« Après le plaisir de posséder des livres, il n'en est guère de plus doux que celui d'en parler. » Charles Nodier

"On devient bibliophile sur le champ de bataille, au feu des achats, au contact journalier des bibliophiles, des libraires et des livres."
Henri Beraldi, 1897.

frise2

frise2

samedi 2 avril 2011

Un nouvel ouvrage de référence: Les Caractères de civilité, Typographie et calligraphie sous L'Ancien Régime, par Rémi Jimenes

Amis Bibliophiles bonjour,

C'est un réel plaisir de vous présenter l'ouvrage fraîchement paru de l'un des premiers lecteurs du blog, Rémi Jimenes. Son ouvrage Les Caractères de civilité, Typographie et calligraphie sous L'Ancien Régime, vient effectivement de paraître à éditions Atelier Perrousseaux Editeur (29,50€), et il est superbe. 


J'ai déjà eu l'occasion de le feuilleter pendant toute une soirée et j'attends avec impatience d'avoir un peu de temps pour me plonger dans ce qui me semble déjà être un nouvel ouvrage de référence sur le sujet. Mais pour vous donner une première impression, c'est vraiment très très intéressant même pour le non spécialiste que je suis. C'est très bien écrit, et on se laisse porter par l'histoire dans l'Histoire. J'aime beaucoup.

Rémi étant un fidèle du blog, il a accepté de se prêter au petit jeu de l'entretien pour les lecteurs du blog, afin de nous en dire plus sur lui, ses recherches et son ouvrage.

Rémi, quel a été ton parcours jusqu'à la parution de l'ouvrage?

Après deux années de khâgne à Orléans et une licence d'histoire, je me suis orienté vers un master en histoire du livre à Tours, au Centre d’études supérieures de la Renaissance. J’y ai consacré mon mémoire à la carrière de Charlotte Guillard, veuve des imprimeurs Berthold Rembolt et Claude Chevallon. Je poursuis aujourd’hui cette recherche en doctorat. Parallèlement je collabore au projet de numérisation des Bibliothèques Virtuelles Humanistes.

Comment l'idée de cet ouvrage a-t-elle germé?

À la fin de l’année 2009, j'ai été mis en contact avec Yves Perrousseaux, qui recherchait des photographies pour illustrer son Histoire de l'écriture typographique. Comme je m'intéressais à l’histoire de la calligraphie, il m'a demandé quelques renseignements sur le sujet, avant de me proposer la rédaction d'un livre consacré aux rapports entre typographie et calligraphie. Ce vaste sujet dépassait de loin mes modestes compétences. Cependant, depuis plusieurs années je rassemblais de la documentation sur les caractères de civilité. J’ai donc proposé à Yves d’aborder les rapports entre typographie et calligraphie à travers l’histoire de la lettre de civilité.

Mais que sont les caractères de civilité ?

Gravés par Robert Granjon en 1557, les caractères de civilité imitent la gothique cursive des secrétaires français de la Renaissance. 
Cette typographie est surtout connue pour l’utilisation qu’en ont faite les imprimeurs aux XVIIIe et XIXe siècles : le caractère ne servait plus alors qu’à imprimer des manuels de savoir-vivre et de bienséance, qui ont donné leur nom à cette typographie. Mon livre rejoint ceux d'Yves Perrousseaux dans la collection « Histoire de l'écriture typographique ». Cette collection, bien connue des amateurs comme des professionnels, rassemble des ouvrages de référence copieusement illustrés. Les derniers volumes sont tous imprimés en quadrichromie.

L'ouvrage est en effet magnifique, qu'apporte-t-il à l'histoire des caractères de civilité?

Plusieurs auteurs s'étaient auparavant intéressés à l’histoire des caractères de civilité. En 1966, Harry Carter et Hendrik Vervliet ont publié en anglais un livre entièrement consacré au sujet. Leur livre, qui recense les polices gravées à la Renaissance et étudie leurs origines, demeure une référence incontournable. Il n'était bien sûr pas question pour moi de « refaire » le Carter-Vervliet, mais d’adopter une approche différente du sujet : d'une part, en ne m'intéressant pas exclusivement au graphisme des caractères mais à leur utilisation par les imprimeurs (pour quels textes?) et à leur réception par le public (avaient-il du succès?) ; et d'autre part, en élargissant le cadre chronologique de cette enquête.

On connaît bien l’histoire de l’invention de cette typographie, mais on n’avait pas encore regardé précisément ce qu'elle devenait aux XVIIe, XVIIIe et XIXe siècles. Cet élargissement du cadre chronologique m’a permit de montrer que les caractères de civilité disparaissent totalement des presses françaises dans la seconde moitié du XVIIe siècle, pour ne réapparaître qu'en 1703 avec la publication des Règles de la Bienséance et de la Civilité chrétienne de Jean-Baptiste de La Salle. 


Il m’a alors paru intéressant d'interroger les causes de cette disparition et les raisons de la «résurrection» de cette typographie en 1703. Malgré leur apparent archaïsme, les caractères de civilité étaient employés pour des motifs pédagogiques clairement définis.

Un autre volet important de mon travail est sans doute la mise en relation de la typographie avec l’histoire de la calligraphie. La variation des modes calligraphiques en France du XVIe au XIXe siècle, le passage de l'écriture gothique à la ronde, puis de la ronde à la coulée et enfin à l'anglaise, a naturellement affecté l'utilisation des caractères de civilité qui servaient non seulement pour l’apprentissage de la lecture, mais également pour l’apprentissage de la calligraphie. J’ai ainsi volontairement profité de l’occasion pour donner quelques précisions sur l’histoire, finalement mal connue, de la calligraphie française sous l’Ancien Régime. 


Je présente également quelques modèles d’écriture tirés non pas des grands manuels d’Alais de Beaulieu, Saintomer ou Royllet, ces rolls-royce de la calligraphie, mais tirés de petites brochures rares et peu connues, celles qu’avaient précisément dans les mains les enfants des classes populaires.


Mot de la fin?

Je tiens à exprimer ma gratitude à Hendrik Vervliet, grand spécialiste de la typographie de la Renaissance et co-auteur de l’ouvrage publié en 1966, qui a jugé mon travail intéressant et y a adjoint une préface. 


Je remercie également pour leur confiance Yves Perrousseaux, David Rault et Michel Mirale, qui m’ont donné la possibilité de publier mon premier travail d’importance. Enfin, merci au Blog du Bibliophile pour le soutien qu’il apporte à ce livre.

Merci pour toutes ces informations Rémi et encore bravo pour cette superbe réalisation.

H

N.B. : j’indique à tous les lecteurs qu’ils ont la possibilité de télécharger gratuitement l’index, les addenda et errata de mon livre à l’URL suivante :
http://www.adverbum.fr/telechargements-gratuits-perrousseaux.html

5 commentaires:

Librairie L'amour qui bouquine Livres Rares | Rare Books a dit…

Ce bel ouvrage était également sur mon bureau à mon retour de la pêche. Merci Rémi ! Quel beau et bon livre ! Je reste épaté par le prix très abordable (29,50 euros) d'un livre aussi bien fait. Et après on nous dit qu'on ne peut pas faire des livres de documentation pour les bibliophiles à moins de 200 euros ! Je n'y crois pas.

B.

pascalmarty a dit…

Le livre de Rémi a l'air effectivement particulièrement alléchant. Mais si je ne méfiais pas tant des mots à la mode, j'emploierais volontiers celui d'incontournable pour qualifier ceux édités par Perrousseaux.

p.m

Anonyme a dit…

Très intéressant et agréable à lire...
Merci Rémi

Thérèse

Bergamote a dit…

Le livre de Rémi fait partie de ma bibliothèque depuis déjà quelques semaines. C'est un ouvrage magnifique, vraiment intéressant, riche en images : superbe. Et, je crois qu'on peut le dire, incontournable.

Textor a dit…

Le facteur m'a enfin apporté ce matin l'ouvrage que j'attendais tant. Superbe ! Inutile de me téléphoner ce week end, je serais plongé dans le Jimenez!
Je croyais que l'initiateur des lettres françaises d'art de main était Robert Granjon, et voilà que j'apprends que c'est le fameux Pierre Habert, dont je traquais déjà les éditions anciennes, pour d'autres raisons...

Textor

LinkWithin

Related Posts Plugin for WordPress, Blogger...