« Après le plaisir de posséder des livres, il n'en est guère de plus doux que celui d'en parler. » Charles Nodier

"On devient bibliophile sur le champ de bataille, au feu des achats, au contact journalier des bibliophiles, des libraires et des livres."
Henri Beraldi, 1897.

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jeudi 3 avril 2008

Ci-gît le Livre... débat (re)

Amis Bibliophiles Bonsoir,

Je crois que nous en avons déjà débattu, et que certains ont du mal à s'y résoudre, mais au fil des jours, j'ai trouvé d'autres informations sur la disparition annoncée du livre (et donc des bibliophiles?).

Voici :

1. La première piste est celle du format pdf, qui accélèrerait le déclin du livre papier. Ainsi, dans son article du 28 mars 2008, sur ZDnet, Philippe Astor nous apprend que "l'éditeur O'Reilly, qui distribue à la fois ses livres par correspondance, et en version PDF sur son site web depuis un an, constate que les ventes des uns ne cannibalisent pas celles des autres. Le format numérique attire même de nouveaux clients."

Le plus intéressant est que "60 % des clients ont choisi le livre électronique de préférence au papier, ce qui démontre qu'il existe bel est bien un public pour les formats numériques payants ».

2. Le second constat est celui que livre Frédéric Beigbeder dans un très article que vous pourrez retrouver sur le site de lire : http://www.lire.fr/chronique.asp/idC=52222/idR=142/idG

Je trouve son point de vue très intéressant. Qu'en pensez-vous?

H

14 commentaires:

Anonyme a dit…

L'article de Beigbeder est en effet intéressant. Cependant, je crains être moins optimiste que lui quand il dit que "toute l'Histoire de la Littérature" sera facilement à portée d'e-book. Théoriquement oui puisqu'avec le temps, le nombre d'ouvrages tombant dans le domaine public ne cesse de croître. Encore faut-il que quelqu'un les numérise pour les fournir (selon quelles modalités et à quels coûts) ?
Si l'on en croit Amazon, le phénomène de Long Tail a permis d'exhumer des livres (imprimés) oubliés. Vu les coûts de la numérisation, je crains que l'accès à ces livres sous forme numérique obéisse plutôt à la bonne vielle loi de l'offre et de la demande, que l'offre ne se cantonne qu'aux livres du haut de la courbe de la longue queue...

Anonyme a dit…

Je ne crois pas à la disparition du livre (du moins dans les 50 ans), par contre il va clairement y avoir un partage, qui se profile déjà largement grâce au PDF et internet.

En clair, les documents cours et techniques/scientifiques vont passer uniquement par le numérique. Aujourd'hui, d'excellentes revues de SHS n'ont d'existence que numérique, un projet du CNRS déjà en place, prévoit que chaque chercheur puisse mettre à disposition de toute la communauté scientifique ces travaux sous forme électronique.
La révolution électronique impact déjà très largement la façon de faire ses recherches et de les faire connaitre (en guise d'exemple, pour ma thèse, un bon quart de ma documentation scientifique vient d'internet, soit de revue électronique soit de revue ayant numérisés leurs fonds qu'ils ont publiés sur des portails communs (cf. revue.org; cairn; persée)).

Bref, je pense que la tendance est claire et qu'elle ne va que s'accentuer sans pour autant toucher le domaine littéraire.

A mon avis la question principale n'est donc pas la mort improbable du livre, mais comment le numérique va bouleverser la manière d'écrire des articles et des livres de documentation. Déjà les revues électroniques adoptent un nouveau fonctionnement, les articles utilisent l'intertextualité, ne se limitent plus sur les illustrations, etc.
Mais, que va-t-il en être des livres (plus de 200 pages) scientifiques et de documentation? Le format électronique n'est pas concevable, car trop inconfortable. Les chercheurs vont-ils privilégier les articles au détriment de livres impubliables? Va t-il encore y avoir une place importante pour l'impression de SHS? Va t-on la réserver qu'aux classiques et aux très grands auteurs (tendance déjà à l'oeuvre vu la pauvreté affligeante des éditions universitaires qui demandent souvent aux auteurs de se faire "subventionner")?

Bref, à mon avis, le livre papier est pour encore longtemps le meilleur support pour la littérature et les ouvrages longs.

A.A.A

Anonyme a dit…

Je précise un peu ma pensée: je crois que les nombreux articles, tel celui de Beigbeder, nous annonçant la mort du livre, sont assez inutiles. Simplement, car pour l'instant, tout comme il y a 8 ans, lors des premiers essais d'e-book, on ne réussit pas à remplacer le livre. On y est pas. Il est absurde, dès lors, d'hurler avec les loups. Pourquoi ne pas plutôt s'attacher aux bouleversements que l'édition électronique produit déjà dans certains domaines où elle a pleinement sa place?

Sur les romans électroniques, il y a aussi cet exemple d'un écrivain américain qui a choisit de vendre son livre papier et d'offrir sur son site, à tous le monde, le livre en format PDF. Il c'est aperçu que ces ventes augmentaient. Le numérique a permis à de nouveaux lecteurs de s'intéresser à son oeuvre ; ceux qui ont aimés, ont achetés le livre papier, pour le lire de façon plus confortable.

A.A.A

Anonyme a dit…

Je ne suis pas de votre avis AAA, même si je n'ai pas de boule de cristal, je ne vois pas pourquoi le Livre, plus qu'un autre objet résisterait à l'évolution technique.

La comparaison de Beigbeder avec la musique et le cd est assez intéressante.

Le livre papier, cet objet, ne résume pas ce qu'est un Livre. Le Livre va survivre, le papier disparaître. Gageons que cela n'influera pas sur le contenu, la plupart des écrivains, que je sache n'écrivent plus avec une plume.

Finalement, la disparition du Livre n'est d'ailleurs pas un problème pour le bibliophiles... Nous étions des passionnés, nous devenons des gardiens du temple.

Max

Anonyme a dit…

Intéressant, séduisant, ce billet de Beigbeder mais faux dans son raisonnement.

D'abord lire n'est pas écouter, le confort d'écoute du mp3 est proche du Cd mais en revanche, jamais le support papier ne sera égalé par l'électronique. Ni aujourd'hui, ni demain.

Faux encore car il entretient la confusion sur ce qu'est un livre. Pour moi, un fichier pdf récupéré sur le net, imprimé chez soi, relié par des agrafes et lu le soir dans son lit, ben j'appelle ça "un livre" ou si vous voulez un "imprimé sur support papier" mais plus un e-book.

Alors les librairies vont mourrir, OK, c'est sûr, mais pas les livres. Le mp3 fait mourrir les disquaires, pas les musiciens.

Gonzalo a dit…

La question des difficultés de lecture du format électronique n'est dû qu'à un simple problème technique: le rétro-éclairage. Tant que la lumière qui permet la lecture sera diffusé depuis l'arrière du texte en direction de l'oeil (et non du texte), lire sur format électronique sera difficile. Mais ce simple problème technique ne va pas rester longtemps, et on pourra passer des heures à lire des pdf, à faire des recherche plein texte, et à promener des encyclopédies dans les rues. Tant mieux.

J'ai quand même beaucoup de mal à accepter la révolution technique... C'est comme quand des obscures innovateurs se sont mis à fondre des petits parallélépipèdes avec des lettres à l'envers dessus, et les ont mis bout à bout pour composer des textes, ont étalé de l'encre par dessus et y ont plaqué une feuille de papier... c'est censé imiter les merveilles de l'écriture manuscrite... Quel échec! Jamais leurs livres ne vaudront les nôtres, jamais le papier ne vaudra le parchemin, jamais l'encre grasse d'imprimerie ne vaudra la belle encre fluide des manuscrit, et jamais les artificiels caractères typographiques ne vaudront la spontanéité du trait de plume... quelle régression!

Anonyme a dit…

Jean-Luc,
Je ne suis pas certain de bien suivre votre conclusion :
Vous dites "Alors les librairies vont mourrir, OK, c'est sûr, mais pas les livres. Le mp3 fait mourrir les disquaires, pas les musiciens."

Si les libraires meurrent, je ne donne pas très cher des livres à terme.

Mais surtout c'est au niveau du mp3 qu'il me semble que vous vous trompez : le mp3 n'a pas fait mourrir les disquaires, c'est la grande distribution et la distribution type Fnac, Virgin, qui les a tués. Le mp3, à la limite, n'a fait que donne le coup de grâce.

En réalité, le mp3 a bien tué le support physique disque d'une part (ce qui peut faire craindre pour le livre), et simultanément, mais pour d'autres raisons (téléchargement illégal gratuit), mis en péril la création et l'édition de disques... et donc les pauvres "majors". :)

L'exemple de Radiohead, qui propose directement son livre en téléchargement, et sans passer par une major illustre bien le propos.

Mais au final, c'est certain, le mp3 aura fait beaucoup de dégâts, dont la mort du disque physique. Sur cela il ne me semble pas que l'on puisse avoir de doutes.

Etienne

Anonyme a dit…

Une question subsidiaire: la disparition du livre courant (documantation, cours...) ne risque-t-il pas de faire monter les cours des livres anciens: devant, comme plusieurs doctorants sur le site ici (je ne suis plus doctorant, mais poursuis mes recherches) partager mon budget "livres" entre bibliophilie et bibliothèque de travail, je pourrai, le jour où tous les outils de documentation seront abordables à des coûts modiques, dégager une plus grande somme pour les livres anciens.
Il me semble que cette situation, qui est, à des degrés divers, celle de beaucoup d'entre nous (remplacez: "outils de documentation" par "beaux livres", "romans", "essais") pourrait influer sur les cours du livre ancien...

Anonyme a dit…

Etienne :
Nous sommes bien d'accord. La disparition du support physique entraîne la mort de ceux dont c'était le commerce dans une logique sans appel. La dématérialisation du livre va donc entraîner la mort de ceux dont le commerce est l'objet imprimé et non simplement le contenu.

Aujourd'hui, moi et d'autres libraires, nous repensons le rapport du lecteur au livre et ce que dit Guillaumus est tout à fait juste. La psychologie du lecteur est bousculée par les innovations. Tous les contenus littéraires seront bientôt accessibles à bas prix, voire gratuitement. L'enjeu restera de faire le pont entre l'inconfort d'un écran (rétro-éclairé ou non) et l'impression de livres à la demande d'une part, le pont entre les recherches des bibliophiles et les stocks de livres anciens d'autre part.

Mais ne nous y trompons pas, nous allons vivre des boulversements majeurs dans le monde de la lecture.

Hugues a dit…

Pour répondre partiellement à Guillaumus, à mon humble niveau : il est certain que la numérisation d'outils de référence de type Brunet ou Vicaire et autres m'a permis de me délester de ces lourds volumes. Aujourd'hui, je n'utilise plus que les DVD de ces bibliographies et j'ai revendu mes livres de papier sur ebay.
Au passage, le DVD coûte 40 euros, et est bien plus ergonomique, alors que j'avais revendu mon Brunet pour 300 euros de mémoire.

Place gagnée, plus ergonomique, moins cher, beaucoup moins cher.

Hugues

Anonyme a dit…

Le support papier n'est pas eternel. Au cours de l'histoire, le support a changé et il changera encore....

Quoique le coté technique ne soit pas à dédaigner, il a son importance et ne se limite pas simplement au rétro-éclairage. Quid des BD, des ouvrages qui ne sont pas dans un format standart (photos, arts) et les livres pour enfants ?
Sur le fond, si la numérisation pouvait être un facteur permettant de faire baisser le prix des livres et permettre une diffusion plus large, ce serait un énorme progrès....
Là est le véritable enjeu, le seul d'ailleurs.

La gratuité du livre est une belle utopie, mais l'industrie du livre ne devrait pas refaire les mêmes erreurs que l'industrie du disque. Des modéles payants verront le jour, et logiquement, le prix de fabrication devrait être moindre et donc le prix des livres baisser !! Mais c'est un autre débat...

La numérisation devrait également entrainer une révolution sur la manière d'écrire et de présenter des ouvrages (illustrations, liens, statistiques mises à jour, etc, notes...)
Ce modèle commence à être mis en place dans la presse. C'est l'abandon du papier pour le numérique.
Le site de Mediapart en est un parfait exemple.

Après le support papier devrait continuer à coexister pendant quelques temps encore avec le support numérique.

Pour finir sur une petite note d'humour.
Comme le faisait dire Audiard à Jean Gabin dans "Un singe en hiver" : "Peu importe le flacon, pourvu d'avoir l'ivresse !!!".

Vincent

Anonyme a dit…

Toujours débat très intéressant que celui de la mort du livre, et auquel j'avais répondu il y a quelque temps.
Et réflexion très intéressante sur la publication d'articles en ligne, pour les scientifiques. Il y a deux semaines, je discutais avec deux de mes profs d'université des politiques éditoriales concernant les travaux scientifiques historiques, de plus en plus orientés vers les articles, plutôt que vers de gros ouvrages, difficilement commercialisables ou rentables. Il semblerait que le milieu universitaire, en tout cas historique (et donc, il semblerait, également, des sciences dures) soit passé à la mode des articles. Il n'y a qu'à voir un grand nombre de publications actuelles, qui, en dehors des publications de thèses, sont des recueils d'articles, ou encore des actes de colloque (ce qui revient au même).
Et question subsidiaire de mes directeurs: "Etes-vous allez voir ce qu'il se passait sur Jstor?" Question qui veut tout dire: l'article, par sa faible importance quantitative est parfaite pour le format informatique. Tout plus rapide, tout moins cher, etc.
Mais quid des grandes œuvres scientifiques? Actuellement, je suis en train de lire la Civilisation Matérielle de Braudel, 3 volumes de 800p chacun... Hors de question que je lise ça sur ordinateur. Déjà que la version papier est difficile à lire (pas dans la difficulté du travail intellectuel, puisque le génie de Braudel nous mâche la moitié du boulot...), je n'ose pas imaginer me faire ça, me l'infliger, aurais-je tendance à dire, sur un ordi au format pdf, avec impossibilité de feuilleter, de faire des retours en arrière pour retrouver simplement une idée, etc.

C'est ce qu'on pourrait presque appeler un "paradoxe informatique" par rapport au livre: être pratique et ne pas l'être. Pratique par la facilité d'accès, la capacité de stockage, la disponibilité. Mais ça l'est beaucoup moins à partir du moment où il faut "jouer" avec le contenu, où il faut agir instinctivement avec lui. Pour le moment (je dis bien pour le moment), rien n'est plus pratique du point de vue du texte que le livre. Mais de même que le codex a supplanté le rouleau par sa facilité d'utilisation, de même que le papier a remplacé le parchemin par sa facilité de production, sait-on jamais, peut-être qu'un jour on trouvera un moyen plus simple de lire.

Pilou, qui a un peu revu son point de vue quant à la mort du livre, mais pas trop quand même parce qu'il les aime ces bouts de papier... :)

Anonyme a dit…

Je découvre votre blog avec beaucoup d'intérêt. Je ne suis pas bibliophile mais j'aime le monde des livres.
Personnellement, même si je suis convaincue des bienfaits d'internet pour la lecture et les recherches, je ne pense pas que cela puisse remplacer les livres. Rien ne vaut une soirée passée auprès du feu, bien installée dans un fauteuil à savourer un livre, tourner les pages, relire un passage et le méditer en regardant les flammes. Et cette posture n'est pas possible devant un écran ! De plus outre le fait de toucher, certains livres ont une odeur...

Quant à Cook, je me délecte à l'avance de ce que je vais lire...
Je reviendrai vous lire avec plaisir

Anonyme a dit…

Bonjour,

L'article de Beigbeder, s'il a le mérite de relancer ici le débat, me semble bien brouillon et peu approfondi : une simple chronique illustrant le salon du livre, dont les arguments sont noyés dans une emphase littéraire (je ne dis pas que cette emphase est denuée d'intérêt, mais peu pratique pour discerner des vrais arguments).


Bibliophiles que nous sommes, nous nous rabattons à peu près tous sur le côté pratique (et sensuel) du livre papier. Cela m'attriste mais il me semble inévitable que cet aspect pratique finisse tôt ou tard par être réglé par quelque innovation technique.

En revanche il est un point qui me semble primordial et non encore réglé : un livre papier est consultable de sa naissance à sa mort (destruction par l'eau, par le feu ?), un livre papier ne tombe pas en panne. Quid de l'ebook ? Les formats et standards informatiques ne cessent de changer. Quel crédit apporter à un ebook si le risque subsiste que 20 ans plus tard il soit illisible pour simple cause de changement de logiciel, parce qu'il a subi une chute de 50 cm de hauteur, ou simplement parce qu'il est passé sous un portique de contrôle en aéroport ? On entre là dans le domaine du virtuel certes, mais malheureusement aussi du provisoire. Tant que ces questions ne seront pas réglées, je vois mal comment la société pourrait baser l'archivage des connaissances sur un tel support non pérenne. Lorsqu'elles le seront, je crois en effet que nous pourrons dire adieu au livre papier.

Et, finalement, je suis intimement persuadé (oui, je suis pessimiste) que, comme toujours, seules les questions économiques décideront de l'issue, et non les arguments pour et contre que nous pourrions développer. S'il est plus rentable de vendre de l'ebook que du papier, ne sera vendu majoritairement que de l'ebook !

PierreG

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