Amis Bibliophiles Bonjour,
Il est des livres qui rejoignent nos rayonnages et dont on se dit qu'on les lira forcément, pas tout de suite certes, mais un jour sûrement. J'ai acheté il y a quelques temps cette édition de "L'Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, prototype de Rabelais, avec l'Horrible Bataille des Mouches et des Fourmis", Robinot, 1734, deux volumes in-12. En fait, j'assistais à une vente aux enchères et alors que je convoitais un autre ouvrage, je n'ai pu résister à cette curiosité (soyons totalement transparents : 200 euros, sans les frais)... ce qui s'est ensuite avéré être une bonne décision puisqu'e bien évidemment, je n'ai pas eu le livre convoité, comme souvent. Je me suis donc retrouvé avec cette curiosité entre les mains, ce "prototype de Rabelais", élégamment relié, que je me promettais de découvrir plus tard.
C'est ce qui s'est passé il y a quelques jours, j'ai enfin décidé de faire connaissance avec cet OBNI (objet bibliophilique non identifié, de moi en tout cas).
En réalité, l'auteur n'est pas Merlin Coccaie, mais Théophile Folengo (1491 - 1544), un noble italien destiné à l'Eglise et qui comme Rabelais se lancera dans l'écriture. Il va d'ailleurs quitter l'habît, enlever une jeune fille, être arrêté, dormira longtemps en prison, avant de parcourir l'Italie.
Teophile Folengo est le créateur du genre maccaronique : il publia à Venise en 1517, sous le pseudonyme de Merlo Coccaio, Baldus, un recueil de dix-sept livres de Macaronicae, où il mêle le latin, l'italien et le patois mantouan et florentin. Cette œuvre qui raconte les aventures du géant Fracasse et du fourbe Cingar, a probablement servi de source d'inspiration à François Rabelais.
Qu'est ce que le genre maccaronique? C'est en fait un genre de poésie burlesque, mêlant des mots de différentes langues, avec des mots du langage vulgaire, de l'argot modifiés et latinisés (peut-être la source d'inspiration d'Eco pour créer le sabir de Salvatore).
Il semblerait que les poèmes de Merlin Coccaie, dans lequel un certain Balde nous conte ses aventures nomades soit en fait le récit autobiographique de l'épopée de Folengo à travers l'Italie du début du 16ème siècle. Folengo ne l'a pas écrit en latin, ni même en italien, mais en "latin de cuisine", en patois, avec des mots grossiers de l'époque... ce qui donne un mélange incroyable, qui fait incontestablement penser à Pantagruel, si l'on veut, un «plat de macaroni offert au public par le cuisinier (Coccaie) Merlin.»
Et je dois vous avouer que la lecture en français (qui d'ailleurs l'a traduit?), si elle est amusante au début, s'avère vite indigeste.
Du reste, l'imprimeur nous prévient dès les premières pages : "Lecteur, voicy un prototype Rablais (sic), histoire de belle invention, autant diversifiée d'allégorie et d'heureux rencontre, que les esprits et les goûts les plus differents sauraient désirer. Ainsi qu'en une table bien couverte, chacun pourrait rechercher des viandes à son appétit... Si tu la touche du bord des lèvres seulement, la lecture ne t'en sera moins utile que facétieuse, et si tu y prends plaisir, ce sera le contentement et le salaire que j'espère de mon travail".
Une fois l'avertissement lu, il ne reste plus qu'à se lancer et à ingurgiter le plat de macaronis. Autant vous prévenir, la ponctuation est "essoufflante" et l'on passe de lancebeignet aux géants de trois brasses, de fleuves de vin aux rivières de lait, de bagarres où l'on se donne des coups de pieds si fort qu'on brise l'adversaire comme un tendre raifort, lequel se conchie très fort... (?).
Le texte se termine par l'horrible bataille des mouches et des fourmis. Au final, c'est impressionnant, foisonnant, mais cette interminable énumération comique finit pas être assez indigeste. Quoi qu'il en soit, l'évidente proximité avec Rabelais est intéressante (mon exemplaire "dort" d'ailleurs à côté des Oeuvres), et cela en fait une curiosité telle que celles que j'apprécie, vous le savez maintenant.
Enfin, la reliure aide à faire passer les multiples lourdeurs, il s'agît en effet d'un joli veau glacé de l'époque, les plats (comme les entrenerfs) sont aux armes mosaïquées de Laleu, qui fût secrétaire du Roi.
H
Il est des livres qui rejoignent nos rayonnages et dont on se dit qu'on les lira forcément, pas tout de suite certes, mais un jour sûrement. J'ai acheté il y a quelques temps cette édition de "L'Histoire maccaronique de Merlin Coccaie, prototype de Rabelais, avec l'Horrible Bataille des Mouches et des Fourmis", Robinot, 1734, deux volumes in-12. En fait, j'assistais à une vente aux enchères et alors que je convoitais un autre ouvrage, je n'ai pu résister à cette curiosité (soyons totalement transparents : 200 euros, sans les frais)... ce qui s'est ensuite avéré être une bonne décision puisqu'e bien évidemment, je n'ai pas eu le livre convoité, comme souvent. Je me suis donc retrouvé avec cette curiosité entre les mains, ce "prototype de Rabelais", élégamment relié, que je me promettais de découvrir plus tard.
C'est ce qui s'est passé il y a quelques jours, j'ai enfin décidé de faire connaissance avec cet OBNI (objet bibliophilique non identifié, de moi en tout cas).
En réalité, l'auteur n'est pas Merlin Coccaie, mais Théophile Folengo (1491 - 1544), un noble italien destiné à l'Eglise et qui comme Rabelais se lancera dans l'écriture. Il va d'ailleurs quitter l'habît, enlever une jeune fille, être arrêté, dormira longtemps en prison, avant de parcourir l'Italie.
Teophile Folengo est le créateur du genre maccaronique : il publia à Venise en 1517, sous le pseudonyme de Merlo Coccaio, Baldus, un recueil de dix-sept livres de Macaronicae, où il mêle le latin, l'italien et le patois mantouan et florentin. Cette œuvre qui raconte les aventures du géant Fracasse et du fourbe Cingar, a probablement servi de source d'inspiration à François Rabelais.
Qu'est ce que le genre maccaronique? C'est en fait un genre de poésie burlesque, mêlant des mots de différentes langues, avec des mots du langage vulgaire, de l'argot modifiés et latinisés (peut-être la source d'inspiration d'Eco pour créer le sabir de Salvatore).
Il semblerait que les poèmes de Merlin Coccaie, dans lequel un certain Balde nous conte ses aventures nomades soit en fait le récit autobiographique de l'épopée de Folengo à travers l'Italie du début du 16ème siècle. Folengo ne l'a pas écrit en latin, ni même en italien, mais en "latin de cuisine", en patois, avec des mots grossiers de l'époque... ce qui donne un mélange incroyable, qui fait incontestablement penser à Pantagruel, si l'on veut, un «plat de macaroni offert au public par le cuisinier (Coccaie) Merlin.»
Et je dois vous avouer que la lecture en français (qui d'ailleurs l'a traduit?), si elle est amusante au début, s'avère vite indigeste.
Du reste, l'imprimeur nous prévient dès les premières pages : "Lecteur, voicy un prototype Rablais (sic), histoire de belle invention, autant diversifiée d'allégorie et d'heureux rencontre, que les esprits et les goûts les plus differents sauraient désirer. Ainsi qu'en une table bien couverte, chacun pourrait rechercher des viandes à son appétit... Si tu la touche du bord des lèvres seulement, la lecture ne t'en sera moins utile que facétieuse, et si tu y prends plaisir, ce sera le contentement et le salaire que j'espère de mon travail".
Une fois l'avertissement lu, il ne reste plus qu'à se lancer et à ingurgiter le plat de macaronis. Autant vous prévenir, la ponctuation est "essoufflante" et l'on passe de lancebeignet aux géants de trois brasses, de fleuves de vin aux rivières de lait, de bagarres où l'on se donne des coups de pieds si fort qu'on brise l'adversaire comme un tendre raifort, lequel se conchie très fort... (?).
Le texte se termine par l'horrible bataille des mouches et des fourmis. Au final, c'est impressionnant, foisonnant, mais cette interminable énumération comique finit pas être assez indigeste. Quoi qu'il en soit, l'évidente proximité avec Rabelais est intéressante (mon exemplaire "dort" d'ailleurs à côté des Oeuvres), et cela en fait une curiosité telle que celles que j'apprécie, vous le savez maintenant.
Enfin, la reliure aide à faire passer les multiples lourdeurs, il s'agît en effet d'un joli veau glacé de l'époque, les plats (comme les entrenerfs) sont aux armes mosaïquées de Laleu, qui fût secrétaire du Roi.
H
1 commentaire:
Hélas, point de macaron malgré un titre aussi alléchant que prometteur...
Etrange ouvrage s'il en est.
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