vendredi 10 avril 2015

Belles étiquettes de grands relieurs du 17e et du 18e siècles: Derome, Roffet, Douceur, Vente, Fétil, Le Monnier...

Amis Bibliophiles bonjour,

Quelques images tirées de l'ouvrage d'Octave Uzanne, The French Bookbinders of the 18th century, les très intéressantes étiquettes de quelques relieurs du 17ème et du 18ème: Roffet, Derome, Douceur, Vente, Fétil et Le Monnier. 
 
Etienne Roffet est le fils de Pierre Roffet, dit Le Faucheur, est un relieur français. Il était établi tout au commencement du XVIe siècle, ainsi qu'il résulte de l'ordonnance qui suit, faisant partie de la collection A. Bonnardot, vendue par M. Claudin le 23 mars 1886 :

« De par le Provost des marchans et eschevins de la ville de Paris. Philippe Macé, receveur du domaine de la ditte ville, baillez et payez à Pierre Rouffet, relieur de livres à Paris, la somme de soixante solz parisis que ce jourd'hui avons ordonnée et ordonnons par ces présentes, pour avoir de nos ordonnances, tympanisé, blanchy, colé, relyé, doré, jaulny et couvert de cuyr neuf les deux livres d'ordonnances royaulx de la prevoste des marchans et eschevins d'icelle ville qui estoient vielz, descouvers et mal relyés, et auxdits deux livres mis et fourny de fermeture, et à chacun d'iceulx adjusté trois cayerz de parchemin blanc, iceulz réglés, l'un desquelz livres servant en l'auditoire de l'Ostel de la dite ville et l'autre au Greffe d'icelle. Et rapportant ces présentes et quittances dudit Rouffet, la dite somme de soixante solz parisis sera allouée en vos comptes, etc. etc., le vendredi vingt-deuxième jour daoûst mil cinq cens et onze. » Signé de Montmirel, J. Croquet, G. Souchay, Disomé, Hesselin. — Suivait la quittance de Pierre Rouffet. ".
 
Ce relieur était de plus libraire, et avait pour enseigne un Faucheur, d'où lui vint son surnom, que portèrent aussi ses descendants. Il demeurait rue Neuve-Notre-Dame à Paris, devant l'église Sainte-Geneviève-des-Ardents, et édita un grand nombre d'ouvrages. Selon La Caille :

« la veuve Nicole Vostre imprima pour Pierre Roffet, Simon Hadrot et Nicolas Prévost, le Diurnal à l'usage des RR. PP. Celestins, in-24 rouge et noir, en 1528; Breviarium adusum Cœlestinorum, in-8°, et plusieurs autres usages rouge et noir. »

Il réalisa des reliures pour François Ier, de facture simple, en cuir et maroquin noir. Il publia aussi Larbre de lame de Hugues de Saint-Victor, et Geoffroy Tory imprima pour lui : Jean Marot de Caen sur les deux heureux voyages de Gênes et de Venise, etc., en 1532; le Recueil de Jehan Marot, poète et escripvain de la magnanime Reyne Anne de Bretagne ; puis, la même année, L’Adolescence Clémentine de Clément Marot. Pierre Roffet dut mourir en 1533, car le privilège de la La Suite de l’Adolescence Clémentine fut donné pour trois ans, en 1534, au nom de sa veuve, qui paraît avoir continué la maison de son mari.
 
 
Nicolas-Denis Derome, dit « Derome le Jeune », ou le « phénix », est né le 1er octobre 1731. C’est le sixième fils de Jacques-Antoine. Il a pu profiter de l’enseignement de son père jusqu’à ses 29 ans, mais aussi de celui de ses deux frères aînés, Nicolas et Charles, tous deux maîtres relieurs doreurs comme leur père, et qui habitaient la même maison de la rue Saint-Jacques. 

Même s’il n’a pas encore été reçu maître, il ne le sera que le 31 mars 1761, il prend la succession de son père à son décès, dès 1760, mais, surtout, il signe dès cette même année ses reliures d’une étiquette qui porte : « Relié par DEROME, dit le jeune, établi en 1760, rue St jacques près le collège du plessis n°65 ».
 
Pour éviter la confusion avec son frère aîné, qui se prénomme également Nicolas, Nicolas-Denis se fait appeler « Derome le Jeune », comme l’avait déjà fait un autre grand relieur du siècle, son confrère Antoine-Michel Padeloup. 
 

Rapidement, sa renommée est immense et il est réputé tant pour ses talents de relieur que pour le raffinement de ses dorures. Il disait ainsi du corps d’ouvrage de ses volumes que c’est « la couture et l’endossure qui font le tact de la reliure ». Côté dorure, il perpétua la tradition familiale en livrant des mosaïques remarquables, avec des variantes à compartiments, mais ce sont ses dentelles aux petits fers qui firent sa gloire, notamment les célèbres « dentelles à l’oiseau ». Elles furent jugées plus fines que celles de Padeloup, dont il acheta d’ailleurs une partie des outils après son décès. 
 
A partir de 1780, Nicolas-Denis revînt à plus de sobriété et proposa des décors à chaînettes, d’inspiration anglaise. Néanmoins, l’irrégularité de la qualité des dorures issues de l’atelier de Nicolas-Denis Derome suggère que, face à l’afflux de commandes, le «phénix» employa plusieurs doreurs, voire sous-traita une partie de l’activité. Ainsi trouve-t-on, dans son inventaire après décès, près de 1035 fers et 12 alphabets, et, dans celui du doreur Germain-Antoine Cros, une dette active de la part de « Derome le Jeune » ainsi qu’un compte en cours avec lui pour travaux.
 
Nicolas-Denis, dit « Derome le Jeune » décéda le 28 février 1790 et, si son atelier fût repris par un membre de la famille Bradel, il ne survécut pas à la disparition du talentueux «phénix».
 
Si vous aimez les Derome, je leur ai consacré une petite étude: http://bibliophilie.blogspot.fr/2013/01/portrait-dune-grande-famille-de.html




Jean-Charles-Henri Lemonnier (1736? - 1776?)
 
Relieur français ayant exercé à Paris, en activité de 1757 à 1776 environ
Reçu maître le 9 mai 1757. Cité comme Relieur ordinaire du duc d'Orléans en 1759. Élu Garde de la Communauté le 10 mai 1769, il a assisté René-Martin Dudin dans la rédaction de son Art du Relieur doreur de livres, publié en 1772. Connu essentiellement pour la réalisation de reliures mosaïquées, au moins pour partie en association avec son père, il a aussi exécuté des décors à la dentelle.
 
Louis Douceur (? - 1769) est un relieur français actif entre 1721 et 1766. Son atelier était situé à Paris, rue d'Ecosse puis rue du Mont-Saint-Hilaire.
 
Libraire et relieur. Reçu maître le 14 octobre 1721. Garde du 11 septembre 1737 au 10 juin 1739. Il est connu par la réalisation de reliures à décor à la dentelle portant son étiquette, et tout particulièrement celles exécutées sur les exemplaires de luxe des Fables de La Fontaine publiées de 1755 à 1759, illustrées d'après les dessins de Jean-Baptiste Oudry, pour lesquels des fers animaliers furent spécialement gravés. Il a aussi exécuté quelques reliures à décor mosaïqué.
 
 
 
René-François Fétil  (172.-1799?) et un relieur français. Il exerça aussi l'activité de libraire.
 
D'une famille de relieurs, il aurait été apprenti du relieur parisien Antoine-Michel Padeloup. Reçu maître relieur le 1er août 1748. Gendre du relieur François Montgobert. Garde de sa communauté en 1762-1763. Accusé par la communauté des libraires de vendre des livres, il fait l'objet d'une saisie. Reçu libraire non juré le 4 oct. 1767. Publie le "Nouveau Spectateur" en 1775. Tient cabinet de lecture et "magasin de livres dépareillés" à réassortir. Publie plusieurs catalogues de sa librairie, de 1776 à 1791 au moins. N'est plus attesté entre fin 1791 et l'an VI (1797-1798)

 
Pierre Vente (1722-179.) est un libraire et relieur français.
 
Libraire ; libraire (-relieur et doreur) des Menus-Plaisirs (de la Chambre) du Roi (et des spectacles de Sa Majesté) (1753). - Fils d'un mercier de Verneuil-sur-Avre (Eure). Garçon relieur à Paris, il est embastillé pour vente de livres érotiques entre mai 1748 et mars 1750.
 
Nommé relieur des Menus-Plaisirs du Roi par brevet de déc. 1753, il est autorisé à vendre des pièces de théâtre aux heures des spectacles aux Comédies française et italienne (brevet du 1er avril 1758) malgré les protestations de la communauté des libraires et imprimeurs de Paris. N'est reçu officiellement libraire que le 17 mai 1764 après un apprentissage fictif commencé en mars 1762 et en vertu d'un arrêt du Conseil du 16 avril 1764. Reçu maire royal de Verneuil avant 1775. Exerce encore en 1792. Veuve attestée en 1794.
 
 
Léon Gruel disait de Pierre Vente qu'il "était un relieur de second mérite.... Il avait seul la fourniture de reliure des livres choraux liturgiques, de la musique de ballets et des comédies françaises et italiennes à l’usage de la cour, dont la plus grande partie se trouve encore actuellement à la bibliothèque de Versailles. Ce fut surtout un intrigant qui sut faire son chemin."


H

6 commentaires:

  1. très intéressant. Est-ce qu'on sait si ces étiquettes sont fréquentes ? en d'autres termes, a-t-on une idée de la proportion de reliures attribuées à un de ces relieurs, et ne présentant pas d'étiquette ?

    RépondreSupprimer
  2. Aucun commentaire sur les marques typographiques ou les étiquettes de relieurs !
    Comme quoi les vrais sujets bibliophiles intéressent moins ou en tous génèrent moins de commentaires que ceux sur le marché du livre ancien ( plus ou moins) et ses avatars. Symptomatique !
    Bravo pour ces deux derniers articles.

    Patrick C.

    RépondreSupprimer
  3. Eh oui, c'est la remarque que je faisais au maître de ces lieux. Nous devrions être moins paresseux et au moins écrire un petit commentaire de remerciement, voire de félicitations, pour chaque article, même et surtout quand il n'y a pas de polémique, mais seulement du boulot et de l'érudition !
    J'essaie d'ailleurs de le faire à chaque fois.
    Dont acte : merci pour ce billet sur les marques de relieurs !

    RépondreSupprimer
  4. Ce commentaire a été supprimé par l'auteur.

    RépondreSupprimer
  5. Padeloup collait systématiquement des étiquettes sur certains ouvrages, Il en a collé pratiquement sur tous les exemplaires des fêtes de Strasbourg de Weiss, qu'ils furent reliés en veau, en maroquin, ou en maroquin avec larges dentelles, et ses étiquettes étaient collées en bas de la page de titre et non sur la reliure. Je ne sais pas s’il y a eu des statistiques sur les fréquences de présence des étiquettes des autres relieurs ? En fait il faudrait au moins deux stats : les reliures où il y a des étiquettes, où le nom est doré en pied mais qui ne sont pas du relieur ! Surtout pour Derome qui fut d'une grande célébrité de son temps ; et vu la coquinerie avérée des bibliophiles, des libraires et des relieurs depuis deux siècles ;)) et une pour les reliures qui sont du relieur et où il n'y a pas d'étiquettes ?

    Merci bien sûr pour ces articles, retour aux fondamentaux de la bibliophilie, quoi que la bibliofolie fusse bien amusante parfois.

    Daniel B.

    RépondreSupprimer
  6. Padeloup collait systématiquement des étiquettes sur certains ouvrages, Il en a collé pratiquement sur tous les exemplaires des fêtes de Strasbourg de Weiss, qu'ils furent reliés en veau, en maroquin, ou en maroquin avec larges dentelles, et ses étiquettes étaient collées en bas de la page de titre et non sur la reliure. Je ne sais pas s’il y a eu des statistiques sur les fréquences de présence des étiquettes des autres relieurs ? En fait il faudrait au moins deux stats : les reliures où il y a des étiquettes, où le nom est doré en pied mais qui ne sont pas du relieur ! Surtout pour Derome qui fut d'une grande célébrité de son temps ; et vu la coquinerie avérée des bibliophiles, des libraires et des relieurs depuis deux siècles ;)) et une pour les reliures qui sont du relieur et où il n'y a pas d'étiquettes ?

    Merci bien sûr pour ces articles, retour aux fondamentaux de la bibliophilie, quoi que la bibliofolie fusse bien amusante parfois.

    Daniel B.

    RépondreSupprimer