Amis Bibliophiles bonjour,
Le but de ces quelques lignes est
d’aborder du point de vue du collectionneur (mordu) le vampirisme dans
l’histoire et dans la littérature, jusqu’au 19ème. Pour les ouvrages traduits à
l’époque, je ne m’intéresse qu’à l’eo française.
Mais beaucoup de textes ne
sont pas dans ce cas. Ma motivation étant de partager des connaissances
bibliographiques, je vais éviter de m’attarder sur
ce qui est déjà bien connu. J’ai cherché par ailleurs à présenter un
historique du vampire, afin de replacer les livres dans leur contexte. Je me
contente pour cela de résumer ou de citer les auteurs que j’ai lus,
essentiellement Antoine Faivre, dont les livres sont facilement accessibles. A.
Faivre est aussi l’auteur d’une précieuse “Bibliographie
des vampires (1679-1807), dans: “Colloque
de Cerisy , Les vampires”
(1993).
Il y a un assez bon nombre de
publications anciennes consacrant des pages aux
vampires ou à des phénomènes
apparentés (brièvement: revues
médicales autour de 1732, commentaires de contemporains, récits de voyages -Tournefort (tome 1,
pp131-136), le père François Richard en 1667 (plusieurs pages in “Relation de
ce qui s’est passé...Sant-Erini..”), Fortis, Pashley.., et autour de vingt monographies). On peut aller voir le blog
magia posthuma: http://magiaposthuma.blogspot.fr/
Curieusement, dans les catalogues
de vente des grandes collections de sciences occultes (en tout cas pour Guaita, Bechtel, Lambert,
Max, Garçon), il n’y a aucun titre sur le sujet (en dehors du classique Calmet
et aussi, pour Guaita, de deux exemplaires de “Histoire des vampires et des
spectres..…,1820”, qui n’est pas un titre important, quoique désirable).
Pourtant on y trouve des livres importants sur la lycanthropie, sujet très
différent il est vrai, mais quand même apparenté; je crois en effet que quand
on aime l’un, on est susceptible d’aimer l’autre puisqu’il s’agit dans les deux
cas de “créatures fantastiques” tenant des places très à part et assez
semblables dans l’imaginaire humain, s’attaquant toutes deux aux personnes de
leur entourage. Enfin, selon certaines croyances, le loup garou devient un
vampire après sa mort (cf par exemple: Sophie Bridier: Le cauchemar. Etude
d’une figure mythique, p 66). Le vampire serait-il pourtant moins crédible que
le loup garou? Le vampire est en tout
cas bien moins en lien avec la sorcellerie que le loup garou.
Il est sorti en 1975 et 1981 deux
catalogues de la librairie BMCF
-Antiquariat (le deuxième avec la librairie Rainer G. Feucht)- qu’on trouve sur
les sites de libraires-, consacrés aux vampires. Le premier comportait 202
titres et l’autre 272. Malheureusement, ils étaient très peu fournis en
éditions anciennes importantes: le livre de Rohr sur la mastication des
morts ne figurait pas et de même pour Magia
posthuma, mais il est vrai qu’ils sont extrêmement rares. Il y avait par contre
une reliure contenant 7 monographies d’une très grande rareté et l’édition de
1734 du Ranft. Mais c’est tout pour les livres anciens attrayants de qualité:
on aurait aimé voir certains livres pas si rares, comme le Mayer, le Davanzati,
ou des revues, au lieu du Calmet, qui est très bien mais très courant.
Pour ce qui est de l’histoire des
vampires: le vampire est un
“revenant en corps”: ce n’est pas un esprit dématérialisé, un fantôme. C’est un
mort, contrairement au loup garou. Il revient voir ses proches, et ceux-ci
peuvent en mourir et devenir à leur tour vampires, d’où la nécessité
d’éradiquer le problème (pieu dans le coeur, décapitation du cadavre exhumé,
crémation…pratiques non spécifiques au vampirisme, et appliquées déjà
antérieurement à d’autres morts susceptibles de nuire aux vivants).
Après quelques “remous”: d’une
part le problème de la mastication des morts dans leur tombeau illustré par le
livre de Rohr en 1679, les numéros
de mai 1693 et février 1694 du mercure
galant discutant d’événements en Pologne et en Russie, d’autre part
l’apparition de quelques individus s’apparentant plus ou moins aux vampires:
Michael Casparek en 1718, en haute Hongrie, dont on sait peu de choses, puis Peter Poglojowitz, en Serbie, en 1725,
qui fit l’objet d’un rapport publié le 21 juillet 1725 dans le journal Das Wienerische Diarium, où selon A.
Faivre apparut d’ailleurs pour la première fois semble –t-il le fameux mot: “dergleichen personen, /: so
sic vanpiri nennen (de telles personnes que l’on appelle vanpires, sic)”,
arrive l’année 1732, la plus importante dans l’histoire des vampires.
Mais avant de poursuivre:
1- dans un numéro de Der
Europaische Niemand ..de 1719, (début:p
972) se trouve un rapport
médico-policier sur Casparek, mais surtout ce numéro possède un frontispice
représentant Casparek. Cela semble être la première représentation d’un
vampire, même si Casparek n’a pas tout à fait cette qualification aujourd’hui.
On trouve cependant mention de lui comme
vampire dans des textes du 19ème, lisibles sur internet mais on a semble-t’il
peu de renseignements le concernant. La revue, enfin, semble n’être pas trop
rare (?). De mémoire, je ne connais pas d’autre représentation de vampire au
18ème alors que l’on en trouve beaucoup d’anciennes pour les loups garous.
2- début de l’article du mercure galant de mai (may)1693,
avec orthographe modernisée et quelques coupes: “Vous avez peut-être entendu
déjà parler d’une chose fort extraordinaire qui se trouve en Pologne et
principalement en Russie. Ce sont des Corps morts que l’on appelle en latin
striges et en latin Upierz et qui ont une certaine humeur que le commun peuple
et plusieurs personnes savantes assurent être du sang. On dit que le démon tire
ce sang du corps d’une personne vivante ou de quelques bestiaux et qu’il le
porte dans un corps mort, parce qu’on prétend que le démon sort de ce cadavre
en de certains temps depuis minuit jusqu’à minuit après quoi il y retourne et y
met le sang qu’il a amassé….Ce même cadavre ressent une faim qui lui fait
manger les linges où il est enseveli et en effet on le trouve dans sa bouche.
Le démon qui sort du cadavre va troubler la nuit ceux avec qui le mort a eu le
plus de familiarité pendant sa vie et leur fait beaucoup de peine dans le temps
qu’ils dorment (...) suçant leur sang (...) meurent l’un après l’autre…”
Je reprends: jusqu’à
cette année 1732, le vampire est peu présent dans les textes, les
conversations, mais dans le village de Medwegya, en Serbie, dans les dernières
semaines de 1731 des habitants se plaignent d’être molestés par des vampires.
La Serbie étant à ce moment rattachée à l’administration autrichienne, de vrais
moyens sont mis en oeuvre pour
traiter la situation et un rapport est
rédigé par un “chirurgien” militaire, Flückinger: le Visum et Repertum. Ce
rapport, qui détaille l’état des corps exhumés et leur décapitation puis leur
crémation enflamme les imaginations par
le fait qu’il est sobre, descriptif, détaillé et clair. Il sera diffusé la même
année par l’intermédiaire des gazettes dans les pays européens. Ce sera d’abord par le glaneur historique..imprimé à La Haye (3 numéros en tout), le
mercure de France (mai 1732) etc. Ces articles produiront pour les mêmes
raisons un effet considérable (cf le livre de Calmet, qui vient d’ailleurs
bien longtemps après les événements, les
commentaires très moqueurs de Voltaire, les tentatives rationnelles
d’explication du phénomène dans l’édition de 1737 des lettres juives de Boyer d’Argens -la lettre 125 (6ème volume) qui y est consacrée, est assez longue,
intéressante et reproduit intégralement l’article du mercure historique de 1736
et le premier papier du Glaneur -etc). A partir de 1738, c’est dans la lettre
137 et non plus 125 qu’on trouve ce texte (cf Daniela Soloviova-Horville: Les
vampires du folklore slave à la littérature occidentale -livre de référence)
Au sujet des raisons du grand
impact qu’ont eus les événements de Serbie en Europe, Antoine Faivre insiste
sur le rattachement de la Serbie à l’administration autrichienne, et sur le
rôle des gazettes.
Voici d’ailleurs le début de
l’article du 3 mars 1732 du glaneur historique (n° xviii), qui était très lu à
la cour. Il s’agit du tout premier article publié en France; il contient une
adaptation du rapport Flückinger et est intitulé: “question physique sur une
espèce de prodige dûment attesté”. Il est assez long (3 pages et demi) et est
placé au début du numéro:
“Dans un certain canton de la Hongrie, nommé en latin Oppida Heidonum, c’est à dire, entre cette rivière qui arrose le fortuné terroir de Tockay et la Transilvanie, le peuple, connu sous le nom de heyduque, croit que certains morts, qu’ils nomment vampires, sucent tout le sang des vivants, en sorte que ceux ci s’exténuent à vue d’oeil, au lieu que les cadavres, comme des sangsues, se remplissent de sang en telle abondance qu’on le voit sortir par tous les conduits et même par les pores. Cette opinion vient d’être confirmée par plusieurs faits dont il semble qu’on ne peut douter vu la qualité des témoins qui les ont certifiés (...) Il y a environ cinq ans qu’un certain heyduque, habitant de Medreyga, nommé Arnold Paule fut écrasé par la chute d’un chariot de foin. Trente jours après sa mort, quatre personnes moururent assez subitement de la même manière que meurent, suivant la tradition du pays ceux qui sont molestés des vampires (...) Le Hadnagy, ou Baillif du lieu, en présence de qui se fit l’exhumation et qui était un homme expert dans le vampirisme, fit enfoncer, suivant la coutume , dans le coeur de ce défunt, Arnold Paule, un pieu fort aigu, dont on lui traversa le corps de part en part; ce qui lui fit, dit-on, jeter un cri effroyable, comme s’il eût été en vie. Cette expédition faite, on lui coupa la tête et on brûla tout, après quoi on jeta les cendres dans la fosse……”
“Dans un certain canton de la Hongrie, nommé en latin Oppida Heidonum, c’est à dire, entre cette rivière qui arrose le fortuné terroir de Tockay et la Transilvanie, le peuple, connu sous le nom de heyduque, croit que certains morts, qu’ils nomment vampires, sucent tout le sang des vivants, en sorte que ceux ci s’exténuent à vue d’oeil, au lieu que les cadavres, comme des sangsues, se remplissent de sang en telle abondance qu’on le voit sortir par tous les conduits et même par les pores. Cette opinion vient d’être confirmée par plusieurs faits dont il semble qu’on ne peut douter vu la qualité des témoins qui les ont certifiés (...) Il y a environ cinq ans qu’un certain heyduque, habitant de Medreyga, nommé Arnold Paule fut écrasé par la chute d’un chariot de foin. Trente jours après sa mort, quatre personnes moururent assez subitement de la même manière que meurent, suivant la tradition du pays ceux qui sont molestés des vampires (...) Le Hadnagy, ou Baillif du lieu, en présence de qui se fit l’exhumation et qui était un homme expert dans le vampirisme, fit enfoncer, suivant la coutume , dans le coeur de ce défunt, Arnold Paule, un pieu fort aigu, dont on lui traversa le corps de part en part; ce qui lui fit, dit-on, jeter un cri effroyable, comme s’il eût été en vie. Cette expédition faite, on lui coupa la tête et on brûla tout, après quoi on jeta les cendres dans la fosse……”
Il y aura deux autres articles: le 17 mars
1732 (n° xxv) puis le 23 avril 1733, un dernier article assez long où on
montrera cette fois beaucoup de scepticisme, via une argumentation scientifique sérieuse (n° ix, supplément au glaneur). Cette revue
se trouve assez difficilement.
Au plus fort des événements de
1732 sont apparus beaucoup de textes qu’on trouve en allemand ou en latin (mais
pas en français): des articles dans des revues scientifiques - par exemple le Commercium litterarium publie 18
articles “en direct” en 1732, à partir de mars (on trouve cette revue reliée en
semestres ou années; elle ne semble pas trop rare )-, des monographies plus ou
moins “alambiquées” et évidemment souvent dépourvues de logique. Elles sont
toutes extrêmement rares. L’article d’Antoine Faivre du colloque de Cerisy les
décrit et selon lui, on y trouve trois types de tentatives d’explication du
phénomène: rationaliste, théologique,et
ésotérique. Mais il serait trop long ici de résumer tout cela
Ci-dessous: le commercium litterarium
et 3 monographies de 1732:
Très rapidement (au bout d’un an
ou deux), on finit par ne plus guère parler des vampires, sauf de façon un peu
épisodique (notamment: mercure historique d’octobre 1736 (pp
403-411) , d’avril et mai 1755 (p 284,
pp 356-357), certains récits de voyage,
rapport commandé par l’impératrice Marie Thérèse au médecin Van Swieten
suite à des exhumations de corps soupçonnés de vampirisme, mercure étranger de juillet 1758, la “Dissertazione
sopra i vampiri”, par l’archevêque italien Davanzati, écrite en 1738 (ou
vers 1738?) et ayant d’abord circulé sous forme de manuscrits avant d’être
publiée de façon posthume en 1774 et rééditée en 1789 par son neveu qui fit une synthèse à partir de tous les
exemplaires qu’il trouva. En effet, on n’en trouvait pas deux identiques. Je ne
connais aucune traduction française de ce texte, ancienne ou récente)
Ci-dessous, notamment: un des manuscrits du Davanzati et l’eo, un
extrait du London Magazine de mai 1737:
Pour terminer avec l’histoire des
vampires:
1- concernant Van Swieten: il y a une traduction italienne
de son rapport, écrit à l’origine en français et en allemand: Considerazione intorno alla pretesa magia
postuma per servire alla storia de' vampiri, Napoli, 1781 (lisible via
google) et une édition allemande, en 1768, qui se trouve à la fin d’un livre
signé Mayer: Abhandlung des Daseyns der
Gespenster nebst einem Anhange vom Vampyrismus. Elle possède une pagination
séparée mais fait bien partie du livre. Elle ne semble pas trop rare. Une
édition en français : “Rapport médical sur les vampires” (Naples, 1781) est
parfois mentionnée, mais je doute de son existence. Enfin, l’impératrice Marie
Thérèse a produit un décret en 1755 pour interdire l’exhumation des corps et
les profanations s’ensuivant, mais je ne
sais pas s’il existe sous forme imprimée.
2- voici presque
intégralement l’article d’avril 1755 du mercure historique, qui est intéressant
pour l’évolution du phénomène : “Des
lettres venues de la Haute Silésie nous ont annoncé la reproduction de la
superstitieuse folie des vampires ou Sang-Sues qui selon les avis de ces
quartiers là et de la Pologne faisaient tant de ravages il y a environ 30 ans
mais dont on n’a plus entendu parler depuis. Une femme connue sous le titre de
Doctoresse Tiroline, étant morte il y a 28 à 30 mois à Hermsdorff dans le
voisinage de Troppau, avait prié son
mari de lui couper la tête aussitôt qu’elle serait expirée et de ne point faire
entrer son corps au cimetière des Catho. Rom. Depuis son décès plusieurs
personnes sont mortes d’exténuation, ce qui après bien des conjectures a
rappelé le souvenir des vampires. Aussitôt on a déterré une trentaine de corps
suspects (...) Dix ont été trouvé innocents. On les a rendus à leur Sepulchres;
mais 20 autres, parmi lesquels s’est trouvé un enfant, avaient du sang dans les
veines, quoiqu’ils eussent été enterrés depuis un ou deux ans (...) déclarés
vampires (...) tête tranchée, le coeur percé et le corps réduit en cendres….”
Les numéros du mercure historique
ne sont pas très rares; on les trouve souvent reliés par semestres, pas très
chers.
3- il existerait une ou deux
publications du 17ème, des sortes de canards, dont on m’a parlé et où
apparaît le mot “vanpir”ou “vanpyr..”. Mais c’est peut-être une pure invention,
je ne le sais pas.
Ci-dessous: le mercure historique de mai 1755. Je crois n’avoir jamais
vu ces numéros d’avril et mai 1755 mentionnés dans les livres sur les vampires.
Et de même, sauf erreur, pour le mercure étranger de juillet 1758 ou encore le
London magazine de mai 1737. C’est à force de chercher sur internet que je les
ai trouvés: il existe probablement d’autres articles comme ceux-ci.
Le vampire et la littérature:
inévitablement, celle-ci va s’emparer de ce thème porteur. La première oeuvre
serait un poème d’Ossenfelder en 1748, Der Vampir, publié dans la revue Der naturforscher. Eine physikalische
Wochenschrift, qui publiait aussi des articles scientifiques aux côtés de
poèmes inspirés par des histoires de revenants, selon A. Faivre.. De façon
fugace, on trouve aussi quelques lignes (2 ou 3) sur le sujet dans le roman “Les morlaques”, publié à très peu
d’exemplaires en 1788 par Justine Wynne (“Dieu nous aide nous sommes perdus
voici un vampir. Sauvons-nous, il va se jeter sur nous et sucer notre sang!
s’écrie soudain…”, p 193)
Le mot vampire apparaît
aussi dans “Le manuscrit trouvé à
Saragosse” mais là encore c’est très anecdotique. Enfin, concernant le livre de
Maturin publié en 1806: “La famille de Montorio ou la fatale vengeance”, son
deuxième chef d’oeuvre après Melmoth, Maurice Lévy, qui a consacré une vaste et
précieuse thèse au roman gothique regrette que Maturin n’ait pas fait d’un de
ses personnages (Ascanio), un vampire, car il n’en était pas loin. Mais Maturin
n’a pas fait ce choix.
Pour revenir à la poésie:
en Allemagne, Burger publie Lenore en 1774. L’eo française est tardive:
”Léonora, en 1811, chez Janet et Cotelle”,et
c’est une traduction d’une traduction anglaise. Il y aura d’autres traductions
de Lenore, dont une en 1814 (Léonore)
et aussi celle de Nerval. La fascinante phrase “les morts vont vite”, dite par
un voyageur à Jonathan Harker, dans Dracula, est tirée de ce poème.
Puis en 1797,Goethe publie La
fiancée de Corinthe, beaucoup plus proche du thème du vampire que Lenore. Il
s’inspire d’un texte ancien de Phlégon qu’on trouve page 246 dans l’édition de
1605 du livre de Pierre le Loyer: “discours et histoires des spectres, visions et apparitions des esprits...”
( http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k5545032t/f277.image ). L’eo française est en 1825 dans “Poésies de Goethe auteur de Werther traduites pour la
première fois de l’allemand par Mme E. Panckoucke”, chez Panckoucke. Ce recueil
contient aussi “Le Roi des Aulnes”. Ces deux eo ne sont pas du tout courantes
mais, visiblement, finissent par se se trouver.
Au sujet des textes anciens,
comme celui dont s’inspire Goethe: il existe un canard: “Les estranges et
admirables adventures nouvellement arrivées au baron de la Milles” (1626, chez
Pierre petit Jean, imprimeur du Roy), qui est un véritable texte littéraire
dans lequel évolue une créature des tombeaux. Ce canard est profondément
différent des autres: on n’y trouve aucune volonté d’édification du lecteur,
aucun prologue, aucune conclusion, aucune digression: c’est de bout en bout de
la pure littérature fantastique; on ne serait pas surpris de le trouver dans
une anthologie sur les morts vivants.
Il y aura d’autres poèmes que
ceux de Burger et Goethe. En 1819 est publié Le vampire, par Polidori. Il s’agit d’une nouvelle écrite suite au
fameux séjour des Shelley et de Byron en Suisse, ayant donné naissance à
Frankenstein. L’éditeur du Vampire a attribué pour des raisons commerciales la
paternité du texte à Byron, qui a vivement protesté, tout comme Nodier qui, un
peu plus tard, refusera violemment que l’éditeur Ladvocat veuille faire croire
qu’il est l’auteur de Lord Ruthwen et
les vampires -sorte de suite du Vampire. Cette nouvelle se trouve dans les
oeuvres de Byron dès 1819 mais on donne pour eo la traduction d’Henri Faber,
chez Chaumerot, en 1819, d’une
rareté presque décourageante. Il existe aussi une autre traduction en 1824 chez Masson (éditeur en 1820 de Histoires des vampires et des spectres
malfaisans avec un examen du vampirisme
, peut-être écrit par Collin de Plancy). Elle semble très très rare.
On y trouve quelques autres textes de Byron mais le titre du livre est “Le vampire”. Il existe en 1820 chez Ladvocat une sorte de tirage à part -le terme est inexact- du Vampire signé du pseudonyme Chastopalli, qui a été fourni en supplément à la 2ème édition des oeuvres de Byron, suite aux réclamations de lecteurs après la suppression du Vampire. Cette édition possède sa propre pagination, et de même pour le titre. On peut la trouver reliée avec les autres oeuvres de Byron. Il est beaucoup plus compliqué de la trouver reliée seule à l’époque. A priori il n’existe pas d’autre traduction à l’époque -tout au moins en librairie: pour les revues, je ne sais pas.
On y trouve quelques autres textes de Byron mais le titre du livre est “Le vampire”. Il existe en 1820 chez Ladvocat une sorte de tirage à part -le terme est inexact- du Vampire signé du pseudonyme Chastopalli, qui a été fourni en supplément à la 2ème édition des oeuvres de Byron, suite aux réclamations de lecteurs après la suppression du Vampire. Cette édition possède sa propre pagination, et de même pour le titre. On peut la trouver reliée avec les autres oeuvres de Byron. Il est beaucoup plus compliqué de la trouver reliée seule à l’époque. A priori il n’existe pas d’autre traduction à l’époque -tout au moins en librairie: pour les revues, je ne sais pas.
Ci-dessous, notamment: Lord Ruthwen ,une romance inspirée du Vampire
dans “Le chansonnier des graces pour 1821, une lettre violente écrite par
Nodier à Ladvocat au sujet de la paternité de Lord Ruthwen, la pièce de Nodier,
inspirée du vampire de Polidori et une affiche de théatre datant de 1827 pour “
The vampire or the bride of the isles ”, qui s’inspire de la pièce de Nodier.
De nombreux textes où il est question de vampires (vrais ou faux vampires: souvent les titres sont trompeurs…) seront publiés au 19ème; ils sont souvent introuvables, comme La vampire ou la vierge de Hongrie, réédité très récemment par la librairie d’Otrante. On peut voir des photos de l’eo sur un blog: http://www.blenders.se/ebay/me/vamp/hungaire.html
Théophile Gautier, de son côté, a
écrit “La morte amoureuse”, pré-publiée dans la chronique de Paris les 23 et 26
juin 1836 (eo dans Une larme du diable, en 1839). C’est un texte bien connu.
Par contre on connaît un peu moins la longue et intéressante nouvelle Paola
(125 pages), de Boucher de Perthes, publiée en 1832 dans le recueil
“Nouvelles”, qui se trouve relativement aisément.
Un autre texte en particulier est
très peu connu: Gemmalie, publié
anonymement en 1825 chez Ladvocat et méritant vraiment d’être lu ( http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k310773j ). Il est quasiment introuvable. Un
exemplaire figurait dans le catalogue de la librairie Loliée en 1952 consacré
aux romans noirs, contes de fées...Dans le texte, Gemmalie est une goule mais à
la fin du livre se trouve une longue note sur les vampires tendant à la lier au
vampirisme. En dehors du catalogue Loliée, qui m’a permis de connaître son
existence, ce livre n’est mentionné nulle part -sauf dans un compte rendu de
lecture de l’époque, dans la revue encyclopédique, qu’on trouve facilement via google. Grâce soit rendue au libraire
Pierre Saunier chez qui je l’ai trouvé!
Dans le domaine de la littérature
dite populaire, il y a trois très bons romans de Paul Féval, mais ne cherchant
(malheureusement!) pas du tout à faire peur…:Le chevalier ténèbre (1862, chez Dentu, pré-publié dans le musée
des familles en avril et mai 1860- facile à trouver- réédité en 1875 par Dentu
et en 1879 par Victor Palmé), La ville
vampire (1875, chez Dentu aussi et pré-publié dans le moniteur universel du
12 septembre au 25 octobre 1875); les deux eo
ne sont pas courantes mais on les trouve. Enfin, La vampire (1865), dont l’eo semble très difficile à trouver, qui
n’a pas connu de pré-publication et dont les éditions 19ème sont loin d’être
courantes -mais celle de 1891, chez Dentu, semble accessible.
De même, la baronne trépassée, de Ponson du Terrail mérite largement à mon sens
d’être lu mais l’eo (1853, Baudry) est visiblement difficile à trouver. Les
autres éditions 19ème en librairie ne se voient pas vraiment, elles non plus.
On le trouve par contre assez facilement, publié à l’époque dans des éditions
populaires (entre autre: bibliothèque pour tous chez Havard en 1857).
Deux autres de ses textes, que je
n’ai pas encore lus, appartiennent selon Alfu au genre: La femme immortelle (eo: librairie internationale, 1869, 2
volumes), L’auberge de la rue des
enfants rouges (Dentu, 1872, 2 volumes) et Les escholiers de Paris (Achille Faure, 1867). Là encore
il semble difficile de mettre la main sur ces eo prometteuses.
Cela dit, je cherche surtout sur internet et de ce fait il y a beaucoup de livres que je ne vois pas, ce qui pourrait parfois remettre en question la rareté que je leur suppose. Mais cela est surtout vrai pour les livres les moins coûteux car les autres sont plus susceptibles de passer en vente aux enchères ou d’être retrouvés sur des catalogues de libraires, via google.
Il m’arrive de tomber par hasard lors de
recherches sur internet, sur des titres du 19ème comportant le mot “vampire”:
le docteur vampire (il y a une édition en 1872, signée Octave Féré, qu’on peut
feuilleter sur internet), le baron vampire, le vampire aux yeux bleus….les uns
publiés en feuilleton, les autres en librairie. Dans certains il n’y a
absolument aucun vampire, dans d’autres, comme Le vampire du val de Grâce de Gozlan (1861, chez Dentu), il y en a un vrai et il est d’ailleurs très bien -mais
il ne joue pour ainsi dire aucun rôle, il est évoqué presque anecdotiquement -
et un faux, qui est malheureusement le
héros de l’histoire. Cette eo est difficile à trouver mais, de mon point de
vue, décevante.
Pour terminer, il faut parler de Dracula, publié en 1897. L’eo française
est chez l’édition française illustrée en 1920; elle est rare en tirage
ordinaire et celui en grand papier se limite à seulement 15 exemplaires. Le
texte y est très fortement tronqué mais cela le dynamise et en rend la lecture
palpitante. On voit aussi cette eo avec une
petite étiquette de remise en vente des éditions Crès collée sur la couverture.
Ce livre a été précédé de textes intéressants, comme Carmilla, publié par Le Fanu en 1872 mais dont il ne semble pas y avoir de traduction contemporaine (il faut, à ma connaissance, attendre 1936: Histoires de fantômes anglais, Gallimard, sauf si elle a été publiée en revue à l’époque -mais je n’en ai aucune idée). Stoker se serait inspiré de “Le capitaine vampire”, de Marie Nizet (Ghio, 1879), que je ne parviens pas à trouver..... Il existe une édition de Dracula en 1932, comportant des photos du film avec Bela Lugosi (Tallandier, cinéma bibliothèque), qui a été remise en vente (librairie contemporaine, collection “les drames du coeur”, avec une autre couverture; de plus la page de titre est supprimée ainsi que le catalogue de l’éditeur. Enfin, sur la couverture, on lit “Drahus Steker Dracula” et non plus “Brahm Stoker Dracula l’homme de la nuit”; tout le reste est absolument identique. Elle semble plus rare. Le texte est le même que celui de l’eo de 1920, avec quand même quelques changements nécessaires dûs au lien avec le film. Elles paraissent toutes deux rares mais peut-être le sembleraient-elles moins à condition de faire des recherches dans d’autres circuits que la librairie ancienne classique: plus précisément chez les libraires qui s’occupent de cinéma et qui évoluent somme toute dans un autre marché.
Dans le même ordre d’idée, j’ai découvert seulement très récemment l’existence d’une novelisation du film Nosferatu, d’aspect assez spectaculaire: le film complet du jeudi du 3/12/1925 et le film complet du dimanche du 6/12/1925. Il y a plusieurs photos et très peu de texte: On trouve souvent des années entières reliées (ou des semestres, je ne sais plus) à des prix parfois peu élevés, notamment sur les salons.
Ce livre a été précédé de textes intéressants, comme Carmilla, publié par Le Fanu en 1872 mais dont il ne semble pas y avoir de traduction contemporaine (il faut, à ma connaissance, attendre 1936: Histoires de fantômes anglais, Gallimard, sauf si elle a été publiée en revue à l’époque -mais je n’en ai aucune idée). Stoker se serait inspiré de “Le capitaine vampire”, de Marie Nizet (Ghio, 1879), que je ne parviens pas à trouver..... Il existe une édition de Dracula en 1932, comportant des photos du film avec Bela Lugosi (Tallandier, cinéma bibliothèque), qui a été remise en vente (librairie contemporaine, collection “les drames du coeur”, avec une autre couverture; de plus la page de titre est supprimée ainsi que le catalogue de l’éditeur. Enfin, sur la couverture, on lit “Drahus Steker Dracula” et non plus “Brahm Stoker Dracula l’homme de la nuit”; tout le reste est absolument identique. Elle semble plus rare. Le texte est le même que celui de l’eo de 1920, avec quand même quelques changements nécessaires dûs au lien avec le film. Elles paraissent toutes deux rares mais peut-être le sembleraient-elles moins à condition de faire des recherches dans d’autres circuits que la librairie ancienne classique: plus précisément chez les libraires qui s’occupent de cinéma et qui évoluent somme toute dans un autre marché.
Dans le même ordre d’idée, j’ai découvert seulement très récemment l’existence d’une novelisation du film Nosferatu, d’aspect assez spectaculaire: le film complet du jeudi du 3/12/1925 et le film complet du dimanche du 6/12/1925. Il y a plusieurs photos et très peu de texte: On trouve souvent des années entières reliées (ou des semestres, je ne sais plus) à des prix parfois peu élevés, notamment sur les salons.
Ci-dessous: 2 exemplaires de l’eo en tirage ordinaire de Dracula. Il
est difficile de la trouver sans mention (certainement fictive d’ailleurs) de
mille. On pourrait croire que le fait que les fonds des dessins soient de
couleurs différentes est lié à la mention de mille mais ce n’est pas le cas:
j’ai vu un exemplaire du 4ème mille avec un fond violet...Aussi: 1 cliché du
Dracula avec photos du film de Tod Browning et
Nosferatu. Enfin, pour boucler la boucle, une page de la Cosmographia
Universalis, de Munster (édition de 1575), où l’on voit un portrait de celui
qui a inspiré Stoker (“...avait nom Dracule...fort cruel...empaler beaucoup…”)
Philippe
Waouh, merci Philippe, long billet que je viens de parcourir en diagonale, lecture approfondie prévue ce soir !
RépondreSupprimerB.
Magnifique article, passionnant. J'ai ouvert de nouveau mon Calmet "Traité sur les apparitions des esprits et sur les vampires..." qui conclue assez raisonnablement : les vampires ne sont qu'illusion et l'on ne peut citer aucun témoin sérieux. Ce qui me fait penser à Robert Ambelain. Je crois qu'il a écrit un livre sur les vampires (que je n'ai pas lu). Mais j'ai une lettre amusante écrit de sa main qui évoque les phénomènes de conservation avec circulation sanguine, pour les Saints comme pour les Vampires. J'en connais qui vont se retourner dans leur tombe ! Bref tout ceci est très amusant. Et cet article: une référence.
RépondreSupprimerDiable ! les saints dont le corps ne se putréfient pas, seraient-ils des vampires ? il va falloir faire attention à Bernadette !
RépondreSupprimerExcellent article sur un sujet populaire mais pourtant assez peu abordé en bibliophilie. Un grand merci à vous!
RépondreSupprimerMerci très intéressant, je vais maintenant avoir une autre porte d'entrée pour intéresser ma fille à la bibliophilie, entre deux épisode de Chica Vampiro ;))
RépondreSupprimerDaniel B.