Amis Bibliophiles bonjour,
La visite du Musée de l’Imprimerie de Nantes se révèle vite un incontournable du bibliophile.
Au centre ville, le musée est installé au premier étage de la Médiathèque grâce à la bienveillance de la municipalité mais dans des locaux trop petits pour accueillir l’énorme collection de son fondateur. Trois imprimeurs permanents animent et rythment la vie du Musée. Le jour de notre venue, Monsieur Philippe Bretaudeau sera notre guide. Compositeur typographe de formation initiale, il a suivi l’évolution frénétique et numérique du métier avant d’être appelé par le fondateur du Musée.
Les après-midi il accueille les visiteurs à 14 h 30.
Le musée ouvre cependant plus tôt et vous n’aurez pas trop de temps pour parcourir les collections sous vitrine où en situation. Tout y est de ce qui participe à l’art du livre. Rangs typo du XVIIIe, matrices et poinçons, typothèque « Caslon », lingotiers, caractères affiches en buis, composteurs, fers à dorer, palettes et roulettes, presses et massicots de relieurs, presses typographiques, lithographiques ou de taille douce. Hélas, l’atelier de reliure était inerte ce jour-là.
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M. Philippe Bretaudeau et l'atelier taillle -douce |
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Rang du XVIIIe siècle et casse dite Parisienne |
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La reliure |
Le parcours guidé commence par la découverte des caractères mobiles, l’explication de la casse et l’évolution de la composition manuelle. La démonstration sur une presse à bras en bois reconstituée suit naturellement, puis celle sur une presse métallique type « Stanhope » du début du XIXe siècle, dite à un coup, où chacun pourra encrer la forme, poser sa feuille sur le tympan et tirer le barreau et son épreuve.
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Au premier plan, presse de type Stanhope |
Voici venu le temps de la composition chaude mécanique. La linotype (ici une Intertype) fond des lignes-blocs en relief pour une impression typographique, c’est une composeuse-fondeuse-distributrice. Le brevet initial de l’invention remonte à 1884. Le claquettement de la distribution des matrices dans le magasin de la machine est inoubliable mais la compréhension de leur parcours demande un peu d’attention.
La « Typograph » est une composeuse-fondeuse étrange qui semble s’être accouplée avec la corbeille d’une machine à écrire, plus adaptée aux petites unités de production. La monotype nécessite un clavier séparé et perfore une bande de papier. Dans un second temps, la fondeuse lit cette bande et produit des caractères mobiles à grande vitesse. Le niveau sonore et l’agitation de cette machine complexe sont impressionnants. Chacun tiendra bientôt entre ses doigts quelques caractères encore chauds.
La « Ludlow » est une machine mixte. La composition est manuelle, mais cette fondeuse titreuse permet de réaliser des gros corps et vient en complément des autres moyens de composition.
Les visiteurs restent éberlués de la persistance de ces machines, y compris dans la grande presse, jusque dans les années 1980. Tous se retrouvent enfin autour du marbre où je ne peux m’empêcher d’évoquer à part-moi, souvenirs personnels ou photos célèbres de l’express.
Les formes passent ensuite sur les presses modernes. Devant vous se réveille une platine « pédalette » à marge à main de marque « Minerve ». Machine universelle aux nombreuses fabrications et divers formats. Elle offre à chacun un poème en forme de calligramme typographique. Puis voici une autre presse platine à marge à main également mais électrifiée, de marque « Phœnix » souvent utilisée pour la découpe ou le gaufrage, comme aujourd’hui, à cause de sa puissance.
La mise en mouvement de la monstrueuse machine à cylindre « Voiron » reste un moment fort de la visite. Le marbre est actionné par une énorme bielle au premier rang des spectateurs et passe en va-et-vient sous un cylindre « à temps d’arrêt ». Le tirage en grand format s’effectue sous vos yeux.
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Presse à cylindre Voiron |
L’exiguïté des locaux ne nous permettra pas d’entendre les sucettes des performantes et modernes presses « Heidelberg » par exemple ; l’humanoïde et épatante platine « Ofmi » ou la robuste « KSB » cylindre.
Nous passons maintenant à l’impression lithographique, qui fait l’ornement de maints livres «modernes». Devant nous un artiste peintre parachève son œuvre. Le temps passé à l’encrage et la préparation du tirage sont indissociables de la qualité du résultat. La « bête à corne » s’anime. Nous terminons par l’impression rivale, en taille douce et ses différentes modalités. En l’espèce nous assistons au tirage d’un cuivre gravé à l’eau forte.
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Bête à corne lithographique |
Chemin faisant on nous a ainsi expliqué la différence ente les points Pica et Didot, l’importance de la justification et l’usage d’une espace, la place de l’encre grasse et non liquide dans l’imprimerie, l’usage de la pelure, l’agrément des blancs, l’indispensable repérage, la complexité de l’imposition, l’ingéniosité de l’espace-bande, la nécessité d’humidifier la pierre litho et de la sécher à froid, les savants alliages plomb-étain-antimoine, les bois de bout et les bois de fil, la taille d’épargne, etc.
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Le marbre |
Mais, me direz-vous, pourquoi ne pas préciser au lecteur ces quelques mots abscons qui émaillent votre propos ?
C’est qu’ils le font si bien à Nantes, allez-y et vivez les.
Lauverjat
Merci au Musée qui a aimablement autorisé ces photographies.
Le Musée s’adosse également à une « Société des Amis du Musée de l’imprimerie» ouverte tant aux particuliers qu’aux entreprises.
http://musee-imprimerie.com/index.html