation, il fut honoré du titre d'architypographe du roi et obtint le monopole très lucratif de la vente de livres liturgiques en Espagne et dans ses colonies.
    Précision plus qu'anecdotique :il abandonna la reliure pour la typographie en 1555, après avoir reçu un coup d'épée dans l'épaule.

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  3. L'inscription sur le monument funèbre de Plantin, composée par son contemporain Juste Lipse indique qu'il naquit en Touraine.
    Les registres paroissiaux du début du XVIe siècle n'existent plus.
    Jean de La Caille le fait naître, sans apporter de preuve, à Montlouis-sur-Loire.
    D'autres le font naître à Saint-Avertin.
    Le petit-fils de Plantin indique, sans preuve, Chitré, sur la Vienne (nous ne sommes plus en Touraine, mais en Poitou).
    L'épitaphe de Juste Lipse indique que Plantin naquit en 1514.C'est aussi la date fournie par son portrait gravé en 1588 par Jean Wiericx.
    La conviction sans preuve du petit-fils de Plantin qui pense que son grand-père est né en mai 1520 nous laisse songeur.Peut-être plus convaincante serait l'inscription sur un portrait de Plantin : "Anno 1584 aetatis 64".
    Ses deux premières marques d'imprimeur, gravées sur bois par Arnaud Nicolai, évoquent le souvenir de son enfance tourangelle en présentant une vigne enlaçant un orme.

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  4. Plantin est un grand imprimeur, certes. S’il passait ses commandes de poinçons à Garamond, l’histoire ne dit pas d’où venaient ses papiers qui sont presque toujours détestables. Si je n’ai pas rassemblé plus d’impressions de Plantin, c’est à cause de cette mauvaise qualité du papier qui n’a pas résisté au temps: 9 fois sur 10 les pages sont uniformément brunies, ce qui ne permet plus d’apprécier la netteté des types ou des gravures.

    T

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  5. Pourtant, Mercator, pour ses cartes, achetait son papier à Plantin, pour sa qualité supérieure à celle des autres.
    Plantin achetait son papier à Anvers ou surtout en France (Troyes, Lyon, La Rochelle).

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  6. Cher Jean-Paul,

    Vous devriez contacter le Musée Plantin, qui signale que la Bible (de Plantin) est en 5 langues, à plusieurs endroits, et les mettre à l'amende.

    On peut douter qu'ils l'aient lue (on se parle de la Bible, tout le monde connaît la fin), mais moins qu'ils l'aient vue, ou regardée. Pour eux donc, 5 langues.

    Benoît

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  7. Quatre langues, plus pour le Nouveau Testament la version en syriaque (dixit Dom Calmet, Dictionnaire Historique... de la Bible, article "Polyglotte"). Dryocolaptès

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  8. Ok, pas 5, 4 + 1 donc... Tu as raison Jean-Paul, tout le monde en parle, mais personne ne l'a lue.

    Je vais me caler sur le discours du Musée Plantin, ce qui me semble être légitime.

    Hugues

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  9. Je précise que ma remarque visait juste à rectifier (s'il y a lieu) le "proto-typographe" du texte d'Hugues.

    Allez bonne soirée!
    Olivier

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  10. Je ne voudrais pas couper les cheveux en quatre, mais il serait tout de même plus précis de parler de la Bible pentaglotte.
    T

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